Le Royaume ne sera pas épargné par le réchauffement climatique et ses conséquences, les zones rurales qui abritent 40% de la population seraient les plus touchées. La Banque mondiale livre son deuxième rapport Groundswell sur les projections des migrations climatiques internes à l'horizon 2050, traitant notamment le cas du Maroc et ses disparités. La deuxième partie du rapport Groundswell de la Banque mondiale, intitulé «Agir face aux migrations climatiques internes» a été présenté aujourd'hui par le vice-président chargé du développement durable à la Banque mondiale, Juergen Voegele. Le rapport, qui projette les mouvements de populations liés au réchauffement climatique à l'horizon 2050 fait le point notamment sur la situation du Maroc. Menacé par les dangers du réchauffement, notamment le manque d'eau, la baisse de production agricole, la hausse du niveau de la mer et les ondes de tempêtes, le Maroc connait depuis les années 1960, une hausse de la température supérieure à la moyenne mondiale avec des augmentations moyennes observées de 0,2 °C par décennie, accompagné d'une baisse générale des précipitations, mais une hausse des sécheresses, inondations et vagues de chaleur. La hausse du niveau de la mer pourrait toucher jusqu'à 1,8 million de personnes au Maroc, avec un impact sur l'économie pouvant atteindre 5,5 milliards de dollars (49 milliards de dirhams). De plus, le Maroc pourrait souffrir en 2050 d'une extrême pénurie d'eau touchant l'ensemble de la population. Le rapport rappelle que selon le classement de Notre Dame Global Adaptation Initiative, le Maroc n'est pas dans une situation particulièrement vulnérable en termes de changement climatique, mais obtient un score de 0,418 sur 1 en terme de préparation, pénalisé par une préparation sociale relativement faible (0,299). Ces disparités sociales se ressentent notamment dans le clivage entre les zones urbaines et rurales. En 2014, 79,4% des pauvres se trouvaient dans des zones rurales alors qu'elles ne représentaient que 40% de la population globale. Entre 0,3 et 2,7 millions de migrants climatiques en 2050 Selon les trois estimations du rapport, de la plus optimiste à la plus pessimiste, le Maroc devrait connaitre d'ici à 2050 des migrations à l'intérieur des frontières, dues aux changements climatiques, allant entre 0,3 million (0,8% de la population projetée) et 2,7 millions (7,7% de la population projetée) de personnes. Sur les projections moyennes de 0,5 et 1,9 million de migrants climatiques, elles représenteraient entre 21% et 52% des migrations internes au Maroc. Outre le changement climatique, le modèle de migration est bien établi au Maroc, au profit principalement du corridor Rabat-Casablanca, les travailleurs étant attirés par les projets d'infrastructures, les métiers du tourisme et de services. Une «culture de la migration» avait été avancée en 2001 par de Haas, se référant aux habitants des oasis et zones rurales quittant leurs terres pour subvenir à leurs besoins dans les villes. 10 villes de plus d'un million d'habitants d'ici à 2050 Si aujourd'hui le Maroc ne recense que 3 villes de plus d'un million d'habitants, les évolutions migratoires et démographiques pourraient conduire à ce que dix villes dépassent le million d'habitants d'ici à 2050. Rabat, Agadir et Tanger devraient, par leurs situations géographiques et les projections climatiques, particulièrement bénéficier de ces migrations internes. À l'inverse, Safi, le sud d'Agadir et de Tiznit, les zones autour de Marrakech ainsi que l'ouest et le sud-ouest de Casablanca devraient connaitre de forts exils liés au manque d'eau et à la baisse de fertilité des terres. Le rapport a sondé des Marocains ayant dû migrer à l'intérieur du Royaume, ceux-ci ont justifié leur exode par «la faiblesse des revenus agricoles, le manque d'emplois agricoles et de meilleures opportunités ailleurs». Consultées par la Banque mondiale, les autorités marocaines ont fait part des efforts sur le moyen et long terme développés, notamment dans la préservation de l'eau, le développement durable, la résilience des secteurs clefs, la diversification des moyens de subsistance et la promotion des approches d'économie circulaire.