En Algérie, la guerre médiatique lancée depuis des mois, contre le Maroc a franchi un nouveau cap alors que Rabat observe le silence. Explications. Le mercredi 7 avril, deux médias algériens, un militaire et un autre civil s'en prennent au Maroc de manière simultanée. La revue de l'armée algérienne El Djeich a ainsi tiré une salve en direction du royaume, consacrant dans son numéro d'avril de longues pages à une «enquête» sur le trafic de drogue en provenance des frontières occidentales de l'Algérie. Laissant de côté le langage diplomatique, la publication a traité le Maroc de «narco-Etat qui poursuit sa politique visant à inonder l'Algérie en drogue. Une menace réelle sur la sécurité nationale», écrit le mensuel édité par le ministère de la Défense, officiellement dirigé par le président Abdelmadjid Tebboune, et dont le directeur de publication n'est autre que le général Said Chengriha, chef d'Etat major. Pour étayer ses allégations, la revue a présenté une nouvelle version de l'opération menée par les Forces armées royales, le 13 novembre à El Guerguerate. Elle avait pour objectif de créer dans la zone tampon des «brèches (…) afin de faciliter le transport de la résine de cannabis vers le Sahel et, au-delà, en Afrique de l'Ouest et en Europe», soutient El Djeich. Trois zones où les deux voisins ennemis se livrent à une concurrence pour s'imposer. El Djeich a par ailleurs souligné que l'argent de la drogue finance les groupes extrémistes en Afrique. Le Maroc et le Hirak algérien Le Maroc préfère jusqu'à présent ignorer ces attaques médiatiques et politiques qui vont crescendo sur la question du trafic de drogue. Pour mémoire en juin 2013, le ministre délégué aux Affaires étrangères Youssef Amrani avait révélé, dans des déclarations sur la chaîne de télévision 2M, que les responsables algériens passaient sous silence lors des réunions bilatérales le problème du trafic de drogue. Et de préciser que les voisins de l'Est avaient refusé la constitution d'un comité maroco-algérien composé des ministres des Affaires étrangères et de l'Intérieur des deux pays pour traiter cette question. En août 2014, c'est le ministre de l'Intérieur, Mohamed Hassad, qui avait affirmé dans une déclaration gouvernementale que «l'Algérie demeure, dans la région le principal pourvoyeur des psychotropes dont l'impact est beaucoup plus dévastateur sur la santé et la sécurité des populations». Si El Djeich a choisi la piste du trafic de drogue pour s'en prendre au Maroc, le quotidien L'Expression a conclu, dans ce qui s'apparente à un procès expéditif, à la «responsabilité avérée» du Maroc «dans le jeu scabreux contre l'Algérie». «Des connivences ont été prouvées entre les mercenaires "algériens" de l'étranger et des officines étrangères coordonnant avec le Makhzen», estime le journal francophone dans un article publié le mercredi 7 avril. Auparavant, le pouvoir algérien pointait du doigt «la main invisible de l'étranger» ou «l'ennemi historique» dans la reprise du mouvement populaire de contestation. Cette désignation directe fait suite à l'intervention du président Tebboune lors d'une réunion du Haut conseil de sécurité, où il a accusé des «milieux séparatistes» et des «mouvances illégales proches du terrorisme» d'instrumentaliser les marches du Hirak pour attaquer «des institutions et des symboles de l'Etat». Des actes subversifs et des «dérapages que l'Etat compte combattre avec intransigeance».