L'Histoire Un grand public, un grand stade, mais enfin, depuis 1956, un grand club. La ville de Tanger a attendu plus d'un demi siècle, pour siéger sur un « trône » en écartant les éternels adversaires, les solides rivaux qui avaient l'habitude d'être aux commandes du football marocain. La riche Histoire de la Nationale I, de la première division, de la classe de l'élite, du GNI, et tout dernièrement de la Botola I, de l'amateurisme, du semi-professionnalisme, et enfin du professionnalisme vers la transformation des équipes en sociétés, a voulu que les FAR, le RCA, le WAC soient les pionniers du championnat et que le MCO, le KACM soient les « patrons » de la coupe avant de donner un peu de place à l'extrême Nord, à l'entrée de l'Europe. Hier, c'était le MAT de Abdelmalek Abroune qui était « intronisé » deux fois, aujourd'hui, c'est le tour de l'IRT de Abdelhamid Aberchane de « ressusciter » pour remporter un titre mérité et inattendu. Inattendu parce que l'ex sélectionneur national Badou Zaki, recruté à coup de millions de dirhams, avait brouillé tous les papiers au début de la saison, en laissant une formation « moribonde » au fond du classement, se débattant pour échapper à la relégation avant de céder le banc de touche à son adjoint Driss Mrabet, le bel enfant de la pépinière tangéroise comme footballeur. Trois titres pour l'axe Tanger-Tétouan, qui avait un passé glorieux en football, avant l'indépendance, avec deux bons stades gazonnés le Marshane (disparu malheureusement avec la complicité de la mairie !) et le Saniat Rmel où évoluaient des formations professionnelles la Union Deportiva de España en deuxième division et l'Atlético de Tetuan en première division de la liga. Incroyable mais vrai, derrière les trois titres, il y a un même homme qui travaille à l'ombre, une personnalité de choix, un dirigeant de football de classe : le Wali Mohamed Yaâcoubi. Deux titres avec le MAT, quand il était Wali de Tétouan, et un titre avec l'IRT, au moment où il est Wali de Tanger. Tout le monde se souvient de cette mauvaise étape au cours de laquelle l'IRT s'apprêtait à quitter la Botola II pour descendre à la catégorie des amateurs. Réunion urgente au siège de la Wilaya où Mohamed Yaâcoubi devait convoquer tous les anciens présidents Arbaine, Bouhriz, Khomsi, Lakhssassi... On constitua un comité de sauvetage sous la présidence du président du conseil provincial Tanger-Asilah Abdelhamid Aberchane qui n'avait qu'un seul objectif : sauver ce qui peut être sauvé en maintenant l'équipe en deuxième division. Mission accomplie. La saison suivante : l'IRT accéda chez les grands pour faire une brillante saison avec une qualification pour une coupe africaine et une autre moyenne avec le maintien à la Botola I. Abdelhamid Aberchane prolongea son mandat de quatre ans expiré pour donner plus de stabilité au club. La cinquième saison, c'est le titre pour une nouvelle aventure africaine de champion's league. Le match de Safi Les 40.000 spectateurs « jouaient » deux rencontres capitales : une à Tanger entre l'IRT et le MAT. Les oreilles collées aux portables ou à l'aide des écouteurs, on suivait ce qui se passait à la capitale de la sardine. On faisait des calculs et on voulait trancher « l'affaire » avant la dernière journée où le Chabab d'Al-Hoceima, un autre voisin de la Région, attendait avec impatience la visite des Tangérois pour échapper à la relégation. L'IRT n'avait qu'un seul rival au titre, le WAC de Casablanca. Une victoire des hommes du détroit et un nul des poulains de Benzerti s'avéraient suffisants pour donner le titre à la capitale d'été du royaume. Alors, ce qui était attendu, arriva : le WAC était incapable de battre les Safiots qui étaient pourtant en faiblesse numérique. Le but de l'Olympic par Edjomariegwe donnait la joie au complexe de Tanger. Le 1-0 c'était la lueur d'espoir pour les Tangérois qui avaient en face une farouche résistance du MAT qui n'avait aucune défaite avec l'entraineur Abdelouahid Benhsaine. Pire encore, les Tétouanais menaient à la marque et on voyait s'évaporer le rêve de remporter le titre. Le but égalisateur du WAC d'El Haddad fut une douche froide dans tout le stade avec une domination des Casablancais qui provoquait plus de peur que de mal. A vrai dire, le coach safiot Benhachem doit réclamer une prime spéciale au comité de l'IRT car il fait partie de tous ceux qui ont contribué à l'obtention du titre 2017-2018, d'abord par la montée de l'équipe à la Botola I, puis par le nul de ses joueurs qui, comme de grands professionnels, n'ont pas baissé les bras devant un adversaire qui paraissait supérieur. Un grand bravo à Benhachem qui a su faire traire les mauvaises langues qui parlaient d'un éventuel arrangement. Le grand derby du Nord Comme l'ont déclaré les entraineurs Benhassain et Mrabet, le derby du Nord a convaincu par la qualité de son spectacle. Il ne s'agit pas non seulement de la bonne image du football nordiste mais du football marocain et les multiples chaines de télévision retransmettaient la rencontre dans le monde entier. Dans la tribune de presse, des collègues espagnols parlaient du grand progrès du championnat national. Dans la soirée, « El Mundo Deportivo », quotidien sportif catalan, titrait à la une : « El IRT campeon de Marruecos por primera vez ». Dans la matinée, As et Marca de la capitale madrilène en faisaient de même. Le 2-1 est une victoire méritée de l'IRT qui avait plus de motivation devant un public enthousiaste qui était encourageant durant les quatre vingt dix minutes de jeu. Le moindre faux pas n'était toléré parce que le titre de champion du Maroc était en jeu. Bien qu'avec beaucoup de mérite, les Tangérois n'avaient pas la tâche facile. Ils ont peiné, sué et lutté pour vaincre. L'adversaire était fort et ses joueurs avaient une bonne occupation du terrain. Avec une défense bien organisée, dirigée comme toujours par le maestro le Sénégalais Mortada Fall, le portier Yousfi était intraitable surtout dans les balles aériennes. Commandant bien le milieu du terrain, les Tétouanais étaient plus à l'aise que les Tangérois qui paraissaient perdus surtout en attaque. Rien ne réussissait et les Neghmi, Hamoudane et Chentouf semblaient perdus et isolés. Les demis et les arrières se plaisaient à évoluer en retrait en cédant le plus souvent le ballon au goal Ouattah. Chaque formation eut sa mi-temps. Les visiteurs étaient meilleurs dans le premier half, les locaux étaient supérieurs dans le second. La pression constituait un handicap pour le capitaine Oussama Gharib et ses coéquipiers : celle du public, du comité, des ultras, des journalistes. Tout le monde était mobilisé pour faire de Tanger une ville championne pour la première fois dans son Histoire. Personne ne parlait de spectacle, mais des trois points en jeu quelle que soit la manière mais bien sûr avec le respect des règles du football car l'arbitre Adil Zourag de la Ligue du Gharb, le mal aimé de l'IRT, était là pour donner une véritable leçon du bon arbitrage. Il était partout et ne laissait rien passer. Pas de cartons, très peu d'avertissements verbaux devant une correction exemplaire des footballeurs de vrais professionnels. Pendant la première demi-heure, un seul tir du jeune Chentouf, qui prenait aux toutes dernière minutes la place du Brésilien Almeida et le marquage individuel était à l'ordre du jour. Tout le travail défensif était centré sur Hamoudane, l'arme à double tranchant de l'équipe locale. Benhssaine donnait ses directives pour que ses poulains l'annulent complètement. A la 27ème minute, il y avait la seule action dangereuse tétouanaise de la mi-temps. Coup franc bien tiré par Zouhair Naim et Mortada Fall surgissait pour ouvrir le score d'un joli coup de tête. Le 0-1 découragea les locaux qui commettaient de nombreuses maladresses qui étaient sur le point de leur coûter un peu cher. La deuxième mi-temps était différente. Piqués au vif dans leur amour propre, les Tangérois avaient la honte et l'humiliation d'une éventuelle défaite, et la révision des « papiers », sur tous les plans, leur donnait une transformation totale sans pourtant aucun changement de joueurs. L'ambition et la motivation y étaient, ce qui permettait à Chentouf, la révélation du match d'égaliser après une passe magistrale de Hamoudane. On jouait la 47ème minute et tout était permis parce qu'il restait beaucoup de temps. Douze minutes plus tard, Oussaynou profita d'un cafouillage pour marquer le deuxième but. Délire dans les tribunes et il y avait des gens qui pleuraient. L'IRT était dans tous les cœurs. Fin des rencontres de Tanger et de Safi. Envahissement du terrain pour féliciter les footballeurs. Driss Mrabet était sur les épaules des supporters à la manière d'un toréador espagnol. Les femmes poussaient des youyous. Les klaxons retentissaient dans toute la ville. La circulation était bloquée. Tout le monde était obligé de rester aux alentours du stade jusqu'à une heure tardive de la nuit. Les incidents de fin du match Encore une fois, le problème du hooliganisme est signalé. Il est bien dommage de constater plusieurs incidents dramatiques à la tribune des supporters tétouanais. Fous par la colère, les ultras du MAT ont causé des dégâts matériels couteux au complexe: sièges arrachés, vitres cassées, grillage détruit. Dispersés par le service d'ordre, ils ont pu lancer des pierres pour blesser une dizaine de policiers et agents de forces auxiliaires. L'on se demande quel est le tort de ces fidèles serviteurs qui veillent à la protection des citoyens et de leurs biens. Pourtant, des milliers de Tétouanais étaient empêcher d'entrer à la ville par la gendarmerie par mesure de sécurité. RACHID MADANI