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Entretien avec Eric Gérard, le Consul Général de France à Marrakech: «Le Maroc et la France ont en commun plusieurs valeurs intrinsèques scellant à tout jamais leur indispensable union»
L'Opinion : Quel bilan après un an ? Eric Gerard : J'ai peine à croire qu'il y a déjà plus d'un an que j'ai pris mes fonctions. Je suis toujours un peu méfiant envers les bilans car ils peuvent être réducteurs. Je préfère vous livrer quelques impressions... Cinq mots me viennent à l'esprit : densité, vitesse, bonheur, créativité et authenticité. C'est pour moi un privilège de pouvoir exercer mes fonctions de consul général à Marrakech et d'y vivre en famille. J'ai été séduit par cette ville dès les premiers instants. Je ne saurais vous expliquer véritablement pourquoi mais il y a des lieux, des périodes qui vous parlent et vous correspondent. Ce qui m'attire dans notre ville, ce n'est pas forcément le plus attractif, ce que vous voyez d'emblée, mais ce qu'elle recèle et ne dévoile que si vous prenez le temps de l'apprivoiser, d'aller à elle et de la laisser venir à vous. Marrakech est une ville mythique, mystique, captivante qui ne laisse personne indifférent. C'est une ville chargée d'histoire où l'accueil est une valeur fortement ancrée et authentique. Il y a une énergie exceptionnelle ici, une force créative que l'on ressent dans tous les domaines y compris dans les orientations majeures. J'ai eu l'honneur d'assister, en janvier 2014, à la présentation du plan «Marrakech, cité du renouveau permanent» devant Sa Majesté le Roi Mohammed VI. La ville qui connaît un essor fulgurant depuis plusieurs années, est en transition. Le plan de développement actuel touche tous les secteurs d'activité : l'urbanisme, les transports, l'eau... Ces projets, déjà bien engagés, ne limitent pas pour autant la forte activité de la ville qui se pose, au-delà de son activité touristique, en plateforme nationale et internationale pour les conférences de haut niveau. Nous en comptons quasiment une par semaine. Tout ceci génère des flux d'activités et de personnes en croissance régulière. L'Opinion : Et comment ça se passe au Consulat ? Eric Gerard : Le consulat général de France vit au rythme de cette effervescence qu'il accompagne dans son domaine de compétence. Il vit aussi au rythme de l'évolution d'une communauté française, diverse et dynamique, qui ne cesse de croître. Entre 2009 et 2014, le nombre de compatriotes inscrits au registre des Français établis hors de France a doublé. Nous estimons à 13000 aujourd'hui le nombre de résidents auxquels on doit ajouter les Français de passage, ce qui peut représenter entre 15 et 18 000 Français présents sur la circonscription consulaire au quotidien. Pour mémoire, la circonscription s'étend de SAFI et Essaouira à l'ouest jusqu'à Zagora, Ouarzazate et Tinghir au sud. Mais l'essentiel de nos compatriotes est concentré à Marrakech. J'ai la chance de diriger une équipe de grande qualité composée d'agents expérimentés, soucieux d'apporter de manière constante un service de qualité à nos compatriotes et à nos amis marocains désireux de visiter la France. Tous les indicateurs sont en hausse dans le secteur consulaire (visas, Etat-civil, notariat, affaires sociales, administration des Français) et dans les activités externes telles que les relations avec les grands partenaires institutionnels, économiques et culturels. Nous avons à ce titre la chance de disposer d'un institut français dynamique, créatif et entreprenant, très à l'écoute des attentes de la jeunesse locale comme des différents acteurs de la société civile. Le consulat comme les établissements français ont à cœur de faire partager notre culture, nos questions, nos attentes et nos projets. Je crois que le véritable moteur réside dans l'envie commune de faire découvrir son identité à l'autre, de toujours mieux se connaître l'un l'autre. Notre métier est dans l'action mais aussi dans l'écoute et la compréhension d'un environnement en profonde mutation. L'Opinion : Qu'en est-il de la conciliation entre activités professionnelles ? Eric Gerard : Il est vrai que les activités internes et externes du consulat sont aussi nombreuses que variées. Il ne peut se contenter de gérer un quotidien pourtant déjà dense ; il doit aussi parallèlement à cela, répondre à l'événement, traiter des dossiers de fond et anticiper les besoins et échéances futures. Pour concilier toutes ces dimensions, il faut parfois faire des choix guidés par l'importance ou la singularité de l'événement du moment et les objectifs à plus long terme car l'activité d'un consulat s'inscrit dans le temps. Je ne vous cache pas que les journées et les semaines sont denses mais nous puisons notre satisfaction dans les résultats obtenus, pas forcément les plus visibles. Ce métier est riche car fondé sur les relations humaines et le travail sur le terrain. L'Opinion : Parlez nous des relation entre les administrations locales et le consulat. Eric Gerard : Les relations entre les administrations locales et le consulat sont très bonnes, empreintes de confiance et de respect mutuels, dans tous les secteurs. Je souhaite souligner, comme je l'avais fait lors de notre fête nationale, l'appui indéfectible des autorités au profit du consulat et de nos compatriotes. L'Opinion : Voudriez-vous présenter pour nos lecteurs la nouvelle équipe du consulat et nous parler de son intégration ? Eric Gerard : Une grande partie de l'équipe du consulat s'est renouvelée à l'été 2014. * Mon adjointe, Catherine STARACI, a pris la suite de Matthieu PIMONT, * Agathe BERTRAND a succédé à Annie ROUSSILLON à la tête du service des visas, * Sandrine PRIOUL, responsable du service de l'administration des Français, a remplacé Carole GOSSEREZ * Mon assistante, Carine ANDRES, a pris la suite de Patricia KAZIEWICZ, partie à la retraite. Il s'agit d'agents du ministère des Affaires Etrangères, tous expérimentés, qui ont rapidement pris leurs fonctions et se sont intégrés à la ville, à ses codes, à ses particularismes. Cette intégration rapide est due en grande partie à l'accueil qui leur a été réservé au sein de la société civile. Je crois que cet accueil fait partie de l'ADN du Marrakchi qui aime faire découvrir sa ville, son pays, ses coutumes. L'écoute et le respect mutuel sont donc au cœur de la relation entre nos deux pays et de notre métier. L'Opinion : Quelle évolution du nombre de demandeurs de visas et quelle réactivité du nouveau dispositif ? Eric Gerard : Le nombre de demandeurs de visas a encore progressé en 2014 avec 19 723 dossiers, soit 6 % de plus qu'en 2013. Le taux de visas accordés est de 92 %, soit une progression de 1% par rapport à l'an dernier. Parmi les visas délivrés, 39 % sont des visas de court séjour circulation valables plusieurs années. Nous attachons une importance particulière à la qualité du service. Les agents ne ménagent pas leurs efforts pour offrir un accueil de qualité, des délais de traitement les plus courts possibles et absorber une demande en croissance régulière. C'est dans cet esprit d'ailleurs que la France a décidé de faire évoluer son organisation en matière de visas de court séjour au Maroc. Le nouveau dispositif a été lancé, à Marrakech, le 14 janvier dernier, après Agadir et Oujda, en décembre 2014. Le nouveau système consiste à confier à un prestataire spécialisé la gestion des phases de collecte des dossiers et de restitution des passeports. Cette société a déjà l'expérience de ce travail dans d'autres pays avec la France ainsi qu'au Maroc avec d'autres pays européens. L'objectif est de délivrer plus de visas, plus vite et dans de meilleures conditions. Le principe est simple : * Le prestataire gère, sous le contrôle du consulat, l'accueil du public en amont et en aval, c'est-à-dire le rendez-vous, l'accueil, la saisie administrative du dossier, le paiement de la quittance, la biométrie et la restitution du passeport. * Le consulat garde, quant à lui, la maîtrise de l'instruction du dossier et de la décision de délivrance. Il conserve aussi la gestion complète des visas longs séjours et assure le contrôle du prestataire. Le premier bilan est positif. Depuis le 14 janvier, le centre TLS a reçu 740 personnes. Nous savons qu'il y a encore quelques ajustements à consentir. Les équipes nouvellement recrutées et formées doivent finir de se rôder et il est normal qu'au départ, chacun trouve ses marques. Nous sommes en relation au quotidien avec le chef de centre TLS dont nous apprécions la réactivité et la rigueur. Le niveau d'exigence que nous avons fixé est très élevé, sur les conditions d'accueil, les délais, le suivi des dossiers, la qualité du traitement. Partout où ce dispositif a été implanté, les résultats ont été rapidement atteints. C'est une véritable évolution qui tient compte de toutes les attentes formulées au cours des années passées. Je relèverai quelques points clefs : * Réduction des délais de rendez-vous (18 jours le 14 janvier, 24 h aujourd'hui) * Réduction des délais de traitement. (en moyenne 4 à 5 jours aujourd'hui) * Augmentation des capacités de traitement * Restitution des passeports à un guichet dédié tout au long de la journée * Plus grande fluidité des flux de visiteurs * Possibilité de prendre rendez-vous par internet * Meilleures conditions d'accueil. Cette nouvelle organisation implique le paiement de frais de service à la société TLScontact, dont le montant est comparable à celui pratiqué par les autres pays européens ayant adopté ce schéma. Les demandeurs vont rapidement s'approprier ce nouveau dispositif dont ils verront vite les avantages. Je précise d'ailleurs qu'ils peuvent contribuer à son perfectionnement en remplissant l'enquête de satisfaction qui leur est proposée lors de leur venue au centre. Nous comptons sur eux car les indicateurs de performance hebdomadaires qui tiennent compte de leur avis, nous permettent d'introduire rapidement les petites améliorations qui s'imposent. Les résultats sont suivis de très près par mon équipe et moi-même. L'Opinion : Quel message adresser aux demandeurs de visas ? Eric Gerard : Il se résume en un seul mot : anticipation. Il est souhaitable et possible de déposer un dossier de demande de visa, dans les 3 mois qui précèdent le départ. De la même manière, on peut renouveler un visa de circulation avant qu'il arrive à expiration. En outre, si un demandeur de visa estime qu'une information peut être importante dans la compréhension de son dossier, il peut joindre une lettre à l'intention du consulat au moment du dépôt auprès du centre TLS. L'Opinion : Relevez-vous des points désobligeants à Marrakech ? Eric Gerard : J'avoue avoir du mal à vous répondre sur ce point car lorsque l'on vit dans un pays, dans une cité, on accepte le meilleur comme le moins agréable. Il y a des choses que l'on ne voit plus tant elles font partie de notre quotidien. Pour autant, il est vrai que j'ai du mal à m'habituer à la circulation des deux roues, vélos comme vélomoteurs, qui ne respectent pas beaucoup la signalisation. Ils sont dangereux pour eux et pour autrui. C'est un travail de fond pour les forces de sécurité, très sollicitées.