Les entrepreneurs immigrés en Italie ne connaissent pas la crise. Alors que la conjoncture ne s'y prête pas vraiment, le nombre d'entreprises lancées par les immigrés continue de croître, ayant même une incidence positive sur l'économie du pays. Et les natifs du Maroc occupent toujours la première place. Entre 2011 et 2013, les entreprises fondées ou gérés par des immigrés en Italie ont augmenté de 9,5%, soit 43 000 de plus. A fin 2014, le pays comptabilise 524 674 entreprises dirigées par des résidents nés à l'étranger, en hausse de 4 268 unités par rapport à la même période l'année précédente, avec un impact de 8,7% sur l'ensemble de l'économie transalpine. C'est ce que révèle le rapport 2015 Immigration et Entreprenariat réalisé par le Centre d'études et de recherche IDOS en partenariat avec la Confédération nationale de l'artisanat et des petites et moyennes entreprises, ainsi que MoneyGram. Motivés par leurs réalités Cette progression est constatée au moment où les entreprises détenues par les Italiens de souche ont des difficultés à résister. En 2014 seulement, 17 772 sociétés ont mis la clé sous la porte. «Il semble que les entrepreneurs immigrés ne connaissent pas la crise ou, au moins, ils ont été en mesure de développer des mécanismes de résistance et de résilience efficaces», notent les auteurs du rapport. En effet, alors que la conjoncture ne s'y prête pas en Italie, les immigrés continuent de créer des entreprises productives. D'après les auteurs du rapport, cette croissance de l'entrepreneuriat immigré «contribue même à équilibrer le déclin progressif de la base entrepreneuriale autochtone, durement éprouvée par la crise». La coordinatrice de l'étude, Dr Maria Paola Nanni, explique cette réussite des immigrés – entre autres - par le fait qu'ils n'ont pas d'autres choix que de se débrouiller tout seul. Ils «sont souvent exposés à une plus grande vulnérabilité sociale. Généralement employés dans des entreprises italiennes durement touchées par la crise, ils se retrouvent face à l'impossibilité de rester longtemps sans revenu. Beaucoup misent sur l'autonomie», argue-t-elle. Les Marocains restent en tête L'un des points positifs constatés par IDOS est la diversification des secteurs d'investissements. En effet, les businessmen issus de l'immigration ne se cantonnent plus à un seul secteur comme autrefois. Bien que le commerce et bâtiment dominent encore avec six entrepreneurs immigrés sur dix, les auteurs du rapport félicitent la montée d'autres secteurs tels que la location, agences de voyages et services aux entreprises qui ont vu la création de 3 500 nouvelles entreprises en 2014, ou encore la restauration et l'hôtellerie qui ont enregistrée 2 900 nouvelles entreprises. Par origine des immigrés, les Marocains restent en tête de l'entreprenariat étranger en Italie. En effet, même si la croissance de l'entreprenariat bangladais (+28%) a été la plus importante en 2014, les businessmen nés au Maroc sont les plus présents, détenant 15,2% des entreprises d'immigrés. Viennent ensuite les Chinois et les Roumains. Les Sénégalais arrivent en sixième position, tandis que les Tunisiens sont dixième. «Le fort potentiel des entrepreneurs immigrés pour le co-développement et une plus grande intégration progressive de la zone méditerranéenne est mis en évidence par le fait qu'au-delà du Maroc, on trouve également l'Albanie (7,3%), l'Egypte (3,7%) et la Tunisie (3,2%) parmi les dix premiers», a commenté Ugo Melchionda, président d'IDOS. Par ailleurs, ces immigrés se détachent peu à peu de l'artisanat pour se lancer dans des projets plus innovants, structurent de plus en plus leurs entreprises, endossent correctement leur responsabilité sociale en augmentant l'emploi et enregistre des bénéfices croissants. Des progrès salués par le vice-président de MoneyGram pour l'Europe du Sud, Massimo Canovi. D'après lui, le prix décerné par la compagnie de transfert d'argent aux entrepreneurs immigrés vise justement à encourager cette tendance. Pour mémoire, le dernier prix de l'entrepreneur immigré de l'année a été décerné en juin dernier à Abderrahim Naji, un Marocain de 48 ans fabricant de produits plastiques moulés qui a réalisé un chiffre d'affaires d'environ 7 millions € en 2014, et pourrait enregistrer une croissance de 50% cette année.