La taxation des boissons sucrées se veut un dispositif prometteur pour faire face au phénomène d'obésité qui engendre nombre de maladies chroniques, du diabète à l'hypertension artérielle en passant par les maladies cardiovasculaires, devenues un vrai problème de santé publique. Dans cet élan, les députés de la Chambre des représentants avaient adopté, en novembre, des mesures concrètes au niveau du projet de Loi de Finances (PLF 2019) pour contrecarrer la surconsommation du sucre par les marocains. Il s'agit de l'augmentation des taxes intérieures de consommation imposées aux boissons gazeuses et non gazeuses contenant 50% du sucre. Les membres de la Chambre des Conseillers ont par la suite introduit des amendements, consistant en un système ascendant dans l'application des taxes intérieures de consommation sur les boissons gazeuses et non gazeuses, en fonction de la quantité de sucre contenu (article 09 du Code des Douanes et Impôts Indirects). « C'est une taxe comportementale qui a pour double cible l'industrie agroalimentaire et le consommateur », a confié à la MAP, le député à la Chambre des représentants, Mostafa Ibrahimi, soulignant que « le sucre n'est pas une substance indispensable » et peut être remplacé par d'autres ingrédients. Aux industriels, « on demande de diminuer la concentration en sucre » alors qu'aux consommateurs, la deuxième cible, ils réfléchiront à deux fois avant « d'acheter un produit cher », a-t-il expliqué. A l'instar de ce qui a été fait dans plusieurs pays à travers le monde, notamment l'Espagne, la France, la Grande-Bretagne, l'Estonie et Mexique, le Maroc s'apprête à taxer les boissons sucrées dans le but de changer le comportement du consommateur et de l'industriel, a-t-il soutenu, faisant remarquer que le combat contre le sucre est bien plus difficile que celui contre le tabac dont la nocivité est connue et reconnue. Le député, qui est également chirurgien à Kénitra, a rappelé que l'obésité, issue de la surconsommation du sucre et de la sédentarité, est à l'origine du diabète (type 2) et de plusieurs autres pathologies. → Lire aussi : Le ministère de la Santé dément les informations relayées au sujet des médicaments contre le rhume « Il y a une corrélation directe entre obésité, diabète, Hypertension artérielle et maladies cardiovasculaires, ainsi que d'autres pathologies chroniques », a-t-il souligné, précisant que l'obésité est en passe de devenir un fléau au Maroc. Argument à l'appui. Le chirurgien a relevé que le Haut-Commissariat au Plan avait publié, en 2011, une étude démontrant qu'un tiers de la population marocaine est en situation d'obésité ou de pré-obésité, dont 63 pc sont des femmes. En 2014, a-t-il poursuivi, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a relevé que 14 pc des enfants sont obèses. L'obésité chez l'enfant est plus grave que chez l'adulte, a fait savoir M. Ibrahimi. Un enfant de 13 ou 14 ans va vivre avec l'obésité plusieurs années avec des conséquences néfastes dont la mortalité précoce, a souligné Dr Ibrahimi, conseillant des activités physiques quotidiennes d'un minimum de 30 min, comme la marche. Selon une étude publiée en 2014 par le cabinet McKinsey, le coût de cette obésité au Maroc est de 24 milliards de dirhams par an alors que la même année le budget du ministère de la santé était à 12 milliards de dirhams, a-t-il tenu à préciser. « C'est un véritable problème de santé publique », a martelé Dr Ibrahimi, faisant savoir que le Maroc compte aujourd'hui 2 millions de diabétiques, dont la situation ne s'arrange pas aisément à cause notamment du mode de vie et de la sédentarité. Ces maladies ont aussi un impact sur le pouvoir d'achat du citoyens parce que plus de 50 pc des malades ne sont pas assurés et une conséquence sur les caisses d'assurances maladies puisque 3 pc des assurés consomment 50 pc du budget des caisses, a-t-il relevé. En octobre 2016, l'OMS a appelé les gouvernements à imposer des taxes sur les boissons sucrées, estimant qu'un renchérissement de 20 pc de leur prix pourrait réduire d'autant la consommation de ces produits. « Les boissons sucrées constituent l'un des facteurs qui contribuent à l'obésité et au diabète », avait souligné l'OMS. Au Mexique, la consommation des boissons sucrées a été réduite de 6 pc après l'application d'une taxe ayant entraîné une hausse de 10 pc de leur prix. L'OMS a depuis longtemps estimé que les sucres devaient constituer moins de 10 pc de la consommation énergétique quotidienne d'une personne, et appelle maintenant les pays à réduire de moitié ce taux, à 5 pc. Cela représenterait 25 grammes, ou l'équivalent de six cuillères à café de sucre par jour, alors qu'une canette de boisson gazeuse représente 10 cuillères à café de sucre.