A deux jours d'un débat déterminant pour le second tour de l'élection présidentielle, Nicolas Sarkozy et Ségolène Royal affûtent leurs arguments, entre diatribe anti-Mai 68 et dénonciation d'un projet "violent" et "brutal". "Il reste quelques jours pour convaincre, je m'y emploie", a déclaré lundi la candidate socialiste sur France 2, formant le voeu d'"ouvrir les yeux" des Français sur "le choix de société qu'ils vont avoir à accomplir" le 6 mai. Au lendemain du meeting monstre du candidat de l'UMP à Paris-Bercy, au cours duquel il a fustigé l'esprit de Mai 68, Ségolène Royal s'est inquiétée d'"un discours d'une grande violence, d'une grande brutalité". "Je crois que ce n'est pas cela dont la France a besoin aujourd'hui". "Mai 68 a été un moment où se sont affirmés des droits nouveaux dans tous les domaines. (...) Donner à penser que la gauche d'aujourd'hui serait une gauche qui détruirait les valeurs, qui serait favorable au désordre, c'est se moquer du monde, c'est jouer avec la réalité", a renchéri Jack Lang, son conseiller, sur France Info. La candidate socialiste tiendra un meeting public mardi au stade Charléty, à Paris. Nicolas Sarkozy, qui a gagné la Corse dimanche soir, a préparé quant à lui les derniers jours de campagne au cours de deux réunions de travail avec certains de ses proches collaborateurs. Au nombre des participants figuraient notamment son conseiller politique François Fillon, son directeur de campagne Claude Guéant, le ministre délégué aux Collectivités territoriales, Brice Hortefeux, la ministre de la Défense, Michèle Alliot-Marie, et le transfuge du Parti socialiste Eric Besson. L'arsenal socialiste, dont Ségolène Royal devrait user mercredi soir lors du débat télévisé avec Nicolas Sarkozy sur TF1 et France 2, visait lundi la proximité jugée "dangereuse" du président de l'UMP avec "les puissances d'affaires" et "les puissances médiatiques" et sa conversion à la proportionnelle. "UNE PERCHE TENDUE VERS LE FN" "Vous trouvez normal qu'il y ait Martin Bouygues et Jean-Luc Lagardère (NDLR : en fait, Arnaud Lagardère, son fils) qui soient présents dans un meeting de l'UMP pour l'élection présidentielle, qu'il y ait là cette confusion des genres ?", s'est interrogé le premier secrétaire du Parti socialiste, François Hollande, sur RMC et BFM TV au lendemain du meeting de Bercy. Quant à la proposition de Nicolas Sarkozy d'introduire une dose de proportionnelle aux élections législatives, Ségolène Royal juge que "c'est une perche tendue vers le Front national". "Nicolas Sarkozy en a déjà parlé notamment à propos du Sénat où elle existe et où on pourrait l'accroître, et il en a parlé dans la relation avec les centristes", a corrigé Patrick Devedjian sur Canal+. "C'est un sujet de débat entre l'UMP et les centristes éventuellement, mais pas avec le FN, qui n'appartient pas à la majorité présidentielle", a dit le député des Hauts-de-Seine. L'épisode du débat Royal-Bayrou clos, les deux camps continuent de courtiser l'électorat de l'ex-candidat centriste - plus de 6,8 millions d'électeurs. Dans une interview accordée au Monde, Ségolène Royal n'exclut pas un accord de gouvernement avec le centre et ne "s'interdit pas" de nommer François Bayrou à Matignon, bien qu'elle précise que l'ancien ministre socialiste Dominique Strauss-Kahn ferait "un très bon Premier ministre". Si le président de l'UDF "vient sur la majorité présidentielle, il fera partie de la majorité présidentielle. Comme toutes les autres forces politiques qui ont appelé à voter pour moi", dit-elle, évoquant des accords de désistement entre socialistes et centristes aux législatives des 10 et 17 juin. "Il ne faut pas sous-estimer" Ségolène Royal, souligne Patrick Devedjian. Nicolas Sarkozy "doit la traiter à égalité, comme une candidate solide, sérieuse, qui a reçu l'approbation d'un nombre important de Français (...) et elle mérite le respect".