La situation s'envenime en Côte d'Ivoire. Les mutineries de soldats, qui réclament une revalorisation de leur solde ainsi que le paiement de primes, se sont étendues, samedi 7 janvier, jusqu'à gagner Abidjan, la capitale économique du pays. Samedi après-midi, la présence de mutins a été signalée à l'intérieur du ministère de la Défense, à Abidjan, au moment où le ministre Alain-Richard Donwahi se trouvait à Bouaké, d'où est parti le mouvement de revendication, pour "écouter et trouver une solution" avec les chefs des mutins. "Il y a de nombreux tirs en l'air à l'intérieur du ministère de la Défense", a déclaré un diplomate témoin de la scène, qui a ajouté que des mutins avaient également pénétré à l'intérieur du quartier général de l'armée. Prise de Bouaké, deuxième ville du pays Des soldats se sont emparés vendredi de Bouaké, la deuxième ville de Côte d'Ivoire, et la contestation s'est depuis propagée à au moins quatre autres localités. A Bouaké, ville d'un demi-million d'habitants où les mutins ont établi des barrages vendredi pour empêcher l'arrivée de renforts dépêchés par le gouvernement, de nouveaux tirs ont éclaté samedi vers 6 heures du matin (7 heures, heure de Paris) avant de s'estomper dans la matinée. Des coups de feu nourris ont été entendus dans la nuit à Khorogo dans le nord et à Bouaké samedi matin. Des fusillades ont également été signalées à Man dans l'ouest, à Touleupleu et à Abidjan où sont situés les administrations et le parlement. D'anciens membres des Forces nouvelles à la manœuvre A Abidjan, un journaliste de Reuters a vu des forces loyalistes, notamment des soldats de la Garde présidentielle, prendre position aux abords des trois ponts qui enjambent le lagon séparant le nord et le sud de la ville. "Des coups de feu ont aussi éclaté dans notre caserne", a déclaré un soldat du complexe militaire d'Akouedo situé dans un quartier résidentiel d'Abidjan. Les raisons de ces tirs n'ont pas été clairement établies mais un soldat mutin a expliqué que des mouvements suspects avaient été observés à l'extérieur de la caserne locale. Un journaliste de Reuters qui s'est rendu à Bouaké et a pu rencontrer certains mutins a précisé que la plupart étaient des soldats du rang ainsi que des combattants démobilisés. La majorité semblait être d'anciens membres des Forces nouvelles, mouvement qui avait mené une rébellion et fait de Bouaké sa capitale de fait de 2002 jusqu'à la fin de la guerre civile en 2011. Révolte "compréhensible mais déplorable" Le président Alassane Ouattara a tenu une réunion de crise vendredi soir avec le ministre de la Défense et les responsables des forces armées. Dans un communiqué lu à la télévision nationale, le ministre de la Défense a appelé les soldats "à garder leur calme et à rentrer dans les casernes en vue de permettre la recherche de solutions durables". "Nous allons discuter avec nos hommes, recueillir leurs préoccupations et trouver des solutions à cette situation", a-t-il ajouté à l'issue de la réunion d'urgence. Il a estimé que la révolte était "compréhensible mais déplorable. Déplorable pour l'image de notre pays et pour le travail qui a été fait par le Président de la République depuis la sortie de crise".