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Entretien avec M. Pierre Jochem, D.G. du mythique Palace la Mamounia à Marrakech « Les travaux de rénovation n'ont nullement entaché l'ADN de l'établissement, lequel se devait de vivre avec son temps »
Pierre Jochem a rejoint La Mamounia en tant que Directeur Général en septembre 2013. Grâce à son expérience internationale, Pierre Jochem, un leader naturel, excellent gestionnaire et toujours orienté sur une Hôtellerie de luxe a participé au rayonnement des grands établissements au sein de prestigieux groupes hôteliers. Il commence sa carrière en tant que Directeur de la Restauration à Londres, Bangkok puis Hong-Kong et ce toujours dans des établissements prestigieux. Après un passage à New York, il arrive à New Delhi où il prend la direction du mythique palace l'Impérial dont il dirigea d'une main de maître la rénovation, l'ouverture et le repositionnement au niveau palace 5 étoiles pendant 7 ans. Avant de rejoindre La Mamounia, il a été pendant 5 années Directeur Général de l'hôtel Raffles à Singapour et Vice- Président pour les Opérations Asie Pacifique pour le groupe. Grâce à ses grandes qualités humaines, d'homme de réflexion et de terrain, il fait aujourd'hui partie du cercle très fermé des dirigeants d'hôtels les plus respectés et salués à travers le monde. Ce n'est donc pas étonnant si l'ensemble du personnel de l'hôtel, cadres, techniciens et subalternes confondus, lui vouent un respect à l'essence parentale. C'est d'ailleurs sous sa direction que La Mamounia obtient en Septembre 2015 le Prix Condé Nast Traveller Readers' Choice du Meilleur Hôtel au Monde. L'Opinion : Marrakech a connu ces dernières années l'arrivée de plusieurs palaces de luxe devant normalement rivaliser de notoriété avec la Mamounia. Qu'est-ce qui fait que celle-ci demeure une institution de l'hôtellerie en constante évolution avec son temps ? Pierre Jochem : L'hôtel va avoir 95 ans. Il est vrai que la maison fait partie du patrimoine marocain. Un hôtel emblématique, qui est idéalement placé, en plein cœur de la ville, à 10 minutes de l'aéroport international. L'hôtel est une oasis: la structure hôtelière représente 4 ha et les jardins et la propriété s'étendent sur 13 ha. La Mamounia reste une institution car elle est le symbole de l'art de recevoir à la marocaine et du luxe de son artisanat. Elle est incontournable aussi de par l'excellence et la constance qui restent des valeurs qui me sont chères. La Mamounia est aussi en perpétuelle recherche de nouveaux horizons et je pense que c'est cette évolution constante qui est nécessaire à la survie de ce type d'établissement. L'Opinion : Pourtant certains opérateurs avisés n'hésitent pas à dire qu'il a perdu de son identité après les derniers travaux de rénovation ? Pierre Jochem : On ne peut pas plaire à tout le monde. La rénovation de La Mamounia était nécessaire. L' ADN de l'hôtel est resté intact mais un hôtel doit vivre avec son temps. L'Opinion : Que pouvez-vous nous dire sur l'état des lieux avant et après votre nomination à la tête de sa direction ? Pierre Jochem : Je suis arrivé avec 4 grands objectifs. Un: le premier avant tout, augmenter le chiffre d'affaires. La Mamounia a fermé en 2006 pour rénovation et a rouvert en 2009, ayant investi énormément d'argent. Il fallait augmenter le chiffre d'affaires. Deux: Suite à cette période de fermeture, nous étions un peu en froid avec certains de nos partenaires, avec des fournisseurs locaux, internationaux, et il fallait reprendre les contacts. L'hôtel avait une réputation de petit musée fermé, auquel personne n'avait accès. Cela s'appliquait aussi à nos amis Marocains, donc il fallait absolument changer cette image. Trois: C'est un palace, donc continuer à le maintenir comme palace et continuer à le faire gravir vers d'autres sommets comme un palace. Cela veut dire: définir une valeur ajoutée, composer une équipe renouvelée et toujours continuer à se remettre en question et continuer à réinvestir. Dans un contexte économique timide, nous avons quand même réinvesti près dans de 30 Millions de DHS dans le produits. Le quatrième: est lié à mon premier objectif et consiste donc à regarder de plus près tout ce qui est dépenses. Revoir notre système de procédures. L'idée est de gérer un palace et donc faire du luxe, mais faire du luxe en faisant un peu plus d'argent. L'Opinion : Quels sont les trophées de prestige qu'il a remportés ? Pierre Jochem : La distinction la plus prestigieuse que nous ayons obtenu depuis mon arrivée est le Prix du Meilleur Hôtel au monde par le Conde Nast Traveller UK en 2015. C'est une belle consécration pour La Mamounia qui confirme sa place parmi les plus grands palaces de ce monde. Notre Spa reçoit également depuis 2010 et tous les ans le Prix du meilleur Spa d'Afrique par l'American Spa Finder. L'Opinion : D'après –vous qui distingue la Mamounia des autres établissements qui arborent le même standing ? Pierre Jochem : Ce qui distingue La Mamounia de tous les autres hôtels c'est son emplacement, son histoire, sa réputation et son âme. Tout cela disons que ce sont des atouts « innés » Et puis il y a « l'acquis », sa vision, son positionnement, sa relation avec ses clients... L'Opinion : On vous aperçoit rarement dans les grands salons internationaux du tourisme qui nous sont traditionnels, disposez-vous d'un système de commercialisation particulier ? Pierre Jochem : Il est vrai que nous ne participons qu'à très peu de salons. En stratégie commerciale nous privilégions les relations bilatérales avec nos partenaires. Nous voyageons beaucoup à la rencontre des professionnels du voyage desquels nous essayons de faire des ambassadeurs de La Mamounia. En 2017, nous sommes allés entre autres, en Chine, au Brésil, au Chili, en Belgique, au Luxembourg sans oublier nos marchés traditionnels comme La France, Le Royaume Uni ou L'Allemagne. Aussi la clientèle nationale étant notre 5ème marché, nous rencontrons beaucoup les partenaires locaux. L'Opinion : Quels sont les principaux salons de promotion que vous aviez prospectés cette saison ? Pierre Jochem : Nous faisons deux salons tous les ans l' ILTM à Cannes et le Virtuoso Travel Market à Las Vegas. Le Salon Pure Life Experience a lieu à Marrakech tous les ans et nous en sommes partenaires. L'Opinion : Qu'elle est la principale clientèle de votre hôtel et qu'elle est celle qui est en nette progression ? Pierre Jochem : La première clientèle est Française suivie du marché américain et britannique. En vérité tous nos marchés sont en progression. Nous avons connu une année 2017 exceptionnelle. Les progressions les plus nettes sont celles des marchés d'Amérique Latine (Brésil, Mexique, ..) et aussi le marché du Moyen-Orient qui se développe clairement. L'Opinion : Vous êtes libellé clé verte, quels en sont les arguments ? Pierre Jochem : Cette distinction vient récompenser de nombreux efforts de longue haleine visant à une gestion plus éco- responsable des ressources de notre établissement. Une enveloppe de près de 4 Millions de MAD a été allouée aux transformations nécessaires : installation de panneaux solaires thermiques, remplacement de plus de 14 960 luminaires par des lampes LED,...autant de changements qui ont permis de réduire l'empreinte carbone de La Mamounia de plus de 175 tonnes par an. L'Opinion : En tant que grand routier de l'hôtellerie, quels- sont les atouts de Marrakech ? Pierre Jochem : L'aérien va mieux mais constitue à nos yeux encore un handicap à la destination. Les atouts de Marrakech sont nombreux avec le côté culturel qui se développe avec par exemple l'ouverture du musée Yves Saint Laurent et beaucoup d'autres projets. Cela fait aussi de Marrakech une destination plus haut de gamme... Marrakech revient à la mode en tant que destination « VIP » mais ce qui n'empêche pas un autre type de touristes de continuer à visiter la ville. Et c'est une très bonne chose. Nous voyageons toute l'année pour promouvoir La Mamounia. Mais vous savez on ne peut pat parler de La Mamounia sans parler de Marrakech, sans parler du Maroc et de citer ses atouts... L'Opinion : Le tourisme national bénéficie t-il d'une part du marché dans votre établissement ? Pierre Jochem : Tout à fait. La clientèle nationale est en progression et représente la 5ème place de notre mix de clients. L'Opinion : Dernièrement l'hôtel entier avait enregistré une location exclusive, peut-on avoir une idée sur le coût ? Pierre Jochem : Je ne peux malheureusement dévoiler aucun chiffre. L'Opinion : Quel a été le taux de remplissage la saison écoulée et à quel taux vous vous attendez cette année ? Pierre Jochem : Le premier semestre 2017 a été exceptionnel avec un taux d'occupation cumulé de 48% et nous comptons finir l'année avec un taux de remplissage qui dépasse les 55%. Cette année a été une belle année et nous voyons déjà se dessiner un beau premier trimestre 2018. Pourvu que cela dure. L'Opinion : La Mamounia dispose de 3 villas, connaissent-elle le même engouement de la part des clients ? Pierre Jochem : Absolument. A la réouverture de La Mamounia, nous pensions que ces Riads seraient uniquement dédiés à des célébrités en quête de discrétion mais le taux de remplissage de nos Riads est aussi élevé que nos grandes suites et ce grâce à des familles qui veulent bénéficier de l'esprit « maison » dans le Palace. L'Opinion : Parlez-nous de l'arrivée du célèbre pâtissier Pierre Hermé ? Pierre Jochem : Ce projet est né d'une rencontre avec Pierre Hermé il y a quelques années. Du fait de notre relation amicale, nous nous sommes dits qu'il serait bon pour nous deux maisons de faire un projet commun. Et aujourd'hui cela prend forme concrètement avec la première boutique Pierre Hermé en Afrique et une carte crée pour tous nos points de vente. L'Opinion : Et les programmes culturel et artistique dans tout ça ? Pierre Jochem : Nous sommes ravis de contribuer à notre échelle au rayonnement culturel et artistique de la ville. Nous organisons deux expositions par an et le choix des artistes est toujours mené avec minutie et en totale harmonie avec notre vision de l'art. En général nous aimons mettre avant les talents marocains ou qui ont un lien direct avec le Maroc. Et cela plait beaucoup. Toutes les expositions que nous organisons à La Mamounia sont gratuites et nous contribuons ainsi à ouvrir l'art au grand public. Aussi en février 2018, nous recevons la première foire d'Art Contemporain Africain qui sera un très grand évènement culturel de la ville. Propos recueillis Mohamed JHIOUI