Aïd Al Adha approche au galop. Une fête religieuse d'abord mais aussi une courroie de transmission de fonds entre la ville et la campagne. Cette année la vente d'animaux destinés au sacrifice générera un chiffre d'affaire de plus de 7,8 milliards de dhs, une aubaine pour les éleveurs et les agriculteurs. Grande fête célébrée dans la liesse et la joie gastronomique, Aïd al Adha est aussi une fête de solidarité. Cette solidarité dépasse l'aumône, le partage et l'offre de nourriture, et acquiert une dimension économique non-négligeable. Cette année, les transactions commerciales relatives à la fête du Sacrifice généreront un chiffre d'affaire supérieur à 7,8 milliards de dhs. «C'est une façon indirecte et discrète pour la ville de subventionner la campagne» assure Yassine Jamali, agriculteur. En effet, la plus grande partie des bénéfices ira directement aux agriculteurs, et les recettes des ventes de l'Aïd leur permettront de financer d'autres activités agricoles. Les agriculteurs et éleveurs concernés se divisent en deux catégories : «ceux qui engraissent et vendent le produit de leurs brebis et ceux qui vont dans les souks 6 mois à l'avance, achètent à bas prix les bêtes de bonne qualité, explique Yassine Jamali. Puis, ils les vaccinent, les déparasitent, pour ensuite commencer à les engraisser». Cette année, près de 6 millions de têtes seront destinées à l'abattage, ovins et caprins confondus. La demande ne dépasse cependant pas les 5,1 millions, dont 4,7 millions d'ovins selon les estimations du ministère de l'agriculture et de la pêche maritime. «Les moutons c'est comme les voitures» «La vente de 5 millions de têtes, c'est un énorme transfert d'argent de la ville à la campagne. Si ces bêtes restent sur le marché, le prix du mouton s'effondre». Aid Al Adha permet donc de garder un certain équilibre économique. Le prix du mouton, vendu plus cher au gros qu'en détail y participe. «D'un point de vue économique, ce n'est pas logique. Mais il est vrai que quand on enlève la peau du mouton, le tube digestif et qu'il reste la carcasse, le kilo revient beaucoup plus cher que si on achète cette même viande au kilo, admet Yassine Jamali. Mais il y a le côté subjectif qui joue. On veut un beau mouton, avec des belles cornes, l'aile noire» poursuit-il. D'après Yassine Jamali, le prix du mouton varie selon les fluctuations du prix du grain. Car l'engraissage du mouton se fait au grain et non à l'herbe, et le grain est importé. «Donc si le grain coûte cher, l'éleveur est obligé de monter le prix pour pouvoir se faire de la marge. Il y a également des moutons qui coûtent cher, parce que ce sont de beaux moutons […] Les moutons c'est comme les voitures, on peut aller de la Twingo à la Chrysler, après chacun choisit selon sa subjectivité», explique Yassine Jamali, mais aussi selon son budget. Les éleveurs proposent cependant un large choix d'ovins: du «sardi» au simple mouton de montagne, il y en a pour toutes les bourses. Et ce n'est pas pour fâcher ces éleveurs qui font leur beurre en période de Aid, ce qui en fait la fête la plus attendue du monde rural.