Ce n'est plus un secret pour personne, les études se succèdent et confirment davantage les constats. La Belgique est le pays de l'Union Européenne [UE] où les immigrés ont le moins accès au marché de l'emploi. Et les Marocains, communauté étrangère la plus importante en souffre sérieusement, pendant que de nombreux postes restent vacants, faute de compétences. «La Belgique figure parmi les mauvais élèves des pays de l'OCDE en matière d'intégration de ses immigrés, premières victimes de la pauvreté», indiquait récemment un rapport de l'Organisation de développement et de coopération économique [OCDE]. Ce rapport dressait un tableau sombre de la situation des immigrés en Belgique, notamment concernant l'emploi. Un constat que la Banque nationale de Belgique vient de confirmer avec une étude sur «l'insertion des personnes d'origine étrangère sur le marché du travail» publiée lundi 10 décembre. En effet, le taux d'emploi des personnes originaires des pays extérieurs à l'UE est de 45,8 % en 2011, soit moins de la moitié, note l'étude. Et de préciser que c'est le taux le plus bas de tous les Etats membres de l'Union. Quant à la gente féminine, seules 37 % des femmes d'origine extra-européenne travaillaient en 2010, soit quelque 20 points de pourcentage de moins que les femmes natives de Belgique. Même tendance se décline pour les enfants d'immigrés dont le taux d'emploi est également inférieur à celui des enfants de parents d'origine belge. En outre, les immigrés travaillent dans l'horeca [Hôtellerie, de la Restauration et des Cafés] ou dans le BTP. A noter que la population née à l'étranger représente environ 14 % de la population totale résidant en Belgique. Et le Maroc est le premier pays d'origine concerné, puisque la première communauté étrangère en Belgique est issue du royaume chérifien, suivie de la France, des Pays Bas et de l'Italie. Formation et Discrimination, principaux freins Selon l'étude, plusieurs raisons justifient cette situation, notamment, le niveau d'éducation de la population immigrée qui reste relativement bas, le problème de formation généralement en inadéquation avec le marché de l'emploi, ainsi que la discrimination sur l'origine des parents. En effet, le fait d'avoir un parent né en Belgique augmenterait les chances d'obtenir un emploi. «De fait, les inégalités commencent dès avant la recherche d'emploi», relève l'étude. Ces résultats «ne font que confirmer les études faites depuis des années par les universitaires», confie à Yabiladi Ahmed El Khannouss, député au Parlement bruxellois et Echevin [adjoint au Maire] à Molenbeek-Saint-Jean. Ayant travaillé pendant plusieurs années au ministère de l'emploi, ce politique d'origine marocaine connait bien le sujet, d'autant que dans la commune dont il a la charge, la population immigrée est majoritairement marocaine. «Dans ma commune, sur 95 000 habitants, 45 000 représentent la population active avec un taux de chômage de 27,9%. Pour les jeunes de moins de 26 ans, ce taux passe à 40%. Donc 4 jeunes sur 10 sont sans emploi», relève-t-il. En plus de la formation et de la discrimination, M. Khannouss relève aussi «l'islamophobie», comme cause au chômage de certains jeunes immigrés : «Quand vous avez une vingtaine d'étudiants qui sort de l'Université, les élèves les plus brillants sont d'origine étrangère. Mais les Belgo-belges trouveront du travail au bout de quelques semaines, tandis que les immigrés mettront des mois, voire des années». Il raconte l'histoire d'un jeune «très intelligent». Après avoir «brillamment terminé son cursus», il a peiné pendant des années pour avoir un emploi avant de finalement en trouvé un dans le secteur informatique. «Parce qu'il est d'origine X ou Y et musulman de surcroît, lance-t-il. C'est un exemple extrême, mais c'est la réalité. A cause des terroristes, on évite d'embaucher certains jeunes honnêtes dans des postes dits sensibles à cause de leur appartenance religieuse». Pourtant, 12 000 emplois vacants rien qu'à Bruxelles L'adjoint au Maire de Molenbeek-Saint-Jean explique que la situation des jeunes dans la région bruxelloise relève du «paradoxe», puisque cette zone du pays devient au fil des ans, un hub pour l'emploi. Pour une population de 1,15 million d'habitants, 650 000 travaillent, mais 350 000 d'entre eux viennent des autres régions du royaume. Mais, «nous avons quand même 12 000 emplois vacants pour lesquels on n'arrive pas à trouver la main d'œuvre qualifiée», affirme M. Khannouss.