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Les missions de Bank Al-Maghrib bientôt élargies: Interdiction de solliciter ou d'accepter toutes instructions émanant du gouvernement
Publié dans L'opinion le 27 - 02 - 2015

Confinée depuis 2006 dans son habit étriqué que constitue son statut actuel, Bank Al-Maghrib sera confortée dans un cadre rénové qui renforce son rôle et ses missions et élargit ses prérogatives, en vertu d'un projet de loi qui vient dêtre élaboré. Près de huit ans se sont écoulés depuis la mise en application de la loi n°76-03 portant statut de Bank Al-Maghrib (BAM) en février 2006. L'environnement juridique et institutionnel de BAM a connu une évolution importante qui s'est caractérisée notamment par la mise en place d'une nouvelle Constitution du Royaume du Maroc en 2011 et la dernière réforme de la loi relative aux établissements de crédit. Par ailleurs, les missions des banques centrales ont subi une transformation profonde suite aux enseignements tirés de la crise financière internationale de 2009, particulièrement en matière de stabilité financière.
Eu égard à ces développements et en vue de mettre cette loi au diapason des meilleurs standards internationaux, il est devenu nécessaire de procéder à une refonte de la loi portant statut de BAM.
Les grandes lignes de ce projet de loi qui se décline en 97 articles répartis en onze chapitres peuvent être récapitulées comme suit:
Renforcement de l'indépendance de BAM
Le projet de loi prévoit d'attribuer à la banque centrale une autonomie totale en lui conférant le pouvoir de définir l'objectif de stabilité des prix, qui devient son objectif principal, et de conduire la politique monétaire en toute indépendance. De même, il propose une nouvelle disposition permettant la concertation régulière entre le ministre chargé des finances et le Wali en vue d'assurer la cohérence de la politique macro-prudentielle ainsi que celle de la politique monétaire avec les autres instruments de la politique macro-économique.
En contrepartie du renforcement de son indépendance, ledit projet prévoit l'introduction du contrôle parlementaire en permettant l'audition du Wali par les commissions permanentes chargées des finances du parlement sur la politique monétaire et l'exercice des autres missions de la banque.
Elargissement des missions de la Banque à la stabilité financière
Le projet de loi propose d'élargir les missions de BAM à la contribution à la prévention du risque systémique et au renforcement de la stabilité financière et d'adapter ses instruments d'intervention à cette mission.
Pour s'acquitter de cette nouvelle mission, ledit projet prévoit des dispositions permettant à la banque :
- d'être représentée au sein du comité de coordination et de surveillance des risques systémiques, créé par la nouvelle loi bancaire;
- de proposer au Gouvernement toute mesure visant à maintenir la stabilité financière;
- de prendre des participations dans des établissements de crédit dans un contexte de gestion des risques systémiques et de résolution des crises bancaires;
- d'imposer aux établissements de crédit et aux gestionnaires des systèmes de paiement la mise en place de tout mécanisme de garantie permanent ou temporaire pour prévenir l'instabilité financière et
- de prendre toutes autres mesures dans les circonstances exceptionnelles.
Clarification des attributions
de BAM en matière de politique de taux de change
Compte tenu de l'interaction entre la politique monétaire et la politique de change et afin de se conformer avec les meilleures pratiques internationales, selon lesquelles la politique de change relève des attributions des ministères en charge des finances avec toutefois une consultation des banques centrales, le projet de loi précise que BAM met en oeuvre la politique du taux de change dans le cadre du régime de change et des orientations fixées par le ministre chargé des finances, après avis de la banque. Dans ce cadre, BAM a été également autorisée à utiliser les réserves de change dans un objectif de défense ou de préservation de la valeur du dirham en cas de régime de change flexible.
Par ailleurs, et afin d'assouplir la gestion des réserves de change, le projet de loi prévoit des dispositions visant à habiliter la Banque à conclure des conventions avec ses contreparties sur la base des conventions cadres agréées par des associations professionnelles internationales et à déléguer la gestion d'une partie des réserves de change à des mandataires dans des conditions fixées par la banque.
Renforcement de la bonne
gouvernance
Les principales nouveautés du projet de loi visant la consolidation de la bonne gouvernance de la banque concernent:
Ledit projet a consacré les principes de l'indépendance institutionnelle et personnelle de la banque à travers l'introduction des dispositions suivantes:
- l'interdiction pour la banque de solliciter ou d'accepter toutes instructions émanant du Gouvernement ou de toute personne;
- la précision des critères de nomination du Wali et du vice-Wali et des conditions de leur révocation, ainsi que la limitation de la durée de leur mandat;
- l'élargissement des incompatibilités relatives aux fonctions des six membres du conseil désignés par le chef du Gouvernement aux responsabilités dans des entreprises publiques ou privées.
Elargissement des prérogatives du conseil de la Banque
Le projet de loi prévoit l'élargissement des attributions du conseil de la Banque suite au renforcement des missions de cette dernière et ce, en l'habilitant notamment à :
- définir l'objectif de la politique monétaire;
- fixer les instruments d'intervention qui lui paraissent adaptés aux spécificités des banques participa rives ;
- décider des modalités d'utilisation des réserves de change dans un objectif de préservation de la valeur du dirham ;
- délibérer sur la création et la gestion des systèmes de paiement;
- approuver les rapports de gestion;
- examiner et approuver le code d'éthique et le code déontologique.
Elargissement
des attributions du Wali
Le projet de loi prévoit de nouvelles dispositions permettant l'élargissement des attributions du Wali en liaison avec les nouvelles missions de la banque à savoir :
- l'agrément de la création et de la gestion des systèmes de paiement;
- la supervision des systèmes et des moyens de paiement;
- la fixation des conditions de délégation de la gestion des réserves de change;
- l'organisation et la supervision de l'activité du traitement de la monnaie fiduciaire;
- la prise, en cas de force majeure, de toutes mesures relevant des attributions du conseil.
Nouveaux organes
d'administration et de direction
Ledit projet de loi propose l'institution de nouveaux organes d'administration et de direction de la banque, en l'occurrence, le comité monétaire et financier, le comité de stabilité financière et le comité d'audit. Dans ce cadre, le comité monétaire et financier et le comité de stabilité financière ont pour rôle d'assister le Wali dans les domaines directement liés aux missions fondamentales de la banque. Quant au comité d'audit, qui doit être composé au moins de deux membres du conseil, il a pour mission de donner un avis au Wali et au conseil de la banque sur les questions relatives à l'information comptable, à l'audit interne et externe, au contrôle interne et à la maîtrise des risques.
Contrôle de BAM et répartition des bénéfices
Les principales nouveautés du projet de loi consistent à limiter la portée du contrôle du Commissaire du Gouvernement aux opérations financières et à subordonner la répartition du bénéfice net disponible, après les prélèvements nécessaires, à un accord entre la banque et l'autorité gouvernementale chargée des finances.
Nouveau cadre juridique pour les systèmes et moyens de paiement
En l'absence d'un cadre juridique relatif aux systèmes et moyens de paiement, le projet de loi a consacré un nouveau chapitre à la supervision et la sécurisation des systèmes et moyens de paiement. Les principales nouveautés de ce projet de loi se présentent comme suit:
- Doter la banque centrale des moyens nécessaires pour lui permettre d'exercer la fonction de supervision des systèmes de paiement, en l'habilitant à agréer la création de ces systèmes et en renforçant son pouvoir de contrôle et de sanction;
- Instituer des dérogations notamment par rapport au code de commerce afin de garantir l'irrévocabilité des opérations de règlement et de livraison introduites dans les systèmes de paiement;
- Préciser les modalités de surveillance et de sécurisation des moyens de paiement;
- Créer un conseil national des systèmes de paiements qui aura pour mission de tracer les orientations stratégiques de ces systèmes et d'examiner les questions relatives à la falsification et à la contrefaçon des moyens de paiement.


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