La Suède est de plus en plus sollicitée par les mineurs marocains non accompagnés, qui y voient une terre promise en matière d'accueil sur le sol européen. Au moins six pays, 17 villes et des milliers de kilomètres. Un circuit titanesque qui n'est pas celui d'un athlète chevronné, mais des 235 mineurs marocains non accompagnés qui ont demandé l'asile en Suède en 2017, d'après El Mundo. Parmi eux, 92 avaient moins de 15 ans. Les plus âgés sont hébergés dans des centres qui ne dépassent pas 12 places et ne sont pas surpeuplés, comme c'est le cas de nombreuses structures réservées aux migrants mineurs en Europe, tandis que les plus jeunes sont placés dans des familles d'accueil. «En réalité, nous ne savons pas vraiment combien ils sont car ils bougent d'une ville à une autre», confie au quotidien espagnol la chercheuse suédoise Maria von Bredow, spécialisée dans les droits de l'enfant. Entre janvier et février 2018, 65% des mineurs non accompagnés arrivés en Suède venaient du Maroc. C'est donc un long, très long itinéraire que ces jeunes entament depuis Tanger, Nador, Fnideq ou Fès, qui les fait transiter par l'Espagne, la France, l'Allemagne, le Danemark et la Norvège. En France, leur présence n'est pas sans provoquer des remous. Les habitants et commerçants des XVIIIe et Xe arrondissements de Paris en savent quelque chose : deux pétitions ont récemment recueilli plus de 1 500 signatures, le but étant d'«alerter élus et autorités sur l'insalubrité qu'ils dénoncent déjà (…). Mais également sur l'insécurité liée (…) à la présence, depuis des mois, de groupes d'enfants des rues, une soixantaine de mineurs marocains âgés de 14 à 17 ans, toxicomanes pour la plupart, auxquels se sont jointes récemment de très jeunes filles». Les pétitions ont été remises le 27 mars au maire du XVIIIe arrondissement, Eric Lejoindre. «Contents et bien traités» «Il existe désormais en Europe un phénomène de mineurs errants d'origine maghrébine, qui déambulent d'un endroit à un autre sans projet migratoire clair», explique José Carlos Cabrera, responsable de la communication au sein du bureau andalou de la Commission espagnole d'aide aux réfugiés (CEAR). Pour ces jeunes, la Suède apparaît de plus en plus comme une référence sur le front de l'accueil et des ressources «qu'ils ne trouvent pas dans les autres pays», ajoute le responsable. Entre eux, ces adolescents n'hésitent pas à se passer le mot. «En Suède, la police est très sympa. Beaucoup de garçons qui sont déjà là-bas nous disent via Facebook qu'ils sont très contents et bien traités», répètent-ils à l'envi. Un idéal choyé que l'Unicef fait pourtant descendre de son piédestal. En mars, l'agence onusienne chargée de la protection de l'enfance a publié un rapport dans lequel elle déplore «la faible protection des enfants demandeurs d'asile dans les pays nordiques», selon l'agence Europa Press. Elle reproche au Danemark, à la Finlande, l'Islande, la Norvège et la Suède d'accorder la priorité aux lois migratoires plutôt qu'aux besoins en termes de protection et de services pour les demandeurs d'asile mineurs, contrevenant ainsi aux obligations internationales établies en 1989 par la Convention internationale relative aux droits de l'enfant. L'Unicef remet ainsi en question le respect des protocoles humanitaires dans les pays nordiques et le risque encouru par les mineurs, tant à l'échelle bureaucratique qu'en matière de services de base.