Exclusivement dévolue à son art et aux lieux qui l'inspirent, la peinture d'El Mansour distille un curieux mystère que suggère d'emblée le titre de ses expositions, œuvre d'une vie au fil de villes belles et troublantes : « Devant les murs », « Gnaoua de Marrakech », « L'Atlas au printemps », « Djemaa El Efna la nuit », « Jazz à minuit ». Hicham El Mansour est une énigme, redoublée de ténacité. Pur autodidacte, il n'appartient à aucune école des Beaux-Arts, loin d'être formaté, il suit son instinct, seule ligne susceptible de lui dicter une forme d'inclination pour son goût pictural. « Son art est inconsciemment exempt de la plupart des représentations esthétiques étouffantes inculquées auxquelles doit se soumettre un artiste qui s'engage à toujours peindre d'une façon particulière ou qui appartient à un “mouvement” défini ou à une “école” !Il se refuse obstinément à se soumettre à pareille absurdité et ne voit aucune raison apparente pour laquelle un artiste ne peindrait pas un paysage urbain naïf le matin, un paysage post-impressionniste l'après-midi et un tableau abstrait-expressionniste en nocturne », soulignent les critiques d'art Dr Terence Mac Carthy et Andrew Clandermont. Juste une expression « L'instinct, le nocturne, la chaleur »: voici les mots-clés qui entourent les toiles exposées tour à tour au musée de la Casbah de Tanger et au Centre culturel Ibn Khaldoun, toujours dans la mythique ville du détroit. Deux de ses tableaux vivants, chargés d'émotions figurent parmi la plus importante collection institutionnelle du Maroc, au musée de la Légation américaine de Tanger, cité carrefour de l'art, ainsi que dans la collection de l'archevêché catholique. Les matériaux et les formes, élevés au rang d'assemblages et de motifs riches et divers, ont bien souvent à voir avec « une palette fauviste et une fluidité de style qui simplifiait radicalement les formes de la faune, de la flore et de l'architecture. Mais tandis que Dufy s'efforçait de capturer ce lieu, parmi les plus iconiques de Marrakech, par des applications d'aquarelles lumineuses, El Mansour a tenté, avec succès, de capturer la même impression de luminosité et de mouvement par une utilisation quasi frénétique du couteau à palette, employant une pâte épaisse. Le résultat est presque sculptural dans son sens de modélisation cinétique du plastique », précisent les critiques Mac Carthy et Clandermont. Au coeur des villes El Mansour se distingue dès 2007, au vernissage de sa première exposition, qui avait alors fleuri les murs de la galerie d'art Lawrence-Arnoot à Tanger, et impose définitivement sa facon de radicaliser les styles, notamment à travers l'œuvre « Marrakech » ou encore « La Menara le soir ». Sensible à la nature luxuriante, libre, l'invitant à la contemplation, le peintre signe des travaux, empreints d'évidente naïveté, et néanmoins traversées par une rare force. « Marrakech » est un exemple du style original purement naïf d'El Mansour, où la simplification des formes est tellement radicale qu'elles sont devenues l'équivalent de notes prises en sténographie iconographique. « Quant à son utilisation des couleurs primaires, pour créer des assemblages de motifs aléatoires, elle flirte avec l'abstraction », expliquent encore les critiques d'art Mac Carty et Clandermont. C'est finalement un festival de couleurs qu'il donne à voir, à coups de rouges éclatants, de bleus francs, de jaune tranchants, de blancs apaisants. Un spectacle profondément ancré dans le sensoriel, livrant une œuvre aussi plurielle qu'intrigante.