Le kit de développement de Flex passera sous licence MPL d'ici à la fin de l'année. Une manière pour Adobe de séduire la communauté de développeurs Mozilla, d'allumer un contre-feu face à Microsoft, et de libérer des ressources pour développer Apollo, son client riche. Un nouveau round s'engage pour la domination des interfaces riches sur Internet (RIA) : Adobe invite les développeurs à s'emparer de Flex, sa technologie de créations de RIA. Une semaine après son accord avec Salesforce, l'éditeur a présenté un programme de mise en Open Source du SDK, le kit de développement, de Flex, dans l'espoir de créer une communauté active d'utilisateurs et de voir émerger de nouveaux projets. Le SDK sera placé sous licence MPL (rédigée par la fondation Mozilla), mais restera disponible sous licence commerciale. L'annonce est faite à quelques jours de l'ouverture de Mix'07, la convention organisée par Microsoft à Las Vegas (du 30 avril au 2 mai) consacrée aux nouvelles technologies d'interface. Microsoft y fera probablement plusieurs annonces - dont l'une pourrait justement concerner l'Open Source, croit savoir Frédéric Cavazza, consultant indépendant spécialisé dans les interfaces et les usages du Web 2.0 -, et effectuera des démonstrations de Silverlight, sa propre technologie d'interfaces riches pour Internet. Silverlight est l'extension, sous forme de plug-in pour navigateurs, de sa technologie d'interface pour Vista, WPF (Windows Presentation Foundation). Souvent qualifié de « Flash-killer », Silverlight permet en effet de diffuser du contenu multimédia sur différentes plateformes, à l'instar de ce que permet Flash. Le Builder et Flex Data Services restent sous licence commerciale Adobe essaie de son côté d'aller au-delà du multimédia en le combinant avec des possibilités de manipulation de données. C'est l'enjeu de Flex, qui offre la possibilité de bâtir des interfaces pour des applications transactionnelles sur le Web qui ne se différencient guère, dans leur ergonomie, des applications desktops. « Du Flash en plus musclé pour les entreprises », résume Frédéric Cavazza. De l'avis de Didier Girard, directeur technique de Sfeir et spécialiste des RIA, « Flex est une bonne technologie qui permet de faire des choses qui seraient difficiles à faire en Ajax », la combinaison de HTML et de Javascript très en vogue en ce moment pour rafraîchir les interfaces Web. En revanche, dit-il, « j'ai l'impression qu'Adobe n'a fait que la moitié du chemin, et ils ne peuvent pas ne pas aller au bout du processus ». De fait, si la machine virtuelle Actionscript (le langage utilisé pour Flash et Flex) est déjà sous licence Open Source (le projet Tamarin, confié à Mozilla), le module pour la manipulation et l'accès aux données Flex Data Services et l'atelier Flex Builder resteront uniquement sous licence commerciale, indique Jeff Whatcott, vice-président marketing produits d'Adobe. Qui assure qu'on peut très bien concevoir des applications Flex sans le Builder, avec un atelier de développement classique ou un simple éditeur de texte. « A tort ou à raison, quand tout n'est pas libéré, les gens sont perplexes, pas à l'aise, précise Didier Girard. La technologie GWT de Google n'a vraiment décollé que quand l'ensemble a été mis en Open Source. » « Une opération de drague évidente envers la communauté des développeurs Mozilla » Les différents éléments du SDK devraient être libérés et placés dans une structure ad hoc permettant le reporting de bugs et la soumission d'innovations vers la fin de l'année, précise Jeff Whatcott. La balle sera alors dans le camp des développeurs Open Source. Et plus particulièrement la communauté Mozilla, estime Frédéric Cavazza : « Nous sommes face à une opération de drague évidente, non pas envers Mozilla mais envers la communauté des développeurs Mozilla, un peu comme Ségolène Royal drague non pas François Bayrou mais ses électeurs. Adobe leur fait confiance pour faire évoluer Flex, ce qui lui permet de concentrer ses propres forces sur ses autres batailles avec Microsoft, sur les outils de développement [alors que Microsoft vient de sortir Expression, NDLR], les lecteurs vidéos et les RDA [Rich desktop applications, NDLR]. » A la différence des RIA, les RDA ne s'appuient pas sur un navigateur, ils fournissent une interface complète. Adobe travaille ainsi sur Apollo, déjà retenu par SAP pour son interface Muse. « Et c'est sur Apollo qu'Adobe se focalise », estime Frédéric Cavazza.