La Loi 36-15() sur l'eau expose, notamment, le rôle du "Système d'Information sur l'Eau" et le fonctionnement relationnel entre les acteurs. Pour mémoire, la lecture des articles 129 et 130 de ladite Loi, souligne que l'Agence de Bassin Hydraulique (ABH) doit mettre en place un système d'information sur l'eau au niveau du bassin versant où s'exerce son Autorité et que l'Administration centrale serait en charge de l'intégration de ces différents systèmes régionaux pour l'établissement d'un système d'information sur l'eau à l'échelle nationale. Pour tenir compte de la priorité vitale que constitue la protection de la ressource en eau et de l'impérieuse nécessité de mobiliser les efforts de toute la société marocaine, il est inscrit, à cet égard, « que toute administration est tenue à transmettre d'une manière périodique toutes données et documents en relation avec les ressources en eau ». Ainsi, la Loi impose aux services de l'Etat le partage et la mise à disposition des données et informations utiles pour tous les acteurs, cités comme « Parties » aux contrats de nappe et pour le grand public. L'objectif consiste à obtenir une mobilisation générale aux fins de relever les défis d'une gestion intégrée et concertée des ressources en eau, au niveau du bassin versant d'abord et, finalement engager une stratégie rationnelle au plan national. « L'incohérence de l'incohérence » (Abú al-Walìd ibn Ruchd, 1126-1198) Surexploitation de la nappe, intrusions marines, utilisation des réserves stratégiques ? Autant de mauvaises pratiques qui, outre une incohérence manifeste, montrent une désinvolture coupable, conduisent à s'emparer d'un milliard de mètres cubes d'eaux souterraines (!) privant de facto les générations futures du bien le plus précieux. Il s'agirait de compenser l'avènement des sécheresses, le déficit des pluies, d'assurer les besoins en eau d'irrigation agricole dans un contexte d'accroissement démographique, de développement socio-économique et de la nécessité de soutenir la sécurité alimentaire, oui mais. Oui mais, les autorités en charge de la « gouvernance » de l'eau ne peuvent méconnaître les conséquences de l'accélération sur la pérennité des sources, en particulier souterraines dont le volume renouvelable peut être estimé à 3,4 milliards de m3 alors que le volume exploité est de 4,3 milliards de m3. C'est, de facto, un déficit annuel de près d'un milliard de m3 qui est constaté (!). En l'état actuel, la possibilité d'une restauration de l'état initial n'est pas concevable et les mesures pour contenir ce phénomène de gabegie incohérente et en limiter les impacts négatifs constituent un arsenal technique, financier, réglementaire et institutionnel, intéressant, certes incontournable mais imparfait et il ne nous paraît pas que la création d'un quelconque « Centre de Recherche sur l'Eau » apporte quelque solution. Voyons le plan technique. Le recours aux eaux dites non conventionnelles telles le dessalement de l'eau de mer, ou les eaux usées épurées constitueraient une « ressource miracle » mais quid du prix de revient et quid du phénomène de l'évaporation qui, sous nos cieux, est surement l'un des fléaux parmi les plus redoutables. L'évapotranspiration a été, de longue date, bien identifiée et modélisée (ex. Penman, 1956). Nos anciens en avaient déjà perçu les méfaits et avaient conçu un type d'ouvrage hydraulique, écologique et social : la « khettara ». Cette technique produit de l'intelligence rurale, conduit l'eau d'irrigation dans des « seguia », sorte de canal d'irrigation à ciel ouvert, que l'on rencontre quelquefois dans les oasis. Le coefficient d'évaporation qui varie de 0, 40 à 0, 80 sur le sol marocain, en fonction de la saison, de la latitude et de la climatologie des régions concernées, ces systèmes efficaces mais rudimentaires induisent d'importantes pertes d'eau par évaporation. Les seguias principales sont généralement construites en terre mais les ramifications secondaires peuvent être de simples rigoles en métal voire creusées à même la terre (ce qui implique, dans ce dernier cas, une perte d'eau supplémentaire par infiltration). Economie réelle de la ressource en eau La solution qui est portée par le Groupement associatif FP4S présent dans la zone verte, pavillon de la société civile de la COP 22 et publiquement soutenue par le journal l'OPINION n'a pas rencontré l'audience de l'autorité ministérielle, chargée de l'eau, restée dans la zone bleue des « officiels », pas plus qu'elle n'a obtenue de réponse à ses correspondances ou à ses visites... ayant pour objet le partage de l'information. La technique d'irrigation localisée souterraine, efficace, économique et pérenne a, notamment, la propriété d'éliminer totalement le phénomène d'évaporation, soit pour le non-initié une économie de 40 à 80 litres d'eau pour chaque dose de 100 litres délivrée au pied de la spéculation, soit des milliards de mètres cubes pour l'ensemble du Royaume. L'évaporation se retrouve également à la surface de bassins d'accumulation des exploitations agricoles qui subissent la disparition de « l'or bleu » à raison de 20 litres par mètre carré de surface, par jour. Ce phénomène qui se reproduit à l'échelle des retenues des barrages entraîne l'évaporation de plusieurs milliards de litres d'eau dans les mêmes conditions. La solution qui comporte trois fonctionnalités peut être mise en œuvre, outre l'irrigation proprement dite, pour procéder, avec succès, à la recharge artificielle des nappes grâce au captage des lâchers eaux de barrages avant l'évaporation. Ce « soutien » à la nappe peut également résulter de la récupération des pluies torrentielles ou des inondations telles que le pays en connaît actuellement et qui seront désormais le lot qui accompagne le changement climatique. Ces informations qui viennent au soutien de l'intérêt général majeur de la Nation marocaine ont été portées à la connaissance de toutes les administrations appelées à en connaître, en particulier les ministères chargés de l'eau et de l'agriculture. Il n'est pas neutre de s'interroger quant à l'application de l'article 130 de la nouvelle Loi sur l'Eau qui prescrit « que toute administration est tenue à transmettre d'une manière périodique toutes données et documents en relation avec les ressources en eau (bis repetita) » Nous nous plaisons à signaler l'esprit éclairé et précurseur de M. Mahboub, Abderrahmane, Directeur de l'Agence de Bassin Hydraulique du Guis-Ziz-Rheris-Maider (ABH-GZR) à Er-rachidia et de ses collaborateurs qui intègrent cette solution et ses fonctionnalités dans les projets et « partagent l'information » relative à l'économie et à la protection de la ressource avec les acteurs et la population. Des objectifs ou des résultats ? Dans le même ordre d'idée, nous saluons l'initiative de M. Younès Ouaacha, exploitant d'une ferme phoénicicole dans la région de Zagora qui a accompagné et soutenu, de son savoir-faire pendant 21 mois, l'expérimentation in situ d'une installation modèle de la technique d'irrigation localisée souterraine par « diffuseur enterré » qui a permis d'obtenir les résultats suivants : Economie de l'eau : 380 litres d'irrigation par arbre et par mois, au lieu de 1 300 litres par le réseau du goutte à goutte, soit une économie de 920 litres par mois et par arbre. Irrigation anticipée : Constitution d'une réserve d'humectation du sol profond permettant d'affronter une éventuelle « poche de sécheresse » de 14 mois, sans risque pour la spéculation bénéficiant du « diffuseur enterré ». Production : Les palmiers de la variété Mehjoul, plantés en 2012 (4 ans) ont produit 35 kg de fruits en 2015 et 60 kg (!) lors de la dernière récolte, en 2016. () Publiée au Bulletin officiel (N° 6494, page 67-94)