La délégation de l'opposition syrienne dépêchée à la conférence de Genève s'est félicitée de son premier entretien avec l'émissaire de l'Onu Staffan de Mistura, dimanche, et a annoncé la poursuite des discussions lundi. Le Haut Comité des négociations (HCN) créé le mois dernier enArabie saoudite par des partis politiques et des groupes armés avait auparavant exclu de négocier avec Damas en l›absence de mesures concrètes dans le domaine humanitaire. «La rencontre d›aujourd›hui avec M. De Mistura a été très positive», a déclaré un porte-parole. «Les choses sont encourageantes et positives concernant les questions humanitaires. Il y aura une autre rencontre demain». Bachar al Djaafari, chef de la délégation gouvernementale, s›est quant à lui dit prêt à discuter des mesures humanitaires, comme la libération de détenus, après une entrevue avec Ramzi Ezzedine Ramzi, l›adjoint de Staffan de Mistura. Sur le terrain, un triple attentat dans un quartier chiite du sud de Damas, revendiqué par les djihadistes de l›Etat islamique (EI), a fait plus de 60 morts, dont 25 miliciens chiites, et des dizaines de blessés, selon l›Observatoire syrien des droits de l›homme. «Nous ne sommes venus à Genève qu›après avoir reçu des assurances et des engagements précis sur le fait qu›il y aurait de sérieux progrès quant à la situation humanitaire», a déclaré Bassma Kodmani, membre de la délégation du HCN «Tant que nous n›aurons pas vu de tels gestes, nous ne pouvons pas lancer les négociations politiques», a-t-elle ajouté lors d›une conférence de presse dans la ville suisse. Pourtant, a-t-elle poursuivi, les soldats syriens et leurs alliés russes semblent rester «sourds» à ces exigences et les opérations militaires se sont mêmes intensifiées sur le terrain. La 2254 de l'ONU Selon Salim al Mouslat, porte-parole du HCN, l'opposition est prête à faire dix pas si le gouvernement de Damas accepte d'en faire un seul, ce dont il doute. «Le régime n'est pas venu à Genève pour trouver une solution mais pour gagner du temps afin de tuer encore plus de Syriens», a-t-il assuré. Dans un communiqué diffusé sur internet, le coordinateur du HCN, Riad Hidjab, qui se trouve à Ryad, avertit que la délégation de l'opposition pourrait quitter Genève si les bombardements gouvernementaux et russes se poursuivent et empêchent l'envoi d'une aide humanitaire aux villes assiégées. «Si le régime et ses alliés continuent de violer les droits du peuple syrien, alors la présence de la délégation du HCN à Genève n'aura pas de justification et le HCN pourrait retirer son équipe de négociateurs», souligne Hidjab dans ce communiqué, après avoir rencontré dans la capitale saoudienne le Premier ministre turc Ahmet Davutoglu. Le HCN réclame l'arrêt des bombardements des populations civiles, la levée du blocus des villes assiégées et la libération de quelque 3.000 femmes et enfants qui seraient détenus dans les prisons syriennes, des points qui figurent dans la résolution 2.254 adoptée à l'unanimité le 18 décembre par le Conseil de sécurité de l'Onu. Appel de John Kerry Interrogé sur ces points lors d'une conférence de presse, Bachar al Djaafari, qui avait vu Staffan de Mistura vendredi, a répondu: «Cela fait partie de l'ordre du jour que nous avons accepté (...) Ce sera l'un des thèmes importants dont nous discuterons entre citoyens syriens». Prié de dire quels étaient ses objectifs à Genève, il a répondu: «Demandez-le moi quand les négociations commenceront». Il a souligné que le gouvernement syrien voulait trouver une solution à un conflit qui a fait 250.000 morts en près de cinq ans mais qu'il doutait du «sérieux» de la délégation de l'opposition, dont il a dit ne pas même connaître la composition exacte. Pour lui, l'opposition représentée par le HCN sert les intérêts de puissances étrangères qui utilisent le terrorisme comme arme politique. Les explosions de Damas dimanche prouvent d'ailleurs ce lien entre l'opposition et le terrorisme, a-t-il estimé. Mohamed Allouch, représentant du puissant mouvement rebelle Djaïch al Islam qui siège au HCN, a annoncé dimanche son départ pour Genève où il entend démontrer que le gouvernement syrien ne veut pas d'un règlement pacifique du conflit. «Il est nécessaire pour moi d'aller à Genève pour montrer au monde qui sont les terroristes qui détruisent leur pays et déplacent leur peuple», a-t-il déclaré. Dans une déclaration télévisée, le secrétaire d'Etat américain John Kerry a appelé dimanche les deux parties à saisir l'occasion de ces discussions de Genève pour avancer vers un règlement du conflit car, a-t-il dit, «il n'y a pas de solution militaire». Il a exhorté Damas à faciliter l'envoi d'une aide humanitaire aux villes assiégées et affirmé qu'un accord politique en Syrie porterait un coup sévère aux djihadistes de l'EI.