Suite à l'exécution samedi 2 janvier du cheikh et dirigeant chiite saoudien Nimr al-Nimr par l'Arabie Saoudite, en même temps que 46 autres personnes, des « terroristes » selon Riyad, l'ambassade saoudienne en Iran a été ravagée, et les autorités de Riyad ont décidé de rompre les relations diplomatiques avec leur grand voisin. Dimanche 3 janvier au soir, la police saoudienne a essuyé des « tirs nourris » dimanche soir qui ont fait un mort dans le village natal du dignitaire chiite tué. « Visiblement, c'est l'heure des faucons en Arabie saoudite », estime l'éditorialiste français Jean-Pierre Perrin dans Libération. « Ce n'est plus aujourd'hui seulement Téhéran qui montre ses muscles. Riyad, aussi, exhibe les siens. Et elle ose le faire sans l'appui des Etats-Unis »... Il faut dire que depuis quelques années, l'Arabie Saoudite a constaté que les Etats-Unis opèrent un rapprochement avec Téhéran et que l'équilibre des alliances au Moyen-Orient en a été rompu, d'où les différentes initiatives saoudiennes dans la région (Yémen, force arabe sunnite...). Or, c'est bien sur le théâtre de guerre syrien et irakien que les conséquences risquent d'être les plus lourdes. Azadeh Kian, spécialiste de l'Iran à l'université Paris-VII-Diderot, estime à juste titre que « si l'Iran et l'Arabie saoudite ne collaborent pas contre Daech, forcément, c'est Daech qui va en profiter ». Mais l'exécution de du chef rebelle syrien Zahran Alloush, près de Damas, par l'armée de Bachar al-Assad alliée de Téhéran, aura certainement conduit à l'exécution du cheikh al-Nimr, par désir de vengeance. À la tête de l'armée de l'islam, financée et appuyée par Riyad, Alloush était l'homme clé des Saoudiens dans la guerre civile syrienne. Pour sa part, le Maroc, allié traditionnel et grand ami de l'Arabie Saoudite, a préféré couper la poire en deux et appeler à la modération... une position qui est analysée comme la décision de prendre une certaine distance avec la politique saoudienne. Dans un communiqué publié dimanche 3 janvier, le ministère marocain des Affaires étrangères indique que « le Maroc compte sur la sagesse des responsables saoudiens et iraniens afin d'éviter que la situation actuelle ne s'étende à d'autres pays de la région déjà confrontés à de nombreux défis et à des éléments de fragilité multiples ». Rabat ne prend donc pas position, à l'inverse de plusieurs pays du Golfe et de la Jordanie qui ont convoqué les ambassadeurs accrédités chez eux.