Coup de filet contre l'un des évadés islamistes de la prison de Kénitra. Mohamed Chetbi, l'un des neuf détenus islamistes qui s'étaient évadés dans la nuit du 6 au 7 avril dernier. Condamné à vingt ans de réclusion pour son implication dans les attentas terroristes du 16 mai 2003 à Casablanca, il purgeait sa peine à la prison centrale de Kénitra. Chetbi a été arrêté par les services de sécurité en compagnie de deux complices. Un communiqué officiel cité par la MAP rapportait l'information, jeudi 1er mai, sans toutefois préciser la date et le lieu de l'arrestation. Deux autres personnes ont été interpellées dans le même contexte de cette arrestation. Il s'agit des nommés Mohamed Said Essoussi et Khalid Guemmouri qui avaient donné refuge au terroriste en cavale, pour le soustraire aux recherches des services de sécurité, précisent les mêmes sources. Cette première arrestation mettra fin au statu quo établi depuis l'annonce de l'évasion des neuf terroristes de la prison de Kénitra. Elle pourra éclairer les enquêteurs sur les circonstances de cette opération d'évasion sans précédent dans les annales marocaines, qui avait pris de cours l'opinion publique nationale et révélé les failles du système pénitentier. Pour rappel des faits, les neuf détenus islamistes, condamnés à de lourdes peines et appartenant à la nébuleuse cellule de la Salafiya Jihadia, s'étaient évadés en creusant un tunnel de 22 mètres de long. L'un d'entre eux, Abdelhadi Eddahbi, considéré comme la tête pensante de cette opération, avait été condamné à mort, quatre de ses co-évadés à la réclusion criminelle à perpétuité et les quatre autres à 20 ans de prison. Mais les plus connus des évadés sont les deux frères Kamel et Mohamed Chetbi, qui résidaient en Espagne. L'un avait été arrêté au poste frontière de Sebta alors qu'il retournait au Maroc, l'autre dans des conditions qui sont restées obscures. L'évasion avait suscité plusieurs interrogations au sujet des moyens utilisés pour creuser le tunnel à partir des toilettes d'une cellule et le lieu de dissimulation des grandes quantités de gravats extraites. L'hypothèse d'une éventuelle complicité autant bien avec d'autres détenus, certains fonctionnaires de la prison et d'autres personnes de l'extérieur, a été avancée par les autorités, chose qui pourra être élucidée après ce coup de filet d'un membre des islamistes évadés. Les détenus avaient soigneusement préparé leur coup. Ils ont réussi à creuser un tunnel depuis deux cellules contiguës qu'ils partageaient jusqu'à l'extérieur de l'établissement pénitentiaire, au-delà du mur d'enceinte. Dans une lettre que les neuf prisonniers avaient laissée en prison après avoir pris la fuite, ils ont exprimé qu'ils s'estimaient victimes d'une «injustice ». Les auteurs y écrivirent : « Nous avons épuisé en vain tous les recours légaux et frappé à toutes les portes. Il ne nous restait que ce moyen pour retrouver notre liberté. » Et d'ajouter : « Nous faisons porter la responsabilité à ceux qui nous ont condamnés. Il ne faut pas chercher de complicité parmi les détenus de l'administration pénitentiaire. Nous ne ferons de mal à personne et nous sommes heureux d'avoir recouvré notre liberté. » Le ministre de la Justice, Abdelouahed Radi, avait indiqué qu'aussitôt informé de l'évasion des neuf détenus de la prison de Kénitra, son département avait pris toutes les mesures nécessaires relevant de ses compétences. Les services de sécurité se sont mobilisés dans l'ensemble du territoire national avec la mise en place de plusieurs barrages sécuritaires. « La situation des prisons au Maroc contribue pour sa part et d'une manière indirecte à l'évasion », avait déclaré M. Radi. D'autre part, le nombre élevé des pensionnaires, s'élevant, au 31 mars dernier, à 56.644, rend difficile la gestion des moyens disponibles notamment ceux relatifs à l'alimentation, aux soins médicaux, à l'hygiène, à la garde et à l'espace dans les prisons. Les conditions juridiques et organisationnelles détériorées au sein des prisons ont été également pointées du doigt, une situation attribuée au nombre réduit des gardiens de prisons (un gardien pour 11 détenus) et à la nature des crimes commis (à leur tête, drogue et terrorisme). Pour faire face à cette situation alarmante, plusieurs impératifs s'mposent. M. Radi a indiqué que plusieurs mesures seront prises, notamment la révision de la politique pénale, la construction de nouvelles prisons, l'acquisition d'appareils de surveillance développés, outre le recrutement de 6.000 gardiens à l'horizon 2012. Rappelons que, mardi 29 avril, SM le Roi a nommé l'ex-directeur général de la DGSN, Hafid Benhachem, délégué général de l'Administration pénitentiaire. Une nomination qui a été interprétée comme une réaction à l'évasion des terroristes de Kénitra.