Sous l'égide du Conseil préfectoral de Rabat, une exposition collective de peinture, exclusivement féminine, a été récemment organisée au Théâtre National Mohammed V "en reconnaissance au génie créatif de la femme marocaine", dira M. Saâd Benmbarek, Président du Conseil, dans son mot de présentation. L'exposition "entre dans le cadre de la promotion de la créativité artistique qui contribue directement et efficacement au rayonnement de Rabat, ville lumière et capitale marocaine de la culture". Trois femmes artistes-peintres : Mariam Ibn Mansour, Fatma Ajarrag Rais et Touria El Maroudi, toutes familières de l'atelier Karmadi, ont donné libre cours, à travers leurs toiles, à leurs sentiments et à leur perception du réel comme de l'imaginaire, portant ainsi sur le quotidien et ses détails un regard féminin tout en finesse. Leur talent et leur créativité ont charmé et ébloui les visiteurs sensibles à la délicatesse de leur travail artistique, sobre et sincère et à l'esprit et la verve de leur langage pictural, chacune dans son style propre. Mariam Ibn Mansour d'abord. Son œuvre dans l'art figuratif, privilégie l'authenticité du patrimoine et des traditions et dégage une consistance particulièrement captivante. En voilà une artiste qui a investi le monde des arts sans tapage, en douceur et sans prétentions, à son propre rythme sans jamais rien forcer, se laissant guider par ses sentiments, ses constats et ses convictions. Native de la ville de Tétouan, ville des beaux arts par excellence qui a vu naître des artistes de renommée internationale, Mariam Ibn Mansour était, pour ainsi dire, prédestinée à la peinture, environnement favorable aidant. Autodidacte, elle n'en demeure pas moins consciente de l'importance de la maîtrise des techniques picturales et n'hésite pas à suivre des cours pour se perfectionner et permettre au don de se confirmer et se consolider. Le rendu de son travail révèle bien une interdépendance intelligente et heureuse entre la pratique par le don et la maîtrise par l'apprentissage, entre l'inné et l'acquis. A travers ses toiles, Mariam Ibn Mansour parvient à conjuguer le passé au présent pour marquer une pause de réflexion sur l'évolution de la société, ses valeurs, ses succès et ses manquements. Par son langage pictural, elle pose l'énigme du beau et du sublime comme une interrogation perpétuelle. Fatma Ajarrag Rais dégage pour sa part une volonté d'exploration picturale évidente. Bien que la plupart de ses travaux soient abstraits ou semi-abstraits, cette artiste ne veut pas s'enfermer dans un style unique afin d'échapper à toute contrainte et garder une liberté de peindre où elle donne libre cours à son imagination et à ses sentiments. C'est par son enseignement académique du dessin et de la peinture orienté vers l'observation et la reproduction de motifs réels, qu'elle a pu développer son art. Aujourd'hui, ses toiles présentent une riche matérialité à base de sable, de colle, de pigments et autres matériaux dont elle a le secret. Touria El Maroudi boucle la boucle par une riche palette de toiles rendant hommage aux diverses influences marocaines qui rythment notre vécu quotidien et qui constituent le riche paysage de notre pays. L'œuvre de Touria El Maroudi nous convie à une sorte de voyage à travers le Maroc via deux champs : la poterie et le tissu. Au fait, l'artiste en fait une pierre deux coups puisque, dans la foulée, elle honore ses origines berbères à travers la représentation de motifs typiques et célèbre ainsi une marocanité hautement revendiquée. Toujours à la recherche de son propre style pictural, celui-ci balance entre abstrait et art figuratif et se laisse emporter au gré de l'humeur et de l'inspiration de l'artiste.