Après plus de deux ans de statu quo, Bank Al-Maghrib (BAM) a décidé, lors de la 3ème réunion de son conseil en 2022, de porter le taux directeur à 2%, dans la perspective de freiner l'ascension de l'inflation, dont le spectre continue de planer sur le pouvoir d'achat et globalement sur l'économie nationale. Loin d'être une simple décision prise pour uniquement pallier dans l'immédiat les tensions inflationnistes, l'audacieuse augmentation de ce taux de 50 points de base (pbs) devrait avoir un impact conséquent sur l'évolution de l'inflation en 2023. Elle vise à prévenir tout désencrages des anticipations d'inflation et assurer les conditions d'un retour rapide à des niveaux en ligne avec l'objectif de stabilité des prix. C'est ce qu'a affirmé la Banque Centrale, dont les projections tablent sur une accélération de l'inflation à 6,3% sur l'ensemble de l'année 2022, avant de revenir à 2,4% en 2023. Une inflation alimentée par des pressions d'origine externe D'ailleurs, le Wali de BAM, Abdellatif Jouahri, a souligné, lors d'un point de presse tenu à l'issue de la réunion du conseil, que cette inflation continue d'être alimentée par des pressions d'origine externe, mais aussi interne. Lire aussi : Sortie du Trésor à l'international : Les conditions « de plus en plus difficiles » Il a, dans ce sens, fait savoir que les dernières données disponibles montrent une large diffusion vers les prix des produits non échangeables. « La diffusion de la hausse s'élargit. Sur les 116 sections de produits et services qui composent le panier de référence de l'indice des prix à la consommation, 60,3% ont connu une augmentation de plus de 2% en août contre 42,2% en janvier 2022 et 23% en moyenne entre 2018 et 2019 », a expliqué M. Jouahri. A cela s'ajoute la persistance des prix élevés des matières premières alimentaires et énergétiques. En effet, les données relatives aux huit premiers mois de l'année indiquent que l'inflation a augmenté à 8% en août après 7,7% en juillet, 6,3% en moyenne au deuxième trimestre et 4% au premier, tirée essentiellement par le renchérissement des produits alimentaires et des carburants et lubrifiants. Quid des anticipations de l'inflation ? S'agissant des anticipations, le récent rapport de politique monétaire (RPM) fait ressortir que les résultats de l'enquête de conjoncture de Bank Al-Maghrib dans l'industrie, relatifs au mois de juillet 2022, indiquent que 49% des industriels enquêtés anticipent une hausse de l'inflation au cours des trois prochains mois, contre 60% en moyenne au deuxième trimestre. Une proportion de 49% d'entre eux prévoit une stagnation, alors que 2% tablent sur une baisse, soit un solde d'opinion de 47%. Ledit rapport indique aussi que les résultats de l'enquête sur les anticipations d'inflation de BAM relatifs au troisième trimestre 2022 montrent que les experts financiers s'attendent à une accélération de l'inflation à 3,8% en moyenne au cours des huit prochains trimestres, contre 3,6% prévu un trimestre auparavant. A plus long terme, ces experts tablent sur une inflation de 2,2% pour les 12 prochains trimestres, au lieu de 2,3% le trimestre précédent. Selon la même source, les enquêtés considèrent que l'évolution de l'inflation au cours des huit prochains trimestres serait déterminée principalement par celles des cours mondiaux des matières premières hors pétrole, des prix à la pompe et de l'inflation des pays partenaires.