La crise financière mondiale menace de priver des millions d'enfants vivant dans les pays les plus pauvres d'accès à l'éducation, réduisant ainsi à néant les progrès réalisés au cours de la dernière décennie, avertit un rapport de l'Unesco. "Alors que 72 millions d'enfants dans le monde ne sont toujours pas scolarisés, l'effet conjugué du ralentissement de la croissance économique, de l'augmentation de la pauvreté et de la pression accrue sur les budgets, pourrait affecter les progrès réalisés en matière d'éducation au cours des dix dernières années", souligne le Rapport mondial de suivi sur l'Education pour tous 2010. Intitulé "Atteindre les marginalisés", ce rapport, présenté cette semaine à New York, note des "avancées spectaculaires" en matière d'éducation au cours des dix dernières années, ce qui contraste fortement avec la "décennie perdue" des années 1990. En effet, depuis 1999 le nombre d'enfants non scolarisés a diminué de 33 millions tandis que celui des enfants terminant le cycle primaire a augmenté. En Afrique subsaharienne, le taux des inscriptions est cinq fois plus élevé que dans les années 1990. Des avancées rapides ont notamment été observées au Bénin et au Mozambique, indique le rapport. Les disparités entre les sexes ont elles aussi diminué. En l'espace d'un cycle primaire, le rapport au Sénégal est passé de 85 filles pour 100 garçons à la parité. Même constat positif en Asie du Sud et de l'Ouest. Le nombre d'enfants non scolarisés a été largement divisé par deux, notamment grâce à des mesures encourageant l'intégration des filles au système éducatif. En Inde, par exemple, ce nombre a chuté de près de 15 millions entre 2001 et 2003. Pour la Directrice générale de l'Unesco, Mme Irina Bokova, la communauté internationale ne pourrait se permettre "qu'une génération d'enfants soit sacrifiée et privée de ses chances d'accéder à l'éducation et de sortir de la pauvreté". Les auteurs du rapport préconisent que l'Afrique subsaharienne devrait faire l'objet d'une action prioritaire. Au vu du creusement des déficits budgétaires dans la région, les plans de dépenses pour l'éducation risquent de subir de douloureux réajustements, ont-ils fait observer. Conséquence directe de la crise, les dépenses publiques affectées aux systèmes éducatifs de la région pourraient être amputées de quelque 4,6 milliards de dollars par an en 2009 et 2010. Afin de prévenir une telle situation, le rapport exhorte les pays riches et le G-20 à augmenter leurs aides à des conditions favorables pour éviter de greffer les budgets des pays les plus pauvres. Selon le rapport, les donateurs devront combler un déficit annuel de financement de 16 milliards de dollars pour pouvoir atteindre l'objectif d'enseignement primaire universel d'ici 2015. Cependant, le rapport de l'Unesco reconnaît qu'il sera difficile pour les donateurs d'augmenter leur aide dans le contexte actuel de forte pression budgétaire. Le rapport note toutefois qu'en dépit de ces contraintes budgétaires, il faudrait accroître le niveau des aides de manière significative pour parvenir aux 16 milliards de dollars nécessaires à l'Education pour tous. En ce sens, les auteurs du rapport appellent le Secrétaire général des Nations Unies, M. Ban Ki-moon, à convoquer une conférence de donateurs de haut niveau en 2010 pour tenter de combler ce déficit de financement. Pour l'Unesco, le monde ne parviendra à scolariser tous ses enfants qu'en mettant la marginalisation au centre des politiques d'éducation. A la veille du grand sommet international de 2010 sur les objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) de l'ONU, le rapport souligne que les opportunités manquées dans le domaine de l'éducation seront autant d'obstacles à la croissance économique, à la réduction de la pauvreté et aux progrès en matière de santé et dans d'autres domaines. En effet, l'ONU examinera les progrès réalisés vers les OMD lors d'une réunion de haut niveau prévue en septembre prochain.