Le Burkina Faso tente de tourner la page du coup d'Etat pour regarder vers la fin de la transition, après la prise, avant-hier mardi par l'armée, de la caserne où étaient retranchés des ex-putschistes qui ont ébranlé cette démocratie naissante depuis le 17 septembre. « Le Gouvernement de la Transition (...) lance un appel au renforcement de la réconciliation et de l'unité nationale, et exhorte tout un chacun à œuvrer dans ce sens », déclare le gouvernement. Promettant un bilan « ultérieurement », le gouvernement assure que « les places ou camps occupés par l'ex-RSP (l'unité putschiste Régiment de Sécurité présidentielle, garde prétorienne de l'ancien président Blaise Compaoré), notamment le camp Naaba Koom, ont été libérés par « nos vaillantes Forces de Défense et de Sécurité ». « Le Gouvernement de la Transition félicite le peuple burkinabè pour sa mobilisation sans faille depuis le début de cette crise et les Forces de Défense et de Sécurité pour leur professionnalisme et leur comportement républicain », ajoute-t-il. L'ex-chef putschiste, le général Gilbert Diendéré, a déclaré à la presse redouter qu'il y ait eu de nombreux morts lors de l'assaut de l'armée. « Ils ont sorti l'artillerie (...) Ils ont tiré sur le camp. Malheureusement il y avait des familles, la clinique (dans le camp). Il doit y avoir beaucoup de morts et de blessés », a-t-il dit. Aucun bilan de l'assaut n'était disponible dans l'immédiat. A l'issue d'un bras de fer entre anciens putschistes et autorités légales, l'armée a lancé l'assaut en fin d'après-midi sur la caserne Naaba Koom II où s'étaient retranchés des soldats du RSP réticents à désarmer. « La situation est calme. Un assaut a été donné. Il n'y a pas eu d'affrontement. Ils (le RSP) ont quitté la caserne », a déclaré le chef d'état-major des armées du Burkina, le général Pingrenoma Zagré. Avant ce dénouement, l'armée, qui affichait une volonté claire d'en finir avec ces irréductibles, avait tiré à quatre reprises avec des armes lourdes sur la caserne, et des tirs nourris avaient suivi. Le général Diendéré - un très proche de l'ex-président Compaoré renversé par la rue en 2014 après 27 ans de pouvoir - avait appelé sur une radio burkinabè ses hommes à « déposer les armes pour éviter un bain de sang ». Il a assuré qu'il se mettrait « à la disposition de la justice de (son) pays », précisant qu'il ne se trouvait plus sur cette base militaire, sans donner davantage de précisions, alors qu'une partie de la population veut le trouver pour qu'il soit jugé. La société civile, qui avait rejeté une première médiation de la Cédéao (Communauté économique des Etats d'Afrique de l'Ouest) comprenant une amnistie des putschistes, n'a cessé de rappeler que le putsch avait fait une dizaine de morts et une centaine de blessés. Augmentant d'un cran la pression, l'armée avait annoncé leur avoir donné « encore une chance » aux putschistes retranchés de « se rendre pour éviter » un « affrontement ». Cinq jours après sa dissolution officielle par le Conseil des ministres de vendredi, le RSP, les auteurs du putsch tentaient jusqu'à mardi de ralentir leur désarmement pour pouvoir mieux négocier. Mais l'armée a encerclé tôt le même jour toute la zone autour de la caserne, plaçant véhicules blindés, pick-up et hommes armés de mitrailleuses et de RPG aux carrefours, a constaté l'AF. Situé à proximité, l'aéroport de Ouagadougou a été fermé depuis avant hier jusqu'à nouvel ordre. La circulation était interdite dans ce secteur et le chef d'état-major Pingrenoma Zagré avait « pour des raisons de sécurité, invité les populations à éviter tout mouvement dans la zone de Ouaga2000 », quartier sud où se trouvent le palais présidentiel Kosyam et la caserne. Le régime de transition a parallèlement procédé à l'arrestation, « en lien avec le putsch », de Djibrill Bassolé, ex-ministre des Affaires étrangères de Blaise Compaoré, qui souhaitait se présenter à l'élection présidentielle prévue le 11 octobre, selon des sources sécuritaires concordantes. Il fait partie, avec le général Diendéré et son épouse Fatou Diallo Diendéré, des 14 personnes dont les avoirs ont été gelés samedi par la justice, qui a aussi bloqué ceux de quatre partis, dont le Congrès pour la Démocratie et le Progrès (CDP), le parti de Blaise Compaoré. Perpétré le 17 septembre par le RSP, le putsch a finalement échoué une semaine plus tard. (Avec Agence)