Les travaux de la 2ème rencontre internationale "Marrakech Security Forum", initiée sous le thème "L'Afrique face aux défis du terrorisme: AQMI une menace stratégique ?", se sont ouverts jeudi matin à l'initiative de la Fédération Africaine des Etudes Stratégiques (FAES). Organisé en partenariat avec le Centre Marocain des Etudes Stratégiques (CMES), ce conclave rassemble quelque 200 participants de haut niveau, dont des responsables civils et militaires, des dirigeants d'organisations internationales, des sécuritaires et des experts, en provenance de 70 pays africains, européens, américains et asiatiques. S'exprimant à cette occasion, M. Mohammed Benhammou, président de la FAES, a souligné que cette rencontre est devenue un rendez-vous annuel dédié à la réflexion, l'analyse, l'échange ainsi qu'aux débats sur des problématiques portant sur la sécurité en Afrique et les conséquences sur la stabilité internationale. Le choix du thème de cette édition a été dicté par la nécessité d'engager une réflexion sérieuse sur un risque imminent à la sécurité du continent, a-t-il poursuivi, rappelant que le terrorisme a connu ces derniers mois, un retour en activité sous plusieurs formes: opérations perpétrées dans certains pays de la région, des kidnappings de citoyens étrangers dans la région ou des tentatives d'infiltration de plusieurs pays limitrophes de la région Sahélo-saharienne. Le démantèlement de réseaux terroristes dans les régions limitrophes au Sahel, la multiplication des opérations de prise d'otage et l'intervention de plus en plus avérée des puissances étrangères dans la région "montrent que progressivement, on passe à un autre niveau de la menace terroriste dans le Continent qui nécessite de nouvelles réponses mieux élaborées et plus concertées", a affirmé M. Benhammou. "Quant on essaie aujourd'hui d'approfondir la réflexion et le débat sur ce phénomène terroriste dans la région, on est tous conscients que nous sommes face à un phénomène mutant et à un ennemi invisible", a-t-il dit, relevant les connexions avérées entre le terrorisme et la criminalité transnationale qui a pris une ampleur importante dans cette zone, soit en matière de trafic de drogues, d'armes légères, ou des réseaux de trafic humain et d'immigration clandestine. La tendance actuelle des événements indique un renforcement de l'AQMI dans la bande Sahélienne et des prolongements ouest- africains et maghrébins, a estimé M. Benhammou, faisant observer que "ce renforcement est d'autant plus dangereux qu'on assiste de plus en plus à une connivence entre les groupes terroristes, les bandes criminelles et des mouvements séparatistes dont les intérêts convergent vers un affaiblissement des Etats en place et une détérioration de la situation sécuritaire". Ces connexions, a-t-il poursuivi, ont fait que cette zone est devenue aussi un espace dans lequel il y a un flux économique illicite important, ce qui représente en quelque sorte un détournement de toutes les voies qui permettaient auparavant de bloquer le financement du terrorisme dans d'autres zones, poussant les terroristes à trouver d'autres voies alternatives pour le financement. "Nous sommes tous conscients que la menace est réelle, que le risque nécessite l'élaboration d'une stratégie globale, régionale, une stratégie qui repose sur l'ouverture sur la communauté internationale et sur tous les pays qui ont des intérêts dans le continent", a-t-il expliqué, soulignant l'existence d'une prise de conscience que la réponse à ce phénomène global ne peut être que globale et collective. Pour M. Benhammou, toutes les tentatives de réponse individuelle n'ont pas pu et ne peuvent pas apporter la réponse adéquate, d'où la nécessité actuellement, à côté de la volonté de mieux connaitre le phénomène et mieux le suivre, de mieux l'accompagner et d'avoir une action préventive. Il a aussi souligné la nécessité d'une large concertation ouverte à l'ensemble des pays de la région pour élaborer une stratégie régionale les impliquant tous. "Dans une zone qui a plusieurs particularités, une zone complexe qui a beaucoup de difficultés, le rôle de tous les pays est important", a-t-il noté, estimant que la guerre contre le terrorisme "ne doit pas nous faire oublier qu'il y a une guerre qu'il faut mener en même temps et d'une manière parallèle contre la criminalité transnationale, car cette guerre sur les deux fronts peut nous permettre non seulement de faire face à ce phénomène voire même de l'éradiquer". Il est certain que le travail qui doit être fait est un travail d'échange d'informations, un travail d'intelligence important, dans le but de gagner cette guerre dans ses deux parties que ce soit la dimension technique ou humaine, a-t-il expliqué, estimant qu'il est indispensable actuellement d'avoir une vision d'ensemble et que chacun remplisse son rôle face à ce fléau. Face au phénomène du terrorisme, "il n'y a qu'une seule équation, soit on gagne ensemble ou on va perdre individuellement, étant donc sûr que l'objectif de chaque pays est de ne pas être victime du terrorisme, a poursuivi M. Benhammou. Ce forum dont les travaux se poursuivront jusqu'au 22 courant, a pour objectif de stimuler une meilleure compréhension, analyses et débats autour de thématiques telles "la stratégie d'internationalisation du terrorisme", "l'Afrique: sanctuaire et nouveau champ de bataille pour Al Qaida", "AQMI, activités et objectifs stratégiques?", "du GSPC à AQMI: la transformation d'un groupe terroriste algérien en branche d'Al Qaida", "AQMI, activités et objectifs stratégiques: du Djihad au narco- terrorisme" et "la lutte contre le terrorisme et la criminalité organisée au Sahel". L'accent sera mis également sur "les complicités locales et les alliés d'AQMI dans la région" et "Quelle stratégie de lutte contre le terrorisme et la criminalité". A l'ordre du jour de ce conclave, dont les travaux se poursuivront jusqu'au 22 janvier courant, figurent l'examen d'autres thèmes en rapport avec "la fragilité des gouvernances et instabilité chronique des Etats: les raisons géopolitiques de l'incursion d'Al Qaida en profondeur", "nécessité de redéfinir la nature des menaces et des risques sécuritaires contre la stabilité et le développement du Continent", "AQMI: un groupe local pour quels objectifs stratégiques au plan mondial", "les foyers de tension récurrente: base pour AQMI de renforcer sa présence dans la région" et "passivité, complicité et appui de certains groupes et bandes criminelles, à l'AQMI".