La justice marocaine est réputée pour sa lourdeur. Les exécutions des jugements en sont, d'ailleurs, sa principale tare, sans oublier la corruption qui contribue à retarder les échéances. Un MRE, de surcroît arnaqué, à son corps défendant apprend les subtilités de la justice de chez-nous. Il s'appelle Houcine Azdad. Depuis plus de 32 ans, il réside à Liège en Belgique où il a un cabinet de médecine. Pour la majorité, son nom ne dira pas grand-chose mais son cas n'est pas sans rappeler de mauvais souvenirs pour des MRE qui ont répondu à l'appel du cœur en investissant les économies de toute une vie dans des projets au Maroc. Une belle expérience qui a viré, pour certains d'entre eux, au cauchemar. Houcine Azdad en fait partie. Cette histoire commence en 1999, par l'acquisition, à quelques mètres de la plage d'Al Hoceima, d'un lot de terrain. Après cinq ans de travaux, en 2004, un complexe touristique, Chafarinas Beach, émerge du néant. «Sa réalisation m'a coûtée un million d'euros. Lors du tremblement de la même année qui avait frappé la ville, les délégations officielles avaient pris leur quartier chez-nous», se rappelle Azdad. Selon les statuts de la société, le médecin est l'unique gestionnaire. Ce dernier a distribué certaines parts à son ancienne épouse et à des membres de sa belle-famille «sans qu'ils aient à verser aucun centime en échange», nous indique Daniel Libin, le représentant de Houcine Azdad au Maroc. Jusque là tout allait bien pour le médecin de Liège avant que des problèmes conjugaux ne commencent à perturber la bonne marche du complexe touristique. «J'ai délégué la gestion du projet à mon frère, opticien en France. Une décision qui n'était nullement du goût de mes associés qui sont vite passés à l'acte, attaquant mon bureau, agressant mon frère et se sont même permis de prendre avec eux des chèques en blanc portant ma signature que j'ai laissé au gestionnaire pour quelques achats imprévus ou le règlement des salaires des employés», soutient Azdad. «Immédiatement après cette attaque, ils ont réussi à accuser mon frère d'agression. Une accusation montée de toutes pièces mais qui lui a couté dix mois de prison ferme. Une fois éloigné, ils se sont emparés de la gestion du complexe. Les chèques en blanc ont été portés devant la justice avec des sommes faramineuses de plus de 1 million de dirhams chacun. Une manœuvre pour m'empêcher de retourner au Maroc», ajoute-il. Le recours à la justice Nullement découragé par la tournure des événements, Houcine Azdad décide de défendre son droit et les économies de toute une vie. Il porte l'affaire devant le tribunal de commerce de Fès. Août 2011, la cour donne raison au médecin de liège et reconnaît qu'il est l'unique gestionnaire du complexe touristique. La riposte de ses associés ne s'est pas faite trop attendre, ils interjettent l'appel. Le 4 janvier, le tribunal prononce un verdict similaire à celui en première instance. Une victoire, certes importante, mais réclame une exécution. Laquelle tarde à venir. «Mes associés exigent que je sois présent lors de l'exécution de ce jugement, je refuse de me rendre à Al Houceima, sachant que je risquerais d'être arrêté pour livraison de chèque sans provision. J'ai proposé d'être représenté par une personne tierce mais ils refusent. Et on n'est pas encore sorti de l'auberge», conclut-il avec le sourire. Cette affaire a été portée à la connaissance du consulat du Maroc à Liège.