Elle s'est faite une personnalité artistique singulière. Elle est devenue l'actrice intellectuelle par excellence. Et c'est rare, il faut l'avouer. La scène culturelle nationale a assisté à son évolution. Son développement. Son épanouissement. Latefa Aherrare, puisque c'est d'elle qu'il s'agit, a pu s'imposer durant les quatre dernières années par un style réfléchi et mure, une persévrence académique enrichissante, des choix culturels engagés et une audace artistique rare. Que ce soit dans les rôles principaux ou secondaires, que ce soit dans le théâtre ou dans le cinéma, que ce soit en tant qu'actrice ou en tant que réalisatrice, elle se donne à fond, prouvant un sens professionnel et un instinct perfectionniste. Elle ne fait que confirmer la devise chère aux grands comédiens : «Il n'y a pas de petits ou de grands rôles, il n'y a que des grands et des petits acteurs ». Sa vision pour l'art reflète ce penchant prospecteur et cet amour pour la vie d'abord. Lorsqu'elle s'est reproduite dans «Capharnaum» un peu partout au Maroc et à l'étranger, Latefa Aherrare, femme amazighe libre, était consciente que son engagement devait faire face à une interprétation rétrgograde envers l'art. Elle a combattu, non par une certaine plémique creuse et inutile, mais par de belles prestations sur les planches. De «Femmes et femmes» de saad Chraibi à « kandisha » de Jérome Cohen-Olivar, sa filmograhie dénote d'une qualité indéniable. Clamée par les uns et acclamée par les autres, lors de ses prestations à Capharnaum, la fierté des Imermouchen (Imouzzer Mermoucha) a choisi son camp avec le courage d'une femme exceptionnelle et la témérité d'une artiste rassise et coriace. Elle ne cache pas ses opinions et idées. Elle s'explique. Elle réplique. Elle interprète. Dans tous les débats publics sur l'art, l'engagement, la constitution, l'amazighité…. A Dakar, lors du dernier Forum Social Marocain, l'on a pu assister à son engagement, sa volonté d'œuvrer pour un monde meilleur. Parfois, en offrant gracieusement et généreusement son sourire et en s'approchant de ceux et celles qui en ont besoin. A Zagora, où elle avait un été, pris part au festival de cinéma de la ville, elle a semé la joie et l'allégresse parmi les enfants démunis de cette province, dans une ambiance bon enfant et dans une symbiose à envier. Sur toutes les questions, elle livre des réponses dans la douceur de l'être convaincu. Pas de sillonnement. Pas de chavirement. Elle sait très bien ce qu'elle veut. Elle n'y va pas par quatre chemins. La comédienne qui est également réalisatrice et enseignante de théâtre croit dur comme fer au langage du corps, à la langue connotative, à la finalité sublime de l'art et au rôle du théâtre et du cinéma dans l'élevation du goût d'un peuple et dans la réalisation de changement de mentalités. Tout ceci rime parfaitement avec un amour fou de la communication. Une envie de se dire. Une passion vive de se raconter. Une réelle ivresse pour la communication et la transparence. Sans conteste, elle est la comédienne la plus ouverte et la plus communicative. Les visiteurs de sa page facebook peuvent, en fait, suivre ses différentes activités. Elle veille à ce que l'on sache bien son activité du jour : Tournage, cours, lecture, débat, représentations… La profondeur de certaines de ses sentences plantées au mur ressemblent trop à des aphorismes. On l'a vu lors d'une série télévisée dédiée ces dernières années au public ramadanesque dans un rôle d'une fille gâtée et zen. Ce n'est pas uniquement un rôle à camper et à interpréter, mais c'est bel et bien un trait de personnalité qui consolide cet amour fou pour la vie, cette compréhension de ce que devrait être un Etre humain. La belle vie a un sens et il faut le déchiffrer… Latefa Aherrae passe pour une lectrice de ce sens résidant parfois dans le non dit et le non écrit. La preuve en sont ces péripes un peu partout dans le monde et cette passion pour se nourrir d'expériences, pour développer le partage, pour enrichir le fort intérieur. Il a certainement un don pour raconter des histoires en peu de mots. La meilleure histoire que le public puisse attendre est certainement cette période qu'elle a passée, obligée, dans l'aéroport de Londres, où elle a longuement et patiemment attendu la reprise du trafic aérien, après l'irruption du volcan islandais. Pour une comédienne qui a fait en 1991 «Le théâtre et son double», la vision ne peut être, pourtant, que limpide.