En France, le CV anonyme porterait préjudice aux candidats issus de l'immigration. Le résultat de l'étude expérimentale, menée par Pôle Emploi, en 2010, contredit toutes les attentes. Prévu par une loi de 2006, le CV anonyme ne deviendra donc pas obligatoire par décret. Yazid Sabeg, commissaire à la Diversité et à l'Egalité des chances écarte, aujourd'hui, la mise en application obligatoire du CV anonyme, sans vouloir admettre totalement son échec. C'est officiel : le CV anonyme n'était finalement qu'une fausse bonne idée. L'anonymisation du CV qui supprime la mention de l'«état civil» du candidat, a soulevé un long débat, en France, pour aboutir à une grande déception. Selon une étude du Centre de recherche en économie et statistique (Crest), pour Pôle emploi, publiée en juillet, le CV anonyme réduirait ostensiblement les chances des candidats issus de l'immigration et/ou résidants en ZUS (Zone Urbaine Sensible) ou CUCS (Contrats urbains de cohésion sociale), contrairement à l'effet escompté. Yazid Sabeg, commissaire à la Diversité et à l'Egalité des chances, annonce donc, aujourd'hui, mercredi 17 août, l'abandon de sa généralisation, tout en restant positif : «je ne crois pas qu'il [le CV anonyme] doive être une obligation, comme cela a été envisagé un temps au niveau législatif, mais une faculté parmi d'autres, que certaines entreprises utilisent d'ailleurs avec succès». Le CV anonyme source de malentendus De novembre 2009 à novembre 2010, une cinquantaine d'entreprises, qui ne sont pas déjà nécessairement exemplaires en matière de discrimination, ont expérimenté le CV anonyme. Résultat : l'écart des chances de recrutement entre les candidats issus de l'immigration et/ou résidants en ZUS-CUCS et les autres candidats serait de 13,2 points à la présentation d'un CV anonyme. Avec un CV nominatif, il n'est que de 2,3 points. L'échec du CV anonyme est dû à plusieurs facteurs. Un rapport d'étape, fourni par Pôle Emploi en avril dernier, laisse supposer que la réinterprétation de l'employeur à «l'avantage des candidats potentiellement discriminés des autres signaux du CV» pourrait se retourner contre eux. Le rapport cite l'exemple des «trous» dans le CV. Ces derniers pourraient être tolérés au nom d'un accès plus difficile à l'emploi lorsque le CV montre que le candidat réside en ZUS, mais seraient assimilés à de l'incompétence lorsque cette information est masquée. Dans une moindre mesure, l'utilisation, dans 40% des cas, d'autres canaux de recrutement (réseau professionnel ou personnel, candidatures spontanées, marché de placement) pourrait également expliquer l'inefficacité de l'anonymisation des CV. Si CV anonyme n'a pas réussi à contrer la discrimination vis-à-vis des candidats issus de l'immigration, le concept reste une aubaine pour d'autres types de candidats, comme le démontre l'expérimentation, comme les femmes ou les personnes âgées.