L'Union Européenne (UE) et le Maroc ont signé le 17 décembre dernier, un nouvel accord sur la libéralisation des échanges agricoles, agro-industriels et de la pêche entre les deux parties, et ce, malgré les prises de positions répétées des producteurs espagnols de fruits et légumes et récemment celles des Français. Les premiers ont du mal à accepter les termes du nouvel accord, au point de penser à recourir à la présidence tournante de l'UE, assurée par l'Espagne depuis le 1er janvier 2010. La mesure principale du nouvel accord est l'obtention par le Maroc de l'augmentation des quotas de six fruits et légumes : la tomate, la courgette, l'ail, la clémentine, le concombre et la fraise. En retour, l'accord permettra de « renforcer la position des exportateurs européens au Maroc, notamment dans le secteur des produits agricoles transformés », a précisé un communiqué de l'Union. Toutefois, les membres de l'UE n'auront pas les mêmes avantages, les Espagnols se sentant lésés ont été les premiers à manifester leur désaccord au sujet de l'accord. En effet, comme l'a souligné le journal espagnol El Economista, des pays comme la France ou l'Allemagne, grands producteurs de céréales, de lait et de viande, auront des facilités pour vendre leurs excédents de produits laitiers et dérivés. Ce qui n'est pas le cas pour l'Espagne, premier exportateur – vers le marché européen – de fruits et légumes. D'où les facilités accordées au Maroc ne sont pas les bienvenues. Concrètement, l'accord prévoit l'entrée libre en Europe, de tous les produits agricoles locaux à l'exception du contenu d'une liste comprenant les six fruits et légumes suscités, et de tout produit susceptible de concurrencer la production européenne, selon le quotidien marocain L'Economiste. De même, l'augmentation de quota pour les six fruits et légumes va de +22% dans l'immédiat pour la tomate, jusqu'à +44% dans 4 ans. En d'autres termes, le Maroc est autorisé à exporter immédiatement (entrée en vigueur de l'accord) 20 000 tonnes supplémentaires de tomates, et 32 000 tonnes de plus dans 4 ans. Pour la fraise, l'amélioration sera de 4600 tonnes, qui restera inchangée à partir de la 4e année. Comme autre avantage, le raisin de table, les abricots et la pêche, seront vendus à un prix 30% moins élevés que les prix d'entrée de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), alors qu'une dizaine d'autres (cerises, citrons, poires...) sont soumis au prix d'entrée OMC, a-t-on indiqué de même source. En contrepartie, les Européens amèneront librement sur le marché national, leurs produits laitiers à l'exception du lait liquide et de la poudre de lait entière, a-t-on ajouté de même source. L'huile d'olive, le concentré de tomate, les viandes et la charcuterie, sont soumis à des contingents tarifaires à leur entrée sur le territoire marocain. Tous ces avantages ont ranimé la crainte des Ibériques. La Fédération espagnole des producteurs et exportateurs de fruits et légumes frais (FEPEX) a estimé que l'accord portera « préjudice à ses intérêts ». Pour le Comité des organisations professionnelles agricoles de l'UE et la Confédération générale des coopératives agricoles de l'UE (COPA-GOGECA), il est « désastreux ». Le collectif ASAJA (Association agraire des jeunes agriculteurs) a pour sa part, accusé le gouvernement Zapatero de « camouflage ». Paradoxalement, l'accord Maroc-UE ne porte pas aussi préjudice aux Espagnols. Il faut rappeler que plus de 16% des exportations de tomates marocaines sont faites par des entreprises espagnoles installées au Maroc. Parmi elles, il y a les sociétés Duroc (région d'Agadir), qui détient 12,5% des parts de marché de l'exportation, et Safiland à Safi (1,85%). En outre les échanges commerciaux entre le Maroc et son voisin ibérique sont plutôt en faveur du second. L'Espagne est le deuxième fournisseur et client du Maroc après la France. La balance commerciale de l'année 2008 entre les deux Royaumes a été excédentaire en faveur des Ibériques. Ils ont vendu au Maroc des produits pour un montant total de 2,86 milliards d'euros et en acheté pour 2,36 milliards d'euros.