L'AMDH a brossé un sombre portrait des droits de l'Homme au Maroc. Avec chiffres et des cas à l'appui pour étayer sa version, le rapport de l'AMDH a consacré sa première partie aux violations des droits de l'Homme en 2011 alors que la seconde est réservée aux six premiers mois de cette année. Le très attendu rapport de l'AMDH sur les droits de l'Homme au Maroc vient de tomber. Sans la moindre complaisance, l'ONG y énumère les graves violations des droits de l'Homme commises durant l'année précédente, soulignant la poursuite des détentions politiques. L'association présidée par Khadija Riyadi a calculé 48 cas répartis entre activistes du Mouvement du 20 février, militants arrêtés lors de sit-in ou de protestations à caractère social, syndicalistes et les Sahraouis pro-Polisario. Ce chiffre est près de celui enregistré dans la rubrique des disparitions forcées, l'AMDH a relevé 42 nouveaux cas entre 2010 et 2011 qui s'ajoutent aux anciens dossiers non encore élucidés de Mehdi Ben Barka, Abdelhak Ouassouli, Houcin Manouzi. Les prisons sous l'emprise de l'approche sécuritaire Les conditions d'incarcération se détériorent. C'est le constat de l'AMDH. Dans son rapport, l'ONG estime que cet état des lieux est la conséquence logique de l'emprise de l'approche sécuritaire prônée par la Haute délégation des prisons depuis 2008, date de l'arrivée à la tête de cette administration d'un «responsable des crimes durant les années de plomb». Une allusion plus que transparente à Hafid Benhachem. La prééminence de cette approche se caractérise par le recours massif aux «punitions collective» contre les détenus salafistes, notamment après la mutinerie qu'ils avaient organisé les 16 et 17 mai 2011 à la prison de Salé2. Cette main dure de la Délégation des prisons a suscité des réactions hostiles de la part des islamistes qui ont commencé à observer de longues grèves de faim à l'origine du décès de trois détenus en 2011 : Mustapha Lazaâr à Bouaârfa, Rachik Ahmed à Meknès et Aziz Ouadghiri à Fès. Une tendance qui s'est poursuivie en 2012 avec le décès de l'Algérien Ahmed Benmiloud. Dans son rapport, l'AMDH a tenu à rappeler que les services de Benhachem interdisent aux associations des droits de l'Homme et la presse de visiter les prisons. Une mesure qui est en vigueur depuis 2009. Droit à la protestation pacifique L'ONG n'y va pas de main morte. Pour l'AMDH le champ des libertés publiques s'est nettement réduit en 2011. Les mouvements de protestations pacifiques sont souvent interdits ou réprimés par la force, causant parfois la mort de participants. Le rapport de l'association cite les cas de Karim Echaib de Sefrou et Kamal Ammari de Safi, qui ont trouvé la mort respectivement le 20 février et le 29 mai 2011. L'AMDH rappelle que le parquet n'a pas encore diligenté aucune enquête afin d'élucider les circonstances exactes de ces deux décès. Il faut signaler que dans le cas de Ammari, le CNDH du tandem El Yazami-Sebbar a préparé un rapport qu'il a remis aux ministères de l'Intérieur et la Justice mais dont la teneur n'a pas été divulguée au grand public. Le droit à la création d'association n'a pas été épargné de cette régression des libertés publiques. L'AMDH cite que nombre d'associations attendent toujours la reconnaissance officielle des autorités à l'instar de «l'Association nationale des diplômés sans emploi, Attac Maroc, le Groupement d'action sur le développement et la migration et certaines section de l'AMDH», énonce le document. Par ailleurs, les demandeurs d'asile et les immigrés en situation illégale au Maroc souffrent de l'approche sécuritaire. Le rapport de l'ONG souligne la poursuite des vagues d'arrestations dans les rangs des Subsahariens et leurs déportations massives vers les frontières avec l'Algérie. Les six mois de 2012 Le rapport de l'AMDH a consacré sa seconde partie à la situation des droits de l'Homme durant le premier semestre de cette année. L'ONG commence par saluer les libérations, en février à l'occasion de l'Aid Al Maoulid, du syndicaliste Seddik Kabbouri et de ses camarades de la CDT ainsi que celle des trois chioukhs de la salafia jihadia (Haddouchi, Kettani et Rifki). Cette parenthèse s'est vite fermées avec les arrestations du rappeur Mouad L7aqed et Younès Belkhdim, membre du M20F. Les deux activistes ont été condamnés respectivement à un an et deux ans de prison ferme. Durant ces premiers six mois, l'AMDH a relevé de nombreuses interventions violentes des forces de l'ordre contre des manifestants pacifiques à Beni Bouyach, Imzouren, Khouribga, Larache etc… Une approche qui a causé la mort, le 5 février, du jeune Laâsri Cherkaoui dans les locaux de la police de Témara (très proche de Rabat).