Le débat sur la déclaration des biens et des avoirs au fisc du pays de résidence, détenus au Maroc par les MRE, est remis en avant ces derniers jours. Malgré le démenti de la Direction générale des impôts (DGI), les articles annonçant l'automatisation de l'échange de ces informations entre les pays, ont suscité l'inquiétude chez de nombreux MRE. Qu'en est-il dans le détails ? Panique chez de nombreux Marocains résidant à l'étranger (MRE) à l'annonce par plusieurs médias de l'automatisation des échanges des données relatives aux avoirs entre le Maroc et plusieurs pays de l'OCDE. Challenge, EcoActu, Hespress ou Le Courrier de l'Atlas «ont établi le lien entre cette convention et l'obligation pour les non-résidents de déclarer dès 2021, leurs comptes bancaires détenus au Maroc dans leurs déclarations fiscales déposés dans leurs pays de résidence». La Direction générale des impôts (DGI) a pourtant souligné, mercredi, que la convention multilatérale pour la mise en œuvre des mesures relatives aux conventions fiscales BEPS signée par le Maroc en juin 2019, ne portait pas sur l'échange automatique de renseignements. La DGI a souligné que le Maroc n'était tenu «par aucun engagement pour échanger de manière automatique, des informations à des fins fiscales au cours de l'année 2021». Des informations échangées à la demande des Etats Malgré le démenti de la DGI, nombre de Marocains résidant à l'étranger (MRE) continuent de s'inquiéter des conséquences sur la fiscalisation de leurs avoirs au Maroc. Nombre d'entre eux ont interpellé Yabiladi se demandant si les récentes communications de la DGI ne présageaient pas de nouveaux changements en termes d'échange d'informations fiscales entre les Etats. Or ces obligations de déclaration ne sont pas nouvelles et l'échange d'informations concernant les biens et les avoirs à l'étranger reste encadré, principalement pour les besoins du contrôle fiscal. Avocat et spécialiste en droit des affaires, Me Mohamed Oulkhouir souligne à Yabiladi qu'il s'agit plutôt d'un rappel pour «se conformer aux lois en se tenant à des réglementations qui existent depuis longtemps». Il n'existe pas de nouvelles mesures, mais il est impératif de déclarer notamment les comptes bancaires détenus au Maroc, pour les ressortissants installés à l'étranger. «Au cas où cela n'est pas fait et qu'il y a un contrôle fiscal, le seul fait d'avoir un compte à l'étranger non-déclaré constitue une infraction, au regard de la loi du pays de résidence, même si ce compte est alimenté par des revenus déclarés aux impôts de ce pays-là», rappelle l'avocat. Dans ce sens, il précise que «nous avons des exigences au Maroc aussi, concernant la détention d'un compte à l'étranger, puisque cela ne peut se faire sans une autorisation préalable de l'Office des changes», faisant foi d'une déclaration. «Dans le droit français notamment, la déclaration des biens et des avoirs à l'étranger est une obligation de longue date, en vertu de laquelle chaque résident fiscal français doit déclarer des comptes bancaires, s'il en a en dehors du territoire national. Il faut donner le nom de la banque et les références du compte, sans la nécessité de déclarer le montant ou les transactions réalisées avec ce compte-là.» Me Mohamed Oulkhouir Il s'agit ainsi d'informer l'administration fiscale que l'on détient un compte à l'étranger car en cas de contrôle fiscal, «l'Etat français peut faire une demande d'entraide fiscale suivant la coopération entre les Etats et essayer d'avoir des informations auprès des autorités marocaines», indique encore Me Oulkhouir. «Ces mécanismes n'ont rien de nouveau aujourd'hui» et «cela ne concerne que des cas spécifiques, puisque le fait d'avoir un compte bancaire à l'étranger ne signifie pas pour autant que l'on est fraudeur ou qu'on ne respecte pas les lois du pays de résidence», insiste-t-il. Obligation de déclaration de l'ensemble du patrimoine détenu au Maroc L'avocat souligne aussi que «la majeure partie des sommes versées par les MRE dans leurs comptes bancaires enregistrés au Maroc proviennent de leurs propres revenus perçus dans le pays de résidence». Pour lui, «l'essentiel est simplement de rappeler à nos Marocains du monde que cette déclaration est obligatoire, afin qu'ils ne se retrouvent pas sous le coup de tentative de dissimulation de biens». Avant cette polémique sur les échanges automatisés des données, la question s'est également posée en Belgique. Plusieurs familles marocaines sont tombées sous le coup du délogement obligatoire de leurs habitations sociales ou du remboursement de leurs allocations perçues à l'Etat belge. Mohamed Oulkhouir explique que la situation des nationaux vivant en Belgique ou encore aux Pays-Bas est différentes, puisque ces Etats exigent une déclaration du patrimoine détenu à l'étranger. Cela permet notamment de déterminer si les personnes sont propriétaires de logements à l'étranger, afin d'évaluer leur situation financière et mesurer leur éligibilité au logement social ou à des prestations spécifiques. «Au cas où un bien n'est pas déclaré, la loi exige un remboursement des allocations perçues ou le devoir de quitter un logement social», affirme Me Oulkhouir, selon qui «ces pays considèrent problématique le fait d'être propriétaire à l'étranger et de demander un habitat social, mais c'est plus une question d'équité dans l'accès à ces logements pour les personnes à revenu limité qu'une obligation de déclaration fiscale». Il ne s'agit donc pas d'«empêcher les personnes d'investir dans l'un des deux pays, mais de déclarer cet investissement puisqu'elles signent des déclarations sur l'honneur mentionnant que leur patrimoine déclaré est exact». De la même manière, des ressortissants étrangers installés au Maroc sont tenus de déclarer leurs avoirs à leurs Etats. Selon l'avocat, beaucoup considèrent cela comme un détail, mais ce dernier risque de les exposer à des pénalités.