Le Mondial qui bat son plein au Qatar montre déjà qu'il est possible pour un petit pays, de surcroît arabe, et même musulman, de montrer que dans le monde, il n'y a pas que l'Occident, et que dans le monde (sur)excité du football, il y a un ailleurs que l'Europe ou les Amériques… Tant de choses ont déjà changé et tant d'autres changeront avec ce Mondial de tous les excès pour certains, de tous les succès pour d'autres. Boycott ! Il faut ignorer ce Mondial, ne pas suivre ses matchs, ostraciser les tyrans qataris qui torturent, maltraitent, asservissent les travailleurs immigrés, puis les tuent, par milliers. 6.500 morts sur les chantiers de ce Mondial, donc, obtenu grâce à la corruption, re-donc. Voilà pour le côté dramatique. En réalité, ce débat n'est audible qu'en France, où il est même bruyant, beaucoup moins chez les Allemands et les Nordiques. Britanniques et Latins en ont un peu parlé, avant d'oublier, et de faire comme le monde, fêter le Mondial. Nombre de Français, égaux à eux-mêmes et fidèles à leur inconséquence, continuent de se ridiculiser, d'abord aux yeux de l'opinion mondiale, et ensuite auprès de leur propre public qui fait la part des choses mais qui est privé dans plusieurs villes de cette fête du sport à laquelle son équipe, tenante du titre, est présente. Le Mondial a-t-il été confié au Qatar par corruption ? Certainement, Sepp Blatter est connu… Mais Michel Platini aussi, ami de Nicolas Sarkozy, régulièrement cité dans cette affaire. Et puis, toutes les Coupes du monde sont notoirement l'occasion de distribution de pots-de-vin. Mais la France ne boycotte pas, par ailleurs, le Qatar qui lui permet de briller sur la planète foot européenne avec le PSG, pas plus qu'elle ne boycotte l'énergie qatarie qui permettra à tant de Français de s'éclairer, de se chauffer, de fonctionner… pour mieux insulter le Qatar. Exception française… Emergence des petits pays. En réalité, de vieux pays du vieux continent vivent mal leur vieillesse. Marianne, par exemple, en dépit du Botox macronien, continue de faire de la résistance contre ces émergents, petits et totalement décomplexés, qui osent… qui avancent… qui bousculent les anciens réflexes de dirigeants néo-coloniaux aux yeux et au verbe tournés vers l'avenir mais aux esprits ancrés et encrassés dans le passé. Les Européens, sérieusement malmenés en Ukraine, acceptent mal, très mal, que le « confetti » Qatar leur impose ses conditions, aussi draconiennes que très certainement hautaines pour entrer dans le tour de table du gisement gazier North Field, le plus grand réservoir au monde, par exemple… Ils acceptent mal le leadership d'al Jazeera, les médiations pour l'Afghanistan, les relations de Doha avec Téhéran… Ils n'acceptent rien d'autre qu'une soumission qui a vécu. Alors, ils attaquent en meute, visant le bas, convoquant les droits de l'Homme, dénonçant des crimes qu'ils sont seuls à voir, faisant des torsions à la vérité et autres contorsions malsaines, mais oubliant l'Ocean Viking et d'autres bateaux de malheureux errant au large de leurs côtes, oubliant cette hideuse idée britannique d' « exportation » de migrants vers le Rwanda…. Les Américains, dans ce jeu, tirent leur épingle, et font à leur habitude de la realpolitik, développant leurs bases militaires, poussant leurs avantages économiques, et apprenant à recevoir dans le cercle des Grands de ce monde même les petits pays qui veulent émerger, qui émergent, et même submergent les Européens, tétanisés par leur désormais médiocrité, mal vécue. Le Mondial des excès. « Un très lourd bilan social et environnemental », avec 160 rotations d'avions par jour pour les supporters, disent-ils… chiffre à placer en miroir avec les 30.000 vols quotidiens à travers l'Europe en août 2022, contre près de 35.000 sur la même période en 2019. Et puis, disent-ils encore, « le coût sanitaire des joueurs, blessés pour cause de calendrier devenu beaucoup trop intense »… il est vrai que face aux centaines de matchs par joueur lors d'une carrière (tournois nationaux, continentaux, internationaux…), des dizaines par saisons, des kilomètres parcourus en haute intensité par des joueurs dopés, ce sont les quelques matchs du Mondial de Qatar qui causeront le plus de dégâts… Et, disent-ils toujours, « le coût suffisamment problématique de ce Mondial pour menacer le système du foot business », mais des gamins échangés à des dizaines de millions d'euros, calibrés et nourris au milligramme par des nutritionnistes fous et manipulés dans tous les sens par des Dr Jekyll ne posent aucun problème, des clubs milliardaires, des joueurs quasiment lobotomisés… En fait, si ce Mondial est celui de tous les excès, c'est bien ceux des outrances d'Occidentaux déconcertés par le succès du Qatar, des contrevérités d'Européens bousculés par l'insolente aisance de l'émirat, par son intelligence du moment, des perfidies de Français qui n'acceptent pas de voir « ce petit pays » exiger l'égalité en tout, et obtenir ce qu'il souhaite. En vérité, dans ce monde, les excès et les démesures existent partout, les disproportions et les extravagances sont universelles, chaque pays, chaque région en présentant des particularités. Ce qui devrait être dénoncé, en revanche, ce sont les condescendances enregistrées ici et là, contre le Qatar. Et si le Qatar s'en souvient, après, comme il se dit déjà ici et là, ce sont les auteurs de ces condescendances qui en paieront le prix. Fort. Plus tard.