Sept ministres, ceux de l'Intérieur, de l'Agriculture et de la Pêche maritime, de l'Education nationale, de la Culture et de la Communication, de l'Equipement et du Transport, de l'eau et de la Santé, ainsi que le directeur de l'ONEE et des secrétaires généraux d'autres département ministériels composaient la délégation de haut niveau qui s'est rendue, sur hautes instructions de SM le Roi, lundi 22 mai, dans la province d'Al Hoceïma qui vit depuis six mois, au rythme de manifestations à caractère socioéconomique, enclenchées suite à la mort, dans des conditions tragiques, du poissonnier Mohcine Fikri. Le déplacement de la délégation ministérielle avait pour objet de communiquer avec les représentants des populations et les membres de la société civile, ainsi que donner un coup d'accélérateur aux projets inscrits dans le programme de développement spatial «Al-Hoceima, Manarat Al Moutawassit», qui couvre la période 2015-2019. 9,9 milliards de dirhams ont été consacrés au financement de projets achevés, en cours de réalisation ou qui restent à entamer dans la province d'Al Hoceïma, 6,5 milliards dans la cadre du programme «Al-Hoceima, Manarat Al Moutawassit», dont les travaux de mise en œuvre ont été lancés par SM le Roi en 2015, et 3,4 milliards à travers le programme de réduction des disparités territoriales. Les ministres présents ont reconnu qu'un certain retard était bel et bien enregistré dans l'état d'avancement desdits travaux, raison pour laquelle ils sont allés par eux-mêmes constater ce qui en reportait le bon déroulement et stimuler leur progression. Présents en force dans une salle du siège de la province d'Al Hoceïma, les représentants de la société civile et quelques membres du mouvement de contestation «Al Hirak» n'ont pas manqué de souligner le caractère strictement socioéconomique des manifestations récurrentes qui ont marqué la vie de la ville d'Al Hoceïma ces derniers mois, insistant en particulier, pour l'écrasante majorité d'entre eux, sur les attentes des populations en matière de santé, d'enseignement et de création d'emplois. Avec un nombre importants de personnes atteintes de cancer dans la province d'Al Hoceïma, séquelles du bombardement aux gaz toxiques de combat lors de la répression espagnole de la résistance contre l'occupant, l'une des revendications des manifestants, exprimées par les élus locaux et les représentants de la société civile devant les ministres présents, porte ainsi sur la création d'un hôpital d'oncologie dans la province, pour éviter aux malades et leur accompagnateurs les charges et peines d'avoir à parcourir 500 kilomètres pour se rendre à l'hôpital d'oncologie de Rabat. A ce propos, le ministre de la santé a expliqué que si les équipements destinés à cet établissement de santé spécialisé programmé à Al Hoceïma, auquel une enveloppe de 44 millions de dirhams a été consacrée, ont déjà été acquis, pour 15 millions de dirhams, il reste encore à doter les locaux où ces matériels seront installés des protections antiradiations nécessaires, en raison de la dangerosité des rayonnements qu'ils émettent. C'est le même problème de déplacement hors de la province qui motive la revendication de la création d'un pôle universitaire à Al Hoceïma, les bacheliers de la région voulant poursuivre des études universitaires étant obligés de s'inscrire soit à l'Université Mohammed 1er d'Oujda, éloignée de 260 kilomètres, ou l'Université Abdelmalek Saadi, à Tanger ou Tétouan, à plus de 200 kilomètres. Le ministre de l'éducation national s'est dit prêt à l'édifier dès qu'un terrain pour ce faire aura été trouvé, ce qui semble avoir été résolu au cours même de cette réunion entre les ministres, les élus locaux et les représentants de la société civile, un lot de 8 hectares ayant été proposé pour ce faire. D'autre part, 500 postes d'enseignants sont réservés aux diplômés chômeurs de la province, dans le cadre du renforcement de l'effectif du corps enseignant. La séance de questions-réponses entre les ministres, les élus locaux et les représentants de la société civile, qui ont interpellé les hauts responsables quelques fois avec véhémence, semble avoir eu un effet catharsis sur ces derniers, qui avaient beaucoup à dire et escomptaient bien être écoutés, tout en rejetant radicalement les accusations de séparatisme dont ils ont fait l'objet. Quelques éléments jusqu'au-boutistes semblent, toutefois, vouloir hausser la barre des revendications jusqu'à exiger un traitement plus sévère des responsables dans l'affaire Mohcine Fikri et une réouverture de l'enquête sur la mort de cinq personnes dans l'incendie d'une agence bancaire à Al Hoceïma, lors des évènements de 20 février 2011. Ils dénoncent dans la foulée une «militarisation» de leur province qui n'est pas constatable sur le terrain, si ce n'est un déploiement important des forces de l'ordre, somme toute logique en pareille situation. Si les meneurs du «Hirak» paraissent jouir d'un certain soutien de la part de la population, la radicalisation de leur position pourrait aboutir à une aggravation de la tension dans cette province où l'expression de revendications socioéconomiques légitimes se mêle à des prises de position autrement plus extrêmes. Ahmed NAJI ------------------------------ Anas, la mise à niveau du quartier Tighanimine et la chaise roulante Il s'appèle Anas, il prépare son baccalauréat cette année et compte bien poursuivre des études universitaires, avec une assurance en soi qui reflète une inébranlable volonté de réussir. Handicapé, il parcourt chaque jour les quelques 3 kilomètres qui séparent les domiciles de ses parents à Tighanimine, un quartier périphérique d'Al Hoceïma, et le lycée Badis où il est inscrit. Faute de bus et de moyens pécuniaires pour prendre un taxi, «mon père est pauvre» souffre-t-il la tête baissée, il lui faut une heure et demie pour parcourir cette distance à l'aide de béquilles. «J'ai juste besoin d'une chaise roulante» précise Anas, debout sur ses béquilles au bord de la route, observant les travaux en cours dans son quartier. Le projet d'aménagement de cette route pénétrante d'Al Hoceïma par Taza, qui consiste à la border de trottoirs, d'enrober le corps de chaussée, d'y planter des arbres, de la doter d'un éclairage public, ainsi que d'un système d'évacuation des eaux de pluies, pour un coût global de 28 millions de dirhams, sera achevé dans deux mois promettent des responsables chargés de sa mise en œuvre. Les conditions seront alors favorables pour qu'Anas puisse y déambuler en chaise roulante, s'il parvient à s'en procurer une. A. N.