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Un décret gouvernemental instaure sournoisement le GMT+1 comme heure légale au Maroc Quand l'Exécutif outrepasse ses prérogatives et s'acharne contre les attentes des citoyens
Alors que l'Union Européenne est sur le point d'annuler l'heure dite d'été qui consiste en le rajout de 60 minutes pendant six mois, et au moment où les citoyens marocains réclament vivement et massivement de s'en tenir à l'heure GMT pendant toute l'année, le gouvernement El Othmani a tout bonnement décidé, 48 heures avant le retour à l'heure légale et de manière surprenante, d'aller à contre sens de la revendication populaire. Lors d'un Conseil de gouvernement décidé jeudi en fin de journée et tenu vendredi matin dans la précipitation, l'Exécutif a en effet adopté un projet de décret stipulant le maintien permanent de l'heure d'été en vigueur actuellement. Ce décret décide l'ajout de 60 minutes à l'heure légale du Royaume fixée par l'article premier du décret royal n° 455.67 promulgué le 2 juin 1967, de manière à maintenir l'heure d'été en vigueur actuellement "afin d'éviter les changements opérés à maintes reprises durant l'année et leurs répercussions à plusieurs niveaux". Cette décision appelle plusieurs remarques. La première est d'ordre constitutionnel : par le caractère "permanent" de la mesure qu'il instaure, le décret suppose l'adoption de fait par le Maroc de l'heure GMT+1 en lieu et place de l'heure Greenwich (GMT). Or, la consécration par le Maroc, en 1967, de l'heure Greenwich s'était faite en vertu du décret royal précité qui, tout en précisant que l'heure légale dans le pays est celle de Greenwich, soulignait l'obligation d'y revenir en cas de rajout occasionnel de 60 minutes pendant une période déterminée de l'année. Comme le décret adopté vendredi par l'Exécutif passe outre cette obligation, nous nous retrouvons face à un décret gouvernemental qui, en pratique, abroge un décret royal. Est-ce concevable ? Se faisant, l'Exécutif n'a-t-il pas outrepassé ses prérogatives ? La deuxième remarque est d'ordre humain : manifestement, le gouvernement, champion dans l'improvisation, n'a pas pris en compte les contraintes et les difficultés qu'une telle mesure va engendrer pour les citoyens pendant l'hiver où le jour est trop court et la nuit trop longue. Qu'a-t-on prévu pour les petits écoliers, dans les campagnes comme dans les villes, qui vont devoir se rendre à leur classe dans le noir et le froid, à pieds pour la majorité écrasante, avec tout ce que cela suppose comme risques et désagréments ? A-t-on pensé aux travailleurs et travailleuses tenus se rendre sur les chantiers à la première heure et les risques d'agression qu'ils encourent à la faveur de l'obscurité, surtout pour les femmes ? Oui, les agressions sont devenues courantes dans notre pays, particulièrement dans les banlieues, dans les quartiers populaires et dans la campagne et ce paramètre ne devrait en aucun cas échapper à un décideur averti. Au delà, quid de l'impact négatif du rajout d'une heure sur la santé des êtres humains, prouvé scientifiquement ? Le gouvernement affirme vouloir "éviter les changements opérés à maintes reprises durant l'année et leurs répercussions à plusieurs niveaux". Soit. Mais cela suppose que même pendant le mois de Ramadan, les citoyens auront droit à ces 60 minutes de trop, sinon l'argument gouvernemental n'aurait aucun sens. La question qui se pose à présent est de savoir à quoi joue le gouvernement qui agit constamment contre les vœux et souhaits des populations. Sa manière arrogante, entêtée, parfois écervelée par laquelle il se comporte à l'égard des intérêts des citoyens est, en tout cas, le signe d'un échec politique criard et sûrement consommé. Jamal HAJJAM