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La « Biosécurité », un impératif d'intelligence économique Entre destruction ici et élevage agricole aux Iles Canaries, au Pérou :La cochenille du cactus peut s'avérer une fortune
Par Dr M. Et-tobi Quand il s'agit d'êtres vivants, végétaux ou animaux, qui en vertu de leurs comportements commencent à inquiéter les humains, eux-mêmes des êtres vivants, peut-être plus faibles et plus anxieux, l'écologie, science de la vie peut contribuer à comprendre les problèmes en jeux ! C'est à ce titre, et quoique incomplet et n'ayant pas encore intégré le niveau holistique, le concept de biosécurité ou sécurité biologique (également nommée Biosafety en anglais), concerne : « toutes les mesures de confinement, les technologies et les pratiques mises en œuvre pour assurer la protection du personnel et de l'environnement contre le danger biologique des agents biologiques et des toxines [un glossaire abrégé de biosécurité figure en encarté pour éclairage aux intéressé(e)s)]. En dépit de ces questions de philosophie, on est en droit de se rappeler encore l'affaire du virus des feuilles jaune en cuillère (Virose TYLCV pour Tomato Yellow Leaf Curl Virus) transmis exclusivement par l'espèce de mouche blanche (Bemisia tabaci), et ayant causé des dégâts pendant au moins deux années successives en détruisant les campagnes de culture de tomate dans le sud ; et qui a été probablement introduit en 1998 à partir d'Almeria (Espagne) à travers des plantules infestées. Les dégâts au Maroc étaient tels que de nombreux producteurs des régions de Moulouya, El Jadida et Souss ont abandonné leurs cultures en 1999 et 2000, puis entamé l'arrachage de culture de tomate en cours sur plusieurs centaines d'hectares aussi bien sous serre qu'en plein champ. Aujourd'hui, nous voilà face à une pullulation historique jamais vécu de la cochenille du cactus, qui nous vient probablement en provenance de nos Canaries, au moment où les projets, programmes et investissements public et privés pour le développement de la filière marocaine de cactus a commencé à « porter fruit » ! Fort présente aujourd'hui à Sidi Bennour, Rhamna et Youssoufia, la cochenille prolifère, et risque de finir par tuer le figuier de barbarie au Maroc. Pas loin de nos provinces du sud, la cochenille introduite aux Canaries vers 1820, a fait et continue de faire l'objet d'élevage économique pour la production d'extrait de cochenille et de carmine servant de matière première à la fabrication de colorants naturels dit « cramoisi ». Durant quelques années, en raison de la concurrence de la production et des prix des principaux grands producteurs, les élevages espagnols avaient été quelque peu délaissés, mais la cochenille s'est maintenue sur les cactus canariens, livrée à elle-même. Récemment, une association encadrée par un biologiste a repris les élevages en main pour la relance de la production de cochenille. La reprise est favorisée le renouveau de popularité du « colorant de cochenille » en raison des craintes mondiales pour la santé soulevées au sujet des nombreux additifs alimentaires et cosmétiques artificiels, dits azoïques. Cette demande accrue a rendu la culture de l'insecte rentable à nouveau, avec le Pérou comme pays plus grand exportateur. En 2005, la production péruvienne de teinture de cochenille était de 200 tonnes, celles des Canaries était de 20 tonnes, vendus entre 50 et 80 USD le kilogramme ! Histoire : Cochenilles et parasites comme armes de destruction du cactus L'utilisation de la cochenille comme insecte parasite pour la destruction des espèces de cactus est bien documentée, et l'on cite par exemple vers 1897, l'usage d'une espèce de cochenille pour détruire deux espèces de cactus introduites (par les colons) qui proliféraient de manière invasive en Inde. Le texte qui relate ce fait est extrait d'un dossier d'Auguste Chevalier datant de 1947. Des fragments d'extraits de ce dossier sont reproduits dans l'encarté ci-dessus. Récits sur la destruction historiques de cactus utilisant la cochenille (Extrait de Chevalier, 1947) « Il y'a une cinquantaine d'années (cela revient à 1897), l'Inde connut une grande invasion de Opuntia monacantha et Opuntia dillenii. Une espèce de Cochenille fut alors introduite et détruisit en peu de temps presque tous les plants de O. monacantha. Plus tard, on eut à redouter le pullulement de Opuntia nigricans. C'est une autre espèce de Cochenille qui parvint à l'éliminer ». « Vers 1908, Opuntia dillenii était regardée dans l'Inde comme une plante plutôt utile. Cette plante, nommée en Indoustani Naga-dali ou Naga-phana avait envahi le pays depuis le Bengale et Madras jusqu'au Penjab. Plus tard, Opuntia nigricans à fleurs rouges devint un véritable fléau pour le Penjab ». « En Australie, plusieurs espèces de cactus Opuntia ont constituées à certains moments de véritables pestes. On cite O. monacantha, O. nigricans, O. vulgaris, O. pusilla, O. imbricata. Dans certaines régions, on s'en est débarrassé par l'introduction de Cochenilles ou en laissant se développer certaines maladies. Pour la destruction, on a eu recours à des champignons, à des insectes et surtout à des cochenilles. A cette destruction, les services d'Agriculture d'Australie ont consacré autrefois une partie de leur activité ». « Le cancer du cactus a été signalé dans le sud de l'Italie en 1901. Il est causé probablement par une Bactérie. La plante pourrit et meurt entièrement et la maladie semble se propager assez vite. La gangrène blanche (White rot) serait répandue dans l'Amérique du Sud ; les feuilles attaquées se couvrent de larges taches blanches, composées de filaments cotonneux ; ce n'est autre que le champignon parasite Sclerotinia cactorum. Les dégâts sont assez considérables quand on ne procède pas à la destruction immédiate des plantes atteintes ». « Un autre champignon, le Phyllosticta opuntiae s'attaque aux joints. Il manifeste sa présence par des taches circulaires jaunâtres qui s'agrandissent peu à peu, finissent par se rejoindre et déterminent en même temps une couleur blanchâtre des raquettes. Non seulement celles dont les joints sont attaqués tombent, mais l'ensemble de la plante subit un arrêt qui est en rapport avec la disparition des chloroplaste. C'est aussi en Italie qu'on a constaté une flétrissure causée par un Phoma. » « En Amérique, on a signalé un mildiou causé par Phytophthora cactorum, et une rouille causée par Aecidium opuntiae. On pourrait peut-être détruire les peuplements d'Opuntias nuisibles par la propagation de ces maladies. Toutefois depuis une trentaine d'année, c'est à l'introduction de Cochenilles, la plupart spécifiques pour chaque espèce d'Opuntia, que l'on a eu recours ». Voilà ce que rapporte Chevalier dans un dossier sur les cactus datant de 1947 (Chevalier Auguste. Dossier sur les Cactus Opuntias. Espèces fruitières et fourragères. Espèces nuisibles. Revue internationale de botanique appliquée et d'agriculture tropicale, 27ème année, bulletin n°301-302, Novembre-décembre 1947). Progrès et importance de la filière cactus au Maroc (en bref) Le figuier de Barbarie est un arbre originaire des régions arides et semi-aride du Mexique d'où il a été introduit en Afrique du Nord vers le 16ème siècle. Il est utilisé comme plante ornementale, pour la production de fourrage et surtout pour la production de fruits exotiques qui sont commercialisés à travers le monde. De plus, sur le plan physiologique, le figuier de Barbarie est une plante du type CAM (Crassulacean Acid Metabolism). Naturellement doté de ce dispositif de carboxylation, elle a la particularité de fixer le CO2 pendant la nuit et de fermer ses stomates pendant le jour. Une telle stratégie permet d'éviter les pertes en eau par évapotranspiration qui peuvent avoir lieu le jour et d'optimiser ainsi l'utilisation d'eau. C'est pourquoi, le figuier de Barbarie est l'exemple typique d'espèce parfaitement convenable pour la mise en valeur des zones arides et semi-arides. Sa culture est peu exigeante en investissements et le revenu qu'elle peut générer est important. En plus, sur le plan environnemental elle est d'une grande utilité pour la lutte contre l'érosion et permet de corriger, à long terme, la fertilité des sols. Au Maroc, la culture du figuier de Barbarie se trouve parfaitement intégrée dans le système d'exploitation traditionnel au Maroc. Il y constitue même le pilier de l'économie familiale, et dans plusieurs douars du sud, la céréaliculture a été délaissée au profit du figuier de Barbarie. La culture du figuier de Barbarie est actuellement pratiquée de façon intensive et moderne. En plus de la production fourragère, la production de fruits reste l'aspect le plus recherché et le plus développé avec essentiellement trois principaux cultivars économiques : Achfri, Moussa et Aissa. Le Maroc compte entre 120 000 et 150 000 hectares réservés à la culture du figuier de barbarie, dont près de la moitié est développée dans le Souss. Autrefois nourriture du pauvre, la figue de barbarie est de plus en plus appréciée, à la fois, pour ses qualité nutritives et ses vertus «exceptionnelles et miraculeuses» en matière cosmétique, médicinale et pharmaceutique. La filière cactus est inscrite au 2ème axe du « Plan Maroc Vert » pour un investissement total échelonné de 81 millions de dirhams ciblant 27 000 agriculteurs. La filière cactus a ainsi permis la création d'une dizaine de coopératives qui tentent de développer des produits à base de ce fruit, dont notamment l'huile de figue de Barbarie réputée pour ses vertus pharmaceutiques et cosmétiques. Des unités de conditionnement et de valorisation ont ainsi été mises en place. Dans ce cadre, citons la création d'une unité d'extraction de l'huile de cactus à Sidi Ifni, programmée à la suite d'un protocole d'accord entre le Maroc et le japon signé en octobre 2014 à Rabat. La capacité de l'unité peut atteindre 5 000 litres par an à l'horizon 2016. Le projet dans la région Ait Baamrane - Sidi Ifni, soit 40 000 ha produisant annuellement 230 000 tonnes de cactus valorisés par l'extraction d'huile, vient compléter la chaine de valeur de la filière cactus. Il faut pratiquement une (01) tonne de figues de Barbarie pour extraire 30 kilos de graines, destinés à produire un (01) litre d'huile vendue entre 8.000 et 10.000 DH. Ce GIE (Groupement d'intérêt économique) devait permettre à plus de 1.200 agriculteurs de cette contrée d'améliorer leurs revenus, en développant cette culture dont le rendement devrait passer de 8 à 10t/ha. Ce projet est mené dans le cadre d'un partenariat public-privé avec l'entreprise japonaise « J.C.B Japon » venue investir au Maroc. Au titre du protocole maroco-nippon, l'Agence japonaise de coopération internationale (JICA) accompagnera les investisseurs japonais et apportera l'assistance technique requise pour l'installation et le fonctionnement de l'usine. De son côté, « J.C.B Japon » s'engage à contribuer au renforcement des capacités des femmes rurales de la région concernée, la mise en place et l'équipement nécessaire au fonctionnement de l'unité, et à fournir l'assistance technique nécessaire aux agriculteurs. L'entreprise japonaise est en contact direct avec des coopératives gérées par des femmes marocaines du monde rural. En détruisant fruits, et raquettes, la cochenille représente au Maroc un réel défi de biosécurité menaçant pour la filière cactus après de grands efforts consentis à son développement. Propagation de la cochenille de cactus au Maroc & Plan de lutte Selon les informations diffusées par des médias nationaux, le cactus est attaqué par la cochenille parasite du cactus dans les principales régions de production de ce fruit. Ce parasite particulièrement ravageur a fait son apparition depuis septembre 2014 au niveau de la commune rurale de Saniet Berguig dans la Province de Sidi Bennour. Les investigations entreprises à l'époque sur les lieux par les autorités concernées avaient révélé un petit insecte du groupe des cochenilles spécifique au cactus. Les premières mesures préconisées (arracher et enfouir les raquettes infestées) se sont révélées inefficaces puisque le parasite du cactus est, à nouveau apparu au niveau des communes rurales de Saniat Berguig, Mtal, Ouled Amrane, Bouhmame, Beni Hlal et Lmachrek. Depuis quelques jours, l'épidémie est en train de se propager depuis la région des Doukkala (le 1er foyer d'infestation s'étant déclaré dans la Province de Sidi Bennour) et s'étend progressivement vers d'autres régions, et continue d'occasionner d'énormes pertes dans le cactus. Sur le plan géographique, le parasite ravageur est apparu récemment dans les provinces de Sidi Bennour, Rhamna et El Youssoufia. L'activité du parasite empêche le fruit (figue de barbarie) de mûrir dans de bonnes conditions. L'ampleur des dommages à grande échelle réside dans la propagation dans d'autres zones ou dans l'échec de lutte. La cochenille pourrait provoquer la mort de la plante et détruire cultures et récoltes. Face à cette propagation devenue inquiétante, un Plan d'action d'urgence destiné à arrêter la prolifération du parasite vient d'être établi le 20 juillet 2016, a été établi en 3 étapes : Le 1er axe concerne la destruction par arrachage et incinération des plantations infestées. Le 2ème axe consiste au traitement chimique des plantes visant à détruire le parasite sur 2 000 hectares. Le 3ème axe se traduit par la publication d'un arrêté interministériel détaillant l'application des mesures phytosanitaires au niveau national pour limiter la propagation de l'insecte. Ce plan implique par ailleurs plusieurs organismes publics (Voir état de mise en œuvre à l'encarté ci-après). Les produits de traitement sont choisis par l'ONSSA sur la base d'essais expérimentaux pour s'assurer de leur innocuité et de leur efficacité. De son côté, l'Institut national de la recherche agronomique (INRA) entame un programme de recherches pour définir des alternatives de lutte biologique, mais aussi identifier les variétés de cactus résistantes à ce parasite. Mise en œuvre du plan d'urgence contre la cochenille du Cactus Le lancement du plan d'urgence (20 juin 2016) s'inscrit dans le cadre de la mobilisation des instances de veille relevant du Département de l'Agriculture, que sont l'INRA, l'ONSSA, l'ADA, et l'ONCA. Les actions de lutte contre la cochenille du cactus qui menace la culture du figuier de barbarie dans trois localités du Maroc se poursuivent. Au 28 juillet 2016, ce sont près de 13,3 kilomètres de cactus (linéaire) qui ont été arrachés (début mi-avril) au niveau de la province de Sidi Bennour, la plus concernée de toutes les zones infectées, où le cactus est l'une des plus importantes filières de production agricole de la région. Le foyer infesté dans la province s'étend sur une superficie estimée à 300 hectares (DRA Casablanca-Settat), et le plan d'action local porte sur l'extraction, l'incinération et l'enfouissement des plantations fortement infestées. En parallèle, et en l'absence de produits homologués sur le cactus, l'action engagée concerne des essais et des tests d'efficacité de divers traitement par insecticides. Plus d'un demi-kilomètre de cactus (6 580 mètres) a été traité, accompagné de la distribution de 1 000 pulvérisateurs aux producteurs pour traiter les foyers inaccessibles aux tracteurs, et d'un litre de produit servant à traiter jusqu'à 6 hectares de cactus. La généralisation du traitement, l'incinération des cactus infestés, et la plantation sur un périmètre de 1 hectare infesté d'une dizaine de variétés résistantes pour évaluer leur impact sur la propagation de la cochenille constituent les trois niveaux d'intervention programmés. Glossaire abrégé lié à la biosécurité Biorisque ou Risque biologique : C'est un concept dont la définition originelle est : « risque associé au matériel biologique et/ou aux agents infectieux ». Mais, l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) a récemment élargi sa signification, et le définit comme « la somme de la probabilité d'apparition d'un danger et de la sévérité de ce danger si sa source est un agent biologique ou une toxine ». L'origine du danger peut résulter de l'exposition non intentionnelle, de la perte ou de la libération accidentelle, du vol, du mésusage, de l'accès non autorisé à l'agent pathogène ou encore de sa libération intentionnelle non autorisée. Mésusage de matériel biologique : utilisation inappropriée ou illégitime de matériel biologique en dépit d'agréments, de traités et de conventions existants, signés et ratifiés. Biodéfense : C'est l'ensemble des mesures défensives développées sur la base de la science, de la technologie et de la réglementation afin d'assurer la protection contre des infections causées par des armes biologiques (bioterrorisme) et des infections émergentes. Danger : capacité intrinsèque d'une substance, d'un agent pathogène, d'un équipement, d'une méthode de travail, à causer un dommage ou un évènement indésirable. S'il n'y a pas de risque sans danger, il peut, par contre, exister des dangers sans risque. Danger Biologique (Biohazard en Anglais) : danger résultant de la capacité pour tout organisme ou substance dérivée d'un organisme de déclencher une pathologie, de perturber le fonctionnement physiologique des êtres vivants (effet pathogène ou toxique) ou de perturber l'équilibre biologique de l'environnement par leur potentiel de pénétration (dissémination). Haut Fonctionnaire de Défense et de Sécurité ou HFDS : haut fonctionnaire nommé par décret du Premier ministre et dont les attributions dans la défense et la sécurité sont fixées dans le « Code de la Défense ». Chaque Ministère dispose d'au moins un HFDS. Fonctionnaire de Sécurité de Défense ou FSD : représentant fonctionnel du HFDS du Ministère de tutelle et ayant en charge la mise en œuvre des orientations et dispositions relevant de la responsabilité du HFDS. Sa fonction de protection concerne les intérêts fondamentaux pour la nation, la sécurité de l'information, la défense et la sécurité publique. Le FSD appartient à la direction générale de l'établissement dans lequel il est nommé. N.B : La notion de Sûreté Biologique n'inclut pas tous les autres aspects de la sûreté biologique au sens des mesures nationales ou régionales prises pour empêcher la dissémination d'espèces non endémiques ou pathogènes. On ignore pourquoi ? Dans les régions qui dépendant de la production de cochenille, les contrôles des organismes nuisibles doit être pris au sérieux comme dans la législation du Chili. Elevage et Biosécurité stricte pour la Cochenille au Chili Au Chili, comme dans d'autres pays d'Amérique du Sud, ces insectes sont élevés et reproduits sur les tiges ou cladodes de figue de Barbarie (Opuntia spp.), puisque les femelles sont la source de l'acide carminique, une matière première pour la production de carmin, un colorant rouge utilisé par l'industrie alimentaire, textile et pharmaceutique. La production de cochenille au Chili est réalisée de manière technique, avec irrigation et gestion de la fertilisation des plantations de cactus, de sorte que le rendement et la qualité de la cochenille chilienne sont parmi les meilleures dans le monde. Au Chili, quoique pays producteur, la cochenille introduite en 1989 depuis le Pérou, a été mise sous contrôle officiel en 2000 à travers la résolution n°1954/SAG qui ne permet la production de carmin de cochenille au nord de la rivière Choapa que dans des conditions de biosécurité strictes. Cet insecte est également désigné sous contrôle officiel de la Résolution n°792/2007, considérant la cochenille faisant partie de la liste des organismes de quarantaine pour le Chili. ORIGINE & BIOLOGIE DE LA COCHENILLE DU CACTUS Insecte indigène hémiptère de la famille des Coccoidea, la cochenille Dactylopius coccus est originaire de l'Amérique du Sud tropicale et sub-tropicale, du Mexique et des pays andins comme l'Equateur, le Pérou et la Bolivie (Synonymes : Coccus cacti (Linnaeus, 1758), et Pseudococcus cacti (Burmeister, 1839). Elle a été introduite avec les cactus : en Espagne, aux Îles Canaries, à Alger, En inde, en Australie, Madagascar etc. Signalons toute de même une autre cochenille originaire de la Méditerranée (Kermes vermilio) qui était connue en Europe au Moyen Âge. En tout, il existe 200 espèces connues de cactus Opuntia et les cochenilles Dactylopius vivent dans quasiment toutes ces espèces avec une préférence pour l'espèce Opuntia ficus-indica. Les cochenilles sont des insectes au corps mou et à l'écaille plate et ovale qui se regroupent autour des cactus, en particulier les Opuntia. La femelle, qui mesure environ 5 mm de long y fait une colonie. Elle est sessile (se fixe sur un substrat comme la raquette) et ne bouge pas lorsqu'elle se nourrit (humidité et nutriments du cactus) : elle a un rostre (appareil buccal suçoire) qui pénètre dans la plante et qui lui permet d'en consommer la sève. L'insecte produit de l'acide carminique qui le protège des insectes prédateurs. Les femelles n'ont pas d'ailes et mesurent environ 5 mm de long. Celles-ci sont regroupées en d'importantes populations cireuses qui donnent l'apparence cotonneuse sur les tissus végétaux. Les mâles adultes peuvent être distingués des femelles par leur petite taille. Ils ont des ailes et vivent juste assez longtemps pour fertiliser les ovules des femelles. Lorsque la femelle se nourrit de la sève, le cactus hôte subit des dégâts et peut parfois mourir. Les jeunes mâles se nourrissent sur le cactus pendant une période plus courte et ne se nourrissent plus du tout devenus adultes. Colonie de femelles de cochenille Après l'accouplement, les femelles fécondées augmentent en taille et donnent naissance à de petites nymphes. En biologie, la nymphe représente le stade du développement intermédiaire entre la larve et l'imago lors des mues de métamorphose des insectes holométaboles. Les insectes holométaboles ont un cycle de vie complexe, ils passent de l'état de larve à celui de nymphe, puis d'adulte. La morphologie, la physiologie et le mode de vie des larves diffèrent fortement de ceux des adultes. Les larves sont aptérygotes (sans ailes). Elles ne font que grandir sans changer de forme jusqu'au stade pré imaginal. Elles vont alors s'isoler au sein d'une chrysalide afin d'y effectuer leur métamorphose vers l'état adulte ou imago. Le stade nymphal commence donc par la mue d'une larve en nymphe (mue nymphale ou nymphose) et se termine par la mue de la nymphe en imago (mue imaginale ou mue adulte). Une des caractéristiques de la nymphe est qu'elle ne se nourrit pas (ses pièces buccales et son tube digestif subissent aussi une métamorphose importante) et vit sur ses réserves. Mécanisme de propagation des colonies de cochenilles C'est dans la première étape de nymphe (appelée crawnler) que se disperse la cochenille. Les individus de cette étape sont déplacés vers un lieu d'alimentation, le plus souvent sur le bord des cladodes (raquettes) de cactus, où ils commencent à produire de longs filaments de cire. Ces filaments cireux leur permettent une plus grande dérive du vent (le vent qui se prend dans les fils de cire les emporte vers un autre hôte), réalisant ainsi plus facilement le transfert à un nouvel hôte. Ce sont ces individus qui établissent des sites d'alimentation dans le nouvel hôte et produisent une nouvelle génération de cochenilles. Les nymphes mâles devenus adultes se nourrissent sur le cactus jusqu'à ce qu'ils atteignent la maturité sexuelle. A maturité, ils ne se nourrissent plus ; ils fertilisent les femelles et meurent. Par conséquent, ils sont rarement observés ! Les nymphes sécrètent cette substance blanche cireuse hydrophobe sur leurs corps afin de se protéger de la pluie ainsi que des excès de chaleur et des prédateurs. Du fait de cette substance, les cochenilles apparaissent blanches ou grises de l'extérieur, alors que leur corps produit un pigment rouge (pigment à base d'Acide carminique) qui rend l'intérieur de l'insecte violet foncé (Schiebinger, 2004 : Plants and Empire: Colonial Bioprospecting in the Atlantic World. Cambridge, Mass.: Harvard University Press. p. 44.). Ennemis naturels et bio-contrôle de la cochenille Plusieurs ennemis naturels peuvent réduire les populations de cochenille sur les cactus hôtes. De tous ces prédateurs, les insectes paraissent être les principaux. Des insectes et leurs larves tels que les Pyralidae (ordre des Lepidoptera, dont de nombreux papillons) détruisent le cactus laissant les cochenilles sans nourriture. Les cochenilles ont également des prédateurs tels que : Des coccinelles (coléoptères), qu'on appelle aussi « bête à bon Dieu » ! Des diptères tels que les syrphidés et les Chamaemyiidae Des névroptères Des fourmis (hyménoptères) Des térébrants (hyménoptères parasitoïdes) Beaucoup d'oiseaux, de reptiles et de rongeurs commensaux des humains (en particulier les rats) sont des prédateurs des populations de cochenilles. Les coccinelles figurent parmi les insectes utilisés par l'homme comme méthode biologique de lutte contre les parasites. Beaucoup d'espèces se nourrissent en effet de pucerons et de cochenilles et sont donc utilisées comme « insecticide naturel ». La bête à bon Dieu (car elle est la meilleure amie des jardiniers) est en effet un prédateur redoutable. C'est une méthode bio pour éradiquer naturellement cet insecte, parasite des cactus. La coccinelle, petit insecte à l'air inoffensif, est une vraie tueuse de pucerons et peut en dévorer plus d'une centaine par jour. On peut citer à ce titre, l'expérience réalisée par lâchers dans la municipalité d'Alfortville de pas moins de 10 000 larves de coccinelles (Adalia bipunctata) disséminées le long des quais de la Seine pour décontaminer les rosiers infestés. La commune d'Alfortville est exemplaire dans son action en faveur du développement durable. Selon « Le Parisien » du 21 juillet 2009, en France, par rapport à la moyenne nationale, cette Commune utilise moins de 25% de produits chimiques et de désherbants en comparaison avec d'autres collectivités. Et l'utilisation du savon noir ? En jardinage bio, l'un des traitements des plus écologiques est de pulvériser du savon noir dilué à 5 %. En effet le savon noir étant alcalin, celui-ci agit comme un excellent répulsif sans pour autant endommager la plante. Le savon doit être sans colorant, parfum et sans ingrédient synthétique. Le savon noir est un produit liquide composé de molécules amphiphiles obtenues par réaction chimique entre une base forte, spécifiquement l'hydroxyde de potassium, et un corps gras. Des essais et tests de savon noir, largement disponible, pourraient faire partie du Plan d'urgence ! HISTOIRES SUR LE MONOPOLE ECONOMIQUE DE COCHENILLE Le chroniqueur de la Nouvelle Espagne du 16ème siècle, Gonzalo Gomez de Cervantes a consacré plusieurs sections à la cochenille, et un ouvrage récent en retrace l'histoire, le monopole économique et les intrigues. Ecrite par son auteur féminin Amy Butler Greenfiel (1er juin, 2005), l'œuvre « A Perfect Red: Empire, Espionage, and the Quest for the Color of Desire » ; soit « Un rouge parfait : Empire, espionnage, et quête de la couleur du désir », restitue l'histoire de la culture de l'un des produits commercialisés les plus précieux du monde jusqu'à la fin du 19ème siècle, en l'occurrence le colorant espagnol dit « Spanish Red » extrait de l'insecte dit la cochenille, ses mystères, empires, et l'aventure à la poursuite de la couleur la plus souhaitable sur la terre. En voici, quelques passages traduits ! Greenfiel raconte que, prisé par les anciens mexicains, le cochenille (extrait et colorant) a été vendu dans les grands marchés aztèques, où il a attiré l'attention des conquistadors espagnols en 1519. Expédié en Europe, le colorant a créé la sensation, la production rouge la plus brillante, la plus forte du monde jamais vue. Le nouveau monopole de la cochenille de l'Espagne valait une fortune. Désespéré par leurs propres sources de colorant, les anglais, les français, les néerlandais, et d'autres Européens ont essayé d'élucider l'énigme de la cochenille. Est-il venu d'un ver, une baie, une graine ? Pourrait-il être volé du Mexique et transplanté dans leurs propres colonies ? Pirates, explorateurs, alchimistes, scientifiques et espions, tous ont rejoint la chasse à la cochenille, une poursuite qui a duré pendant plus de trois siècles ! Mais en dépit de nombreuses tentatives faites par les rivaux de l'Espagne (l'Angleterre et la France), il fût prouvé très difficile à transplanter et à répliquer dans des fermes expérimentales à l'extérieur de la Nouvelle-Espagne. Ainsi, contrairement à d'autres produits agricoles précieux, tels que le caoutchouc brésilien, vers à soie chinois ou l'indigo indien, le cochenille était sécurisé de la concurrence mondiale et a continué à entretenir le monopole espagnol lucratif pour deux cent cinquante ans. Amérindien Collectant des cochenilles avec un pinceau en « queue de cerf » par José Antonio de Alzate y Ramírez (1777) Les espions français ont tenté d'introduire la cochenille en direct en Haïti, tandis que les anglais ont fait une tentative similaire pour la création de plantations à cochenille en Inde, mais les cochenilles ne pouvaient survivre à la transplantation par voie maritime qu'à la suite de l'indépendance du Mexique et les tentatives réussies par les Espagnols pour élever les cochenilles dans les îles Canaries (traduit de Greenfield A. B.,2005: A Perfect Red: Empire, espionage and the quest for the color of desire. Harper Collins, New York, 2006 edition edn). Traditionnellement, la cochenille (extrait et carmine) a été utilisée pour la coloration des tissus. Durant la période coloniale, avec l'introduction de moutons en Amérique latine, l'utilisation de cochenille s'est accrue car il fournit la couleur la plus intense, et s'est imposé plus fermement sur les vêtements en laine que sur des vêtements faits de matériaux d'origine pré-hispanique comme le coton, les fibres de feuilles d'agave ou fibres de yucca. Un autre insecte, la cochenille méditerranéenne (Kermes vermilio) parasite du chêne kermès auquel il a donné son nom, était au Moyen âge récoltée pour servir de colorant (le kermès des teinturiers) dans la draperie, notamment en Languedoc. La production de ces tissus écarlates était la grande spécialité de la ville de Montpellier, qui a un temps détenu le monopole de la production en France. Ce tissu rouge vif était très réputé et avait une grande valeur. À la fin du XIVème siècle, cette production décline. Après la découverte de l'Amérique, on découvre la cochenille Dactylopius coccus, qui était très appréciée des Aztèques, et on commence à l'importer en Europe. Une fois que le marché européen avait découvert les qualités de ce produit, la demande a augmenté de façon spectaculaire (Ford, Gopal, Grant, Gaunt, Evans & Butler, 1987 : Chronic toxicity / carcinogenicity study of carmine of cochineal in the rat. Food and Chemical Toxicity). Le carmine est devenu fort concurrent pour les autres colorants tels que la racine de garance, kermès, cochenille polonais, Pernambouc et Tyrian pourpre, du fait de son utilisation pour la teinture des vêtements des rois, des nobles et du clergé (Francis & Watson, 2002 : Colorants. Food Chemical Safety). Il a également été utilisé pour la peinture, l'artisanat et des tapisseries. Aujourd'hui, la laine et le coton colorés à la cochenille sont encore des matériaux importants pour l'art populaire mexicain et l'artisanat pour lesquels cette couleur peut fournir le coloriage de la laine pour le tissage de tapis. Après l'invention de pigments et de teintures synthétiques, telle l'alizarine (fin du XIXème siècle), la production de teintures naturelles a progressivement diminué. Cependant, des affaires récentes de crainte pour la santé humaine concernant les additifs alimentaires artificiels ont renouvelé la popularité des teintures de cochenille, et la demande accrue a rendu l'élevage de l'insecte à nouveau rentable, avec le Pérou comme pays plus grand exportateur. TECHNIQUES D'ELEVAGE DE LA COCHENILLE A CARMINE Aspects biologiques favorables à l'élevage de cochenille Les cochenilles se reproduisent généralement selon un mode asexué ou par voie sexuée après fécondation. Les œufs sont déposés sous le bouclier maternel dans le cas des Diaspidae, sous le corps même de la mère qui se distend fortement jouant le rôle de bouclier protecteur chez les Coccidae ; ou dans des amas floconneux dits « ovisacs » ou « sacs ovigères » secrétés par la mère. Dans le cas des Diaspidae, la fixation de ces larves a lieu dans les 48 heures qui suivent l'éclosion ; elles s'immobilisent, perdent leurs pattes, leurs antennes et commencent l'édification de leur bouclier. Chez les Coccidae, tous les stades sont mobiles et seules sont fixées les femelles adultes. Les jeunes larves de taille réduite sont mobiles et dotées d'une très grande activité, leur extrême légèreté assure leur dispersion par le vent sur de très grandes distances. Méthodes de conduite d'élevage L'acide carminique est extrait du corps et des œufs de la cochenille pour en faire une coûteuse teinture colorée rouge, le cramoisi. Le carmin de cochenille doit son nom à l'insecte ; il est en premier lieu utilisé comme colorant alimentaire ou pour des produits cosmétiques (rouge à lèvre, pourpre,...), dans la pharmacie (sirop,...), et en histologie. Une ferme de cactus pour la production de cochenille est traditionnellement connue comme « nopalry ». Il y a deux méthodes d'élevage, la traditionnelle et la contrôlée. La méthode traditionnelle implique la plantation de raquettes déjà contaminées ou bien l'infection de cactus déjà existants par la cochenille suivi de la récolte manuelle ultérieure. La méthode contrôlée consiste en le placement de petits paniers appelés « nids zapotèques » sur des cactus. La méthode aurait été utilisée traditionnellement pour l'élevage des cochenilles. Les paniers contiennent les femelles fertiles propres qui laissent les nids et se déposent sur le cactus pour attendre la fécondation par les mâles. « Nids zapotèques » sur un cactus-hôte Opuntia indicamil. Elevage de cochenille sur raquette Dans les deux cas, les cochenilles doivent être protégées contre la prédation, le froid et la pluie. Le cycle complet dure 3 mois, au cours de laquelle les cactus sont conservés à une température constante de 27°C. A la fin du cycle, les nouveaux cochenilles sont laissés à reproduire ou sont recueillis et séchés pour la production de colorant. Ensemble d'outils utilisés pour la récolte de cochenille appelé « Milana ». 30 kg de cochenille sont nécessaires pour obtenir 1 kg de colorant. Préparation de la teinture de cochenille & utilisation Une teinture d'un pourpre profond est extraite des femelles cochenille. La femelle Dactylopius coccus est utilisée pour produire différentes teintes de rouges, d'orange et d'écarlate. Cette coloration provient de l'acide carminique. Les cochenilles ont une teneur en acides carminique naturel extrait de 19 à 22 %. Les insectes sont tués par immersion dans l'eau chaude (après quoi elles sont séchées) ou par l'exposition aux rayons du soleil, de vapeur ou la chaleur d'un four. Chaque méthode produit une couleur différente. Les insectes doivent être séchés à environ 30% de leur poids initial avant de pouvoir être stockés sans se désintégrer. Il faut environ 70 000 insectes pour produire une livre (environ 0,453 kg) de teinture de cochenille. Il existe deux formes principales de teinture de cochenille : l'extrait de cochenille est un colorant dont la base est l'état brut séché et pulvérisé du corps des insectes, le carmin qui est une coloration plus épurée. Pour préparer le carmin, le corps d'insectes en poudre sont bouillies dans de l'ammoniaque ou une solution de carbonate de sodium, l'insoluble est éliminée par filtrage, et de l'alun (minéral -sel double- présent naturellement dans diverses régions du monde, telles la Syrie et le Maroc, mais peut également être synthétisé, et dont le principal usage est de fixer les couleurs) est ajouté à la solution de sel de l'acide carminique clair pour précipiter le sel d'aluminium rouge. La pureté des couleurs est assurée par l'absence de fer. Du chlorure d'étain, de l'acide citrique, du borax, ou de la gélatine peuvent être ajoutés afin de réguler la formation du précipité. Pour les tons de pourpre, de la chaux est ajoutée à l'alun. Le colorant (E120) issu des cochenilles est utilisé par exemple dans la fabrication des saucisses de Francfort pour leur donner une couleur rosée ainsi que dans d'autres charcuteries, certains yaourts ou sodas comme l'Orangina rouge, le Coca-Cola, dans certaines productions de tarama (spécialité des cuisines grecque et turque, à base d'œufs de poissons, de lait, de jus de citron, d'huile et de mie de pain), dans les boudoirs « roses » ainsi que dans certains bonbons. Le carmin est aussi utilisé en histologie pour la coloration de préparations microscopiques. LES ILES CANARIES, LIEU D'ELEVAGE ECONOMIQUE DE COCHENILLE A CARMINE Cet insecte (ange pour les uns et démon pour les autres) qu'est la cochenille, provient du Mexique, et a déjà été utilisé dans ces terres en tant que producteur de colorant avant la « ilegada » des européens en Amérique. Les aztèques l'appelaient « nocheztli », un nom qui dans leur langue signifie « sang de nopal ». En 1820, Ildefonso Ruiz Del Rio, partenaire de la revue la Real Sociedad Economica De Cadiz, a offert à cette institution un panier de cochenille nopal que lui avait envoyé du Mexique un certain Pedro Jose Corujo. Après réalisation de plan d'élevage expérimental au bout de quelques années, il a été décidé d'étendre l'insecte à d'autres régions d'Espagne où le climat présenterait les meilleures conditions pour la reproduction et l'élevage, considérant comme le plus approprié les Iles Canaries. La cochenille arrive dès 1825 de Cadix aux Iles Canaries, concrètement à Tenirife, après avoir passé Gran Canaria, pour arriver à Lanzarate. La culture commence, de l'avis de certains auteurs, dans la ferme « El patio » de Tiagua au milieu du XIXème siècle aux villages de Mala et Guatiza. Dans l'archipel des Canaries, la cochenille est précieusement cultivée. Cet élevage, originaire du Mexique précolombien sert à la production de colorant. La majorité des ventes de cochenilles sert aux industries alimentaire et cosmétique ; une petite partie va aussi dans le textile. Un biologiste s'est spécialisé, à travers une association crée pour la relance de l'élevage de cet insecte sur l'île de Lanzarote. L'association œuvrant pour faire connaitre l'histoire de la cochenille sur l'île et la promotion de son élevage a son siège à Mala au nord-est de l'île. La cochenille est aussi élevé à La Palma, autrefois connue sous le nom espagnol de San Miguel de La Palma. L'objectif est d'apprendre d'abord aux artisans de l'île à s'en servir sur leurs produits (tisserands, tapissiers et autres), pour leur donner plus de valeur dès l'origine, et ensuite faire la promotion de ce colorant naturel à des artisans et des artistes de différents pays comme la France, l'Angleterre, la Turquie ou les Etats-Unis. Les plantations de cactus à cochenille sont en majorité dans la zone de Mala-Guatiza, où sont collectés chaque année 2 à 3 tonnes de cochenille sèche (avec un potentiel de 14 tonnes récoltées en 1980). Champ de cactus pour la culture de cochenille à Lanzarote (Iles Canaries) Les éleveurs de cochenille suivent un rituel pour « infecter » des figuiers de Barbarie très présents sur l'île, en saupoudrant sur eux des sachets remplis d'insectes femelles sur le point de pondre. Au bout de 60 à 70 jours, les insectes atteignent un niveau suffisant de maturité pour la récolte ou cueillette, en raclant chaque raquette avec un instrument dédié, une sorte de louche ou cuillère en métal dite milano. Ensuite vient le séchage des insectes qui dure 10 à 20 jours, pour être ensuite stockés dans des sacs. La cochenille sèche provient des restes de l'insecte, une fois qu'il a reposé à l'air (pour en obtenir 1 kilo, il faut 3 à 3,5 kilos d'insecte et œufs de cochenille). La cochenille sèche peut se conserver plusieurs années ainsi avant d'être utilisée comme un colorant naturel. En avril 2010, la coopérative d'agriculteurs de cochenilles de Mala-Guatiza a exporté 20 tonnes de cochenille sèche à une entreprise allemande de fabrication de rouge à lèvres au prix de 50 euros le kilo. L'importance de la culture des cochenilles pour l'Espagne et les Canaries, s'accompagne également du développement des plantes tinctoriales. Une plante tinctoriale est une plante dont certaines parties peuvent servir à préparer des colorants et des teintures. Celles-ci sont utilisées généralement pour teindre des fibres textiles naturelles (laine, coton, soie...) mais peuvent aussi servir comme colorants alimentaires ou corporels (maquillage ou peintures rituelles). VALEUR DU MARCHE MONDIAL DU CARMIN DE COCHENILLE Les îles Canaries, le Chili, l'Équateur, le Pérou et l'État plurinational de Bolivie sont les plus gros producteurs de carmin de cochenille. Entre 2000 et 2006, la production mondiale a été multipliée plus de 2,5 fois en raison de la demande du fait de l'intérêt croissant de l'industrie alimentaire pour les colorants naturels (pour des produits tels que les yaourts à la fraise de Campari et Danone, etc.). En 2006, la production nationale du Pérou a atteint 2 300 tonnes (85% de la production mondiale), avec une valeur à l'exportation de 39,6 millions de dollars EU. Les plus grands importateurs de carmin sont le Brésil, le Danemark, la France, l'Allemagne et les États-Unis. Au Pérou, les autres produits issus du carmin de cochenille comprennent : la laque carmin (12,9 millions de dollars EU), l'extrait de cochenille séché (3,65 millions de dollars EU) et, l'acide carminique (2,03 millions de dollars EU) . En plus de ses utilisations dans l'industrie alimentaire, la production de carmin de cochenille a procuré une multitude de bénéfices sociaux aux Péruviens, parmi lesquels les emplois ne sont pas les moindres (plus de 50 000 dans la récolte). De plus, cette production a été saluée pour ses bénéfices environnementaux, tels que la plantation de la plante hôte des cochenilles, le cactus Opuntia ficus-indica, qui protège les espaces ouverts contre l'érosion, régénère la fertilité des sols pour l'agriculture et capture une quantité significative de carbone atmosphérique. En guise de conclusion Après ce long récit, il semble que la présence de la cochenille sur le cactus marocain - peut être ou pas en provenance des Canaries- soit l'occasion de réflexions dans la perspective d'une éventuelle meilleure part dans le marché des matières premières d'origine naturelle (colorants, additifs alimentaires, cosmétiques et pharmaceutiques) en vue d'une triple production de figues et huile de cactus, de colorant de cochenille, et pourquoi pas de culture de plantes tinctoriales ? Peut-être, et moyennant des règles de biosécurité maitrisée, nous avons là l'opportunité de développement de nouvelles filières à apprivoiser pour le sud : l'élevage de cochenille et la culture de plantes tinctoriales qui viendraient s'ajouter et renforcer la filière du safran et du cactus !