Avec les toutes récentes précipitations qui sont parvenues à porter les réserves en eau retenues au niveau des principaux barrages du Royaume à plus de 9349 Mm3, le monde agricole connaît un certain regain de dynamisme et, à en juger par l'avis de nombreux intervenants opérant dans le secteur, plusieurs indicateurs virent au vert et laissent présager une situation relativement meilleure à celle qui avait prévalu jusqu'au mois de décembre 2015, date à laquelle le déficit pluviométrique s'est situé à plus de 60%. Depuis, les parcours connaissent une certaine régénération du couvert végétal. Laquelle régénération a eu quand même le double mérite de freiner les mouvements de spéculations qui devenaient de plus en plus vives au niveau des aliments du bétail dont l'orge et la paille et d'inciter les éleveurs à envisager la possibilité de ne plus penser à brader leur cheptel pour améliorer leurs fonds de roulement déjà affectés par les prémices d'une campagne compromise. Le même retournement de tendance est à relever aussi au niveau de certaines spéculations dont l'arboriculture fruitière et certaines cultures intensives, maraîchages et autres. Sans oublier bien entendu les cultures printanières qui auraient à tirer profit d'une telle conjoncture pour permettre aux fellahs, les petits notamment, moyennant tout un processus de reconversion, d'améliorer leur trésorerie. Ajouter à cela la contribution non négligeable des différentes cultures irriguées, la valeur ajoutée agricole devrait, in fine, connaître une certaine consolidation. Est-ce pour autant dire que la campagne céréalière est sauvée ? Nullement,affirme plus d'un intervenant dans le secteur primaire et les récentes précipitions ne changeront pas grand-chose au niveau des céréales, d'autant plus que de nombreux agriculteurs qui s'adonnent à la céréaliculture n'ont pas jugé opportun, à défaut de précipitations, de procéder aux opérations d'emblavement de leurs champs. A ce niveau et en l'absence de données chiffrées du terrain, les prévisions divergent. Les uns évoquent une campagne céréalière qui, dans les meilleurs des cas, serait en deçà des 40 millions de quintaux. Les autres, relativement plus optimistes, parlent d'une production de l'ordre de 70 millions de quintaux. Les plus prudents temporisent et préfèrent plutôt attendre jusqu'au mois de mai pour mieux se prononcer sur le sort définitif de cette campagne céréalière qui est tout aussi une affaire de qualité de la graine. En attendant, une autre situation est à ne pas occulter, à savoir celle qui prévaut au niveau des légumineuses. Qu'en est-il exactement ? A ce titre, les opérateurs canadiens opérant dans le secteur ont de bonnes raisons de se frotter les mains. Au marché marocain se présente l'opportunité d'écouler des quantités conséquentes de lentilles et de pois chiches. En tant que grand producteur et exportateur des légumineuses et principal fournisseur du Maroc, à hauteur de 90% pour les lentilles et de 50% pour les pois chiches, le marché canadien aura sans nul doute à se tailler la part du lion en termes d'approvisionnement du marché domestique marocain en ces denrées alimentaires. Un marché qui, à en juger par les chiffres jusqu'ici communiqués, évolue dans un contexte marqué par la baisse constatée au niveau des stock de lentilles et de pois chiches, estimée, par rapport à l'année écoulée, respectivement à 25% et 26%. Au point que les pouvoirs publics viennent de décider tout récemment la suspension de la perception du droit applicable aux lentilles et aux pois chiches. A cet effet, le Conseil de gouvernement, réuni le 4 mars 2016, avait adopté le projet de décret n 2-16-165 portant sur la suspension de la perception du droit applicable aux lentilles et aux pois chiches, jusqu'au 15 juillet 2016, dans la limite de 13.000 tonnes pour les lentilles et 18.000 tonnes pour les pois chiches. Aussi, cette décision est-elle justifiée, de source officielle, par une sorte de réponse aux besoins nationaux, un maintien du niveau actuel des prix des lentilles et des pois chiches et un souci d'éviter les problèmes de commercialisation pendant l'actuelle période hivernale et le long du prochain mois de Ramadan. Toujours est-il que ce n'est pas le cas, à en juger par les prix qui se pratiquent depuis un certain temps déjà. Chez la majorité des détaillants, le prix des lentilles est passé de 12 à 18 DH et le même niveau de hausse est à relever au niveau des pois chiches. À en croire le ministre de la Communication, porte-parole du gouvernement, cette hausse des prix est due à la progression de la demande intérieure sur les semences des légumineuses, au monopole exercé par certains commerçants et aux développements que connaît le marché international. Pour notre part, cette situation est aussi le résultat d'un mouvement de spéculation et depuis un certain temps déjà et faute de meilleure régulation, le panier de la ménagère devient moins lourd et plus coûteux et le commun des Marocains s'interroge sur qui contrôle quoi.