Anxiété, frustration, troubles du sommeil et de l'humeur, fatigue et perturbation de l'horloge biologique... Les passages d'heure d'été à l'heure d'hiver ne sont pas sans conséquence sur le corps humain. Les Marocains, qui se préparaient déjà à retarder leurs montres, continueront à adopter l'heure d'été GMT+1 même en hiver. Alors que le ministère chargé de la Réforme de l'administration et de la fonction publique a annoncé mardi que les Marocains devront retarder leurs montres d'une heure ce weekend pour le passage à l'heure d'hiver, le gouvernement en a décidé autrement ce vendredi. Lors d'un conseil exceptionnel du gouvernement, ce dernier a annoncé l'adoption du projet de décret n° 2.18.855 relatif à l'heure légale. Un texte qui stipule que le Maroc maintiendra l'heure GMT+1 toute l'année et ce, à titre expérimental. Une annonce qui intervient alors que la plupart des Marocains se préparaient déjà à ce changement. De plus, adopter l'heure d'été en plein hiver ne risque pas de se faire sans répercussion sur la santé puisque cela constitue un nouveau changement. Saida Chett, psychologue clinicienne à Casablanca, nous explique ce vendredi que «cela risque d'être très dur» sur la psychologie des Marocains. «On n'est pas actif lorsqu'on se réveille à un certain moment sans avoir eu assez de sommeil et cela impacte notre efficacité durant la journée», fait-elle savoir. Pour la psychologue, «il faut expliquer aux Marocains et les convaincre de cette décision qui impactera leurs horloges biologiques déjà perturbées durant plusieurs périodes de l'année». «Ces changements ont des conséquences sur la psychologie, le rendement et l'efficacité de chacun. Il y a aussi la question de la sécurité qui se pose, puisque des personnes devront sortir le matin de chez eux alors qu'il fera toujours nuit.» Saida Chett, psychologue clinicienne Notre interlocutrice évoque notamment «des sentiments d'angoisse, d'anxiété et d'absence de sécurité» que peuvent développer certains Marocains qui doivent «s'adapter et accepter cette situation». «Il doivent aussi changer leur heure de sommeil et leur rituel à eux et ceux de leurs enfants mais avec le temps, cela va s'arranger», conclut-elle. Anxiété, fatigue et troubles du sommeil et de l'humeur De son côté, le psychiatre et psychanalyste Jaouad Mabrouki a déjà travaillé sur cette question, évoquant dans un article parvenu ce vendredi à Yabiladi, l'impact du changement d'heure sur la psychologie des Marocains. «Tous mes patients se plaignent le premier mois après le changement d'heure de troubles du sommeil et de fatigue tout au long de la journée», a-t-il écrit. Le médecin psychanalyste évoque même la «grande anxiété pouvant entraîner un trouble de l'humeur tel que la dépression» que provoquent ces changements. Il rappelle que «l'horloge biologique dans le cerveau et les glandes fonctionnent naturellement selon le lever et le coucher du soleil et selon la proportion de lumière naturelle absorbée par l'œil». «Ce système entretient une relation étroite avec la succession du jour et de la nuit et des saisons de l'année», ajoute-t-il, rappelant que «le corps s'adapte progressivement et naturellement aux changements des chapitres». «En ajoutant ou en soustrayant une heure, nous créons un changement soudain, brutal et éventuellement violent qui devient très coûteux pour la santé du corps, car le rétablissement de son équilibre normal prend beaucoup de temps.» Jaouad Mabrouki, psychiatre et psychanalyste Préparer les Marocains et mettre fin au doute et à l'incertitude Un changement d'heure peut provoquer, toujours selon le psychanalyste, «la fatigue des glandes, affectant ainsi l'humeur de l'humain et créant une anxiété interne reflétée dans son confort et ses relations avec les autres», conclut-il. De son côté, le psychiatre, psychanalyste et directeur de l'hôpital psychiatrique Béni Makada à Tanger, Mohamed Hassoun pointe du doigt l'impact du doute et de l'incertitude résultant de ces changements sur l'humain. «Une fois que nous instaurons un rythme stable, continu dans le temps et admis dans l'inconscient, le comportement humain finit par s'adapter». «Si vous dites aux gens que vous allez ajouter cinq heures d'un seul coup, à partir de demain, mais que cela va être permanent, les Marocains vont s'adapter contrairement à lorsqu'on leur dit qu'ils doivent encore modifier l'heure à plusieurs reprises sur un an», fait-il savoir. «Les secrétions de la dopamine et d'autres hormones sont confrontées à d'autres hormones secrétées suite à l'incertitude et le doute, ce qui perturbe le fonctionnement du cerveau humain, provoquant l'instabilité dans l'assimilation.» Mohamed Hassoun, psychanalyste Il suggère «d'expliquer tout d'abord, avec des arguments au lieu de donner une information» quant à de pareilles décisions. «Il faut aussi que le changement laisse un temps d'adaptation, même intellectuel tout en donnant des explications rationnelles en rapport avec la santé des Marocains et l'impact de cette décision sur nos foyers, notre quotidien et nos enfants», conclut-il.