Les premiers résultats de l'enquête Panel de ménages, menée depuis 2012 par l'Observatoire National du Développement Humain ont été divulgués lors d'un séminaire organisé mercredi 4 février à cet effet. Education, santé, sécurité sociale, logement, alimentation, revenus, dépenses, bien-être économique..., sont passés au crible fin, sur un échantillon de 8000 ménages retenus pour la première vague 2012. Des indicateurs qui pourraient cibler ou plutôt influer sur les politiques publiques à mettre en place, permettre de comprendre la dynamique de la pauvreté monétaire et multidimensionnelle, de mieux appréhender les inégalités sociales, d'orienter les réformes et d'améliorer les programmes de protection sociale. D'autres objectifs sont de mise, tels que construire une base d'indicateurs de développement humain de référence, mesurer régulièrement l'évolution des principales dimensions du développement humain, suivre ces mêmes indicateurs à travers les passages successifs de l'enquête, assurer le suivi et l'analyse de la dynamique du développement humain, expliquer les inégalités socio-économiques... Ce type d'enquête, une première au Maroc, est assez spécifique dans la mesure où il se fait de façon régulière à court, moyen et long terme, auprès d'un échantillon de ménages représentatif au niveau national, en tenant compte des milieux urbain, rural et régions, et selon l'approche méthodologique moderne CAPI, se basant sur les standards internationaux. Dans notre cas, l'enquête dure 6 ans, au cours desquels, les experts mesurent et évaluent les changements qui s'opèrent au niveau des ménages au fil du temps, assurent le suivi de l'évolution des principales dimensions du développement humain, à savoir l'éducation, la santé, les revenus et les dépenses des ménages, le logement, etc. C'est ce qu'assure M. Belmokhtar, Président de l'ONDH. L'idée, qui est aussi reconnue dans toute approche de la pauvreté multidimensionnelle, c'est qu'un ménage (ou un individu) peut être économiquement aisé, mais souffrir de carence dans un domaine ou un autre du développement humain, comme l'éducation ou la santé ou encore les conditions d'habitat, des critères tout aussi vitaux. Jusqu'à présent il y a eu deux vagues d'enquêtes: la première en 2012 constituant l'enquête de référence et une deuxième vague en 2013 dont l'analyse des données est en cours de finalisation. Ces ménages seraient revisités annuellement dans les autres vagues (ménages et membres de ménages). Et l'échantillon serait élargi à 16000 ménages à partir de la vague 2016. La journée du séminaire a connu la participation de plusieurs experts et consultants, des représentants d'organisations nationales et internationales, de départements ministériels et de la société civile. Il y eut plusieurs présentations se rapportant en rapport avec l'enquête : « Eléments sur les aspects méthodologiques du panel et sur la méthodologie d'échantillonnage », présenté par Mohamed Mahmoudi, Consultant et « Premiers Résultats Vague (2012 ) » par Touhami Abdelkhalek, Consultant. Pour ce qui est des principaux résultats de l'EPM-ONDH (2012), elle a montré des disparités entre le milieu urbain et le milieu rural mais aussi entre les hommes et les femmes, surtout en ce qui concerne la scolarisation. L'enquête traite du niveau d'alphabétisation de la population âgée de dix ans ou plus et de sa répartition selon le diplôme le plus élevé obtenu, du niveau scolaire atteint par la population âgée de quatre ans ou plus, avant de se concentrer sur les indicateurs relatifs à la scolarisation et à la déscolarisation des enfants, au niveau de la population concernée et au niveau des ménages, sans omettre la contribution du secteur privé à la scolarisation des enfants. Côté éducation, si le Maroc est en train d'achever la généralisation de la scolarisation au cycle primaire, les retards et les inégalités persistent toujours au niveau du collège, et sont encore plus accentuées au niveau du lycée. Les résultats de l'enquête panel de ménages 2012 montrent que le taux d'alphabétisation de la population âgée de 10 ans et plus ne dépasse pas les 65,5%. Seulement, si les trois quarts des urbains sont alphabétisés, les ruraux ne le sont qu'à moitié. De même, le taux d'alphabétisation des hommes est de 75,4% tandis que celui des femmes est de 55,8%. Ces disparités se révèlent également selon le niveau de vie. En effet, le taux d'alphabétisation passe de 53,9% chez les ménages les moins aisés à 81,1% chez les plus aisés, au niveau national. Les résultats de l'enquête panel de ménages 2012 montrent qu'à l'échelle nationale, une personne (âgée de 4 ans ou plus) sur trois n'a aucun niveau scolaire. 29% ont atteint le niveau primaire, 15,8% le collège, 10,7% le lycée et 7,1% le niveau supérieur. Les 4% restants ont atteint un autre niveau (préscolaire, Msid, école coranique). Pour ce qui est du diplôme, 68,1% des personnes âgées de 10 ans et plus n'ont aucun diplôme, un écart fort important en milieu rural (84,9%). Côté féminin, presque neuf femmes rurales sur dix n'ont aucun diplôme Les calculs sont effectués pour le préscolaire en considérant les enfants dont l'âge est compris entre 4 à 5 ans. Le primaire pour les enfants de 6 à 11 ans révolus. Pour le collège, ce sont les enfants âgés de 12 à 14 ans et pour le lycée, de 15 à 17 ans. Pour ce qui est du préscolaire. Les résultats de l'enquête panel indiquent qu'un enfant sur deux, âgé de 4-5 ans, fréquente un établissement d'enseignement préscolaire au moment de l'enquête. Selon le sexe de l'enfant, il semble que les filles soient relativement plus scolarisées que les garçons, à ce niveau, dans les villes, tandis que, dans les campagnes, les garçons sont relativement plus scolarisés. Pour ce qui est du taux de scolarisation au niveau national, il effleure les 94,5%. La scolarisation au collège n'est pas aussi bien gagnée que celle au primaire. Le taux de scolarisation des enfants de 12-14 ans n'est que de 79,9% à l'échelle nationale. Mais le problème le plus grave est que cette moyenne cache une inégalité flagrante entre le milieu urbain et le milieu rural, où ce taux atteint respectivement 92,5% et 59,4%. Au niveau du lycée, le taux de scolarisation des enfants de 15-17 ans est en deçà de la moitié (45,8%). Il est de 69,5% en milieu urbain, mais remarquablement très bas en milieu rural où moins de 16 enfants, âgés de 15 à 17 ans, sur 100 fréquentent le lycée. Il est à noter aussi qu'en milieu rural, le taux de scolarisation au lycée est très variable et augmente significativement en fonction du niveau scolaire du chef de ménage (allant de 11,5% à 82,1%). Il est également fortement influencé par le niveau de vie du ménage. Ce taux passe de 21,2% dans la classe des moins favorisés à 76,1% dans la classe des plus favorisés, au niveau national. Quant à la déperdition scolaire, elle pose problèmes au Maroc, car elle augmente de façon assez brutale lors du passage du primaire au collège. Le collège marque un vrai niveau de rupture critique dans le processus scolaire et touche particulièrement le milieu rural. Pour ce qui est des causes invoquées par les enfants de 6 à 17 ans qui ont répondu au questionnaire de l'enquête, elles diffèrent entre filles et garons et entre urbain et rural. 31,9% d'entre eux répondent qu'ils n'aiment pas l'école et 13,6% que l'école est éloignée. Cette raison est plus souvent évoquée par les enfants du milieu rural (18,2%) que par ceux du milieu urbain (3,8%). En milieu urbain 61,5 % de garçons déclarent qu'ils ont quitté l'école parce qu'ils ne l'aiment pas ou à cause de l'échec aux examens. Pour les mêmes causes, ce taux n'est que de 35,9% pour les filles. En milieu rural, ces taux sont respectivement de 58,2% et 29,4%. S'agissant du refus d'envoyer l'enfant à l'école, ce phénomène concerne les filles(18,3%) plus que les garçons (4,4%). Ce constat est valable en milieu urbain (20,1% contre 5,3%) tout comme en milieu rural (17,7 % contre 3,8%). Toujours en matière d'éducation, 14,5% des ménages, qui ont un enfant de 6 à 15 ans, en phase de scolarité obligatoire, ont au moins un enfant de cette tranche d'âge qui n'est pas scolarisé. En milieu rural, 1 ménage sur 4 se trouve dans cette situation. En milieu urbain, le taux est de 7%. Près de 10% des ménages ont au moins un enfant de cet âge déscolarisé, dont 18% en milieu rural et 4,3% en milieu urbain. Ce phénomène touche plus les filles que les garçons. Le sexe ratio est flagrant au niveau national. 9,5% des ménages ont au moins une fille déscolarisée et 6% des ménages ont au moins un garçon déscolarisé. En milieu rural, ces proportions sont de 17,9% pour les filles et 10% pour les garçons. La scolarisation dans le secteur privé a été également mesurée. Le secteur privé ne couvre que 9% des effectifs scolarisés dont 14% en milieu urbain et 0,4% en milieu rural. En milieu urbain, ce secteur couvre 18,4% au primaire, 8% au collège et 5,9% au lycée.