Le 15 février 2019, le ministère de la Famille, de la solidarité, de l'égalité et du développement social lançait le Programme national de qualification des professionnels de la prise en charge des personnes autistes. Sur le plan national, la rareté de l'expertise et le manque de professionnels formés à ces méthodes de prise en charge a poussé, durant ces dix dernières années, certaines associations à organiser des séances de formation au profit de professionnels et de quelques familles concernées par le handicap de l'autisme. L'autisme ou le trouble du spectre de l'autisme (TSA) est le plus connu des troubles envahissants du développement. Les enfants atteints de TSA ont, plus généralement, des problèmes dans trois secteurs cruciaux du développement : les interactions sociales, la communication et le comportement. Aussi, certains enfants peuvent révéler des signes d'autisme dès le plus jeune âge, souvent avant l'âge de 36 mois. Faisant partie du groupe des troubles envahissants du développement (TED), l'autisme est un trouble neuro-développemental complexe dont la sévérité des symptômes varie grandement entre les enfants. Pour répondre aux besoins spécifiques de ces enfants aux troubles autistiques, plusieurs pays, comme la France, les Etats-Unis, le Canada ou encore la Belgique, ont, depuis des années, œuvré à l'intégration de méthodes comportementales appliquées à la prise en charge de l'autisme. Ces programmes de formations sont destinés aux professionnels de la prise en charge éducative, aux parents, aux enseignants et encadrants, ainsi qu'à la profession médicale et sociale. Retard national de l'accompagnement des enfants à troubles autistiques Il y a un peu plus de 3 ans, en février 2019, le ministère de la Famille, de la solidarité, de l'égalité et du développement social lançait le Programme national de qualification des professionnels de la prise en charge des personnes autistes. Ce plan vise à amélioration de la qualité de leur prise en charge socioéducative en formant 180 cadres répartis sur 3 promotions, avec une moyenne de 60 cadres par an. Cependant, le Maroc recense approximativement 680 000 personnes autistes, selon l'association «Vaincre l'autisme», dont plus de 216 000 enfants. Aussi, 34 enfants autistes naissent chaque jour dans le Royaume pour un total de 12 800 naissances chaque année. En somme, depuis les initiatives prises par ministère de la Famille, l'impact reste limité et en dépit des actions étatiques mises en place, les difficultés persistent. Un certain nombre d'associations et de familles, notamment les plus démunies, n'ont toujours pas accès à la maîtrise des méthodes comportementales. Ce retard est notamment dû aux coûts de ces programmes alternatifs payants, mais également en raison de la concentration de ces initiatives associatives ou privées dans les centre-villes. Une prise en charge trop onéreuse Aujourd'hui, il n'existe pas de stratégie de dépistage précoce au Maroc. En effet, le diagnostic de l'autisme est multidimensionnel étant composé de différentes étapes étalées sur plusieurs mois et impliquant de nombreux professionnels tels que des médecins ou pédiatres, des orthophonistes, des psychologues, psychiatres, psychomotriciens, ORL, éducateurs, assistantes sociales. Pour répondre aux besoins des personnes ayant un trouble du spectre de l'autisme, l'Etat marocain octroi une aide nationale à hauteur de 900 dirhams par mois nécessitant le droit parental au régime d'assistance médicale (RAMED). Un système qui se veut être efficace, mais qui est en réalité, est bien discriminatoire, car un parent de disposant pas du RAMED ne serra pas pris en charge. De plus, l'aide de 900 dirhams accordée par l'Etat n'est pas suffisante pour la prise en charge d'un enfant à troubles autistiques. En effet, le budget d'accompagnement et de soutien de ses enfants est considérable. Selon M'Hammed SAJIDI, président-fondateur de Vaincre l'autisme, un accompagnement spécialisé des enfants ayant un trouble du spectre de l'autisme nécessite un budget mensuel d'environ 5 000 dirhams. Un frein à l'éducation Si le regard de la société sur le sujet évolue, l'école a encore de solides obstacles à lever sur le chemin de l'inclusion. Actuellement, le modèle marocain, à l'instar de nombreux autres dans le monde, consiste en une scolarisation dans un milieu spécifique. On recense approximativement 98 classes d'intégrations scolaires (CLIS) sur l'ensemble du territoire. Ces classes comprennent généralement 6 élèves pour un éducateur. De plus, manque de moyens financiers ainsi que l'absence de personnel qualifié constituent un frein à la scolarisation et l'intégration des enfants à ayant un trouble de l'autisme. En effet, les enfants scolarisés nécessitent la présence accompagnant des élèves en situation de handicap (AESH) ou d'auxiliaires de vie scolaire (AVS) afin d'intégrer une école, ce qui représente une somme importante. Pour ces raisons, de nombreux parents sont réticents à l'idée de scolariser leurs enfants à troubles autistiques. Cependant, selon l'article 1 du Dahir relatif à l'obligation de l'enseignement, «l'enseignement est obligatoire pour les enfants marocains des deux sexes depuis l'année où ils atteignent l'âge de sept ans jusqu'à treize ans révolus». Pour résoudre ce dilemme, de nouvelles solutions voient le jour. L'association Vaincre l'autisme lançait en ce sens le concept FuturoSchool ayant pour objectif de donner aux enfants à troubles autistiques autistes les bases pour bénéficier d'une scolarisation en milieu ordinaire. L'école offre une solution alternative d'intervention en milieu ordinaire avec la mise en place de programmes individualisés permettant à l'élève de s'adapter à l'environnement dans lequel il évolue. Un stigmate populaire Au Maroc, la prise en charge de l'autisme a été longtemps marquée par des clivages profonds entre ceux qui voient ce trouble comme la manifestation d'un handicap et ceux qui mettent en avant l'aspect psychique. Dans le contexte marocain, les préjugés et les stéréotypes qui caractérisent les pratiques sociales liées au handicap ou les troubles neurodéveloppementaux sont dominés par l'image de la personne diminuée dans son apparence physique, dans ses capacités physiques et mentales, et dans ses fonctions sociales, c'est-à-dire dans ses capacités à pouvoir remplir les rôles assignés dans la société. Les personnes en situation de handicap subissent quotidiennement de nombreuses formes de discriminations. Non seulement, elles sont toujours stigmatisées et marginalisées par la société marocaine, mais elles sont également privées de plusieurs droits comme l'éducation, l'emploi, la santé, sans parler du coût élevé de la prise en charge pour la personne elle-même et pour sa famille.