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L'espace le plus fragmenté du monde: La stabilité régionale produite par les politiques de bon voisinage des États, condition essentielle de l'intégration
Malgré une longue histoire commune, des proximités géographiques, culturelles, religieuses et linguistiques, l'Afrique du Nord est une région sous-intégrée. L'absence d'intégration régionale est souvent expliquée par la similitude des structures économiques et le manque de complémentarités techniques entre les systèmes productifs des pays de la région. Prenant en comparaison avec cet espace l'expérience de l'ASEAN (Association des Etat du sud-est asiatique : Brunéi, Cambodge, Indonésie, Laos, Malaisie, Myanmar, Philippine, Singapour, Thaïlande et Vietnam), dans laquelle le degré de similitude est également important, la Banque Africaine de Développement affirme, dans un note économique (« L'intégration régionale en Asie du Sud-Est : enseignements pour les pays du Sud de la Méditerranée « ) que celle-ci montre bien que la dynamique du commerce régional repose sur le commerce intra-branches et non sur une spécialisation inter-branches. Le commerce intra-branches peut être intense entre économies similaires, comme le prouve le cas européen. La véritable contrainte qui réduit le potentiel commercial régional des pays d'Afrique du Nord n'est pas le degré de similitude de leurs économies, mais la faiblesse de leur développement et le retard de leur industrialisation. Le taux d'intégration commerciale élevé de l'ASEAN ne peut pas être attribué aux seuls efforts de libéralisation commerciale et d'intégration économique menés par les pays membres. Traditionnellement plus ouverte aux IDE que les pays d'Afrique du nord, l'ASEAN a très tôt été intégrée aux stratégies des entreprises mondiales, comme base de production d'abord, comme marché ensuite. Ce sont ces acteurs étrangers qui ont le plus contribué à l'intégration commerciale. Au-delà de la stabilité régionale produite par les politiques de bon voisinage des États et des dynamiques de croissance nationale, les deux principaux moteurs du processus d'intégration économique sont exogènes : - L'assistance technique et l'appui financier des bailleurs et partenaires extérieurs. - Le maillage d'investissements directs réalisés par les entreprises extra-régionales qui ont créé des interdépendances structurelles entre des segments d'industries des différents pays de la région. Processus d'intégration le plus réussi en dehors de l'U.E. Le processus d'intégration régionale en Asie du Sud-Est qui, commencé par six pays (Brunei, Indonésie, Malaisie, Philippines, Singapour, Thaïlande), s'est élargi au Cambodge, au Laos, à Myanmar et au Vietnam (CLMV), passant ainsi de l'ASEAN (6) à l'ASEAN (10), est considéré comme le plus réussi en dehors de l'Union européenne. Ce processus réunit des pays de taille moyenne, dont les conditions initiales étaient proches de celles des pays du Sud de la Méditerranée (PSM) en termes de niveau de revenu, de traditions interventionnistes et protectionnistes, de diversités et d'antagonismes de voisinage, tout en différant par leur degré d'insertion internationale. Les pays de l'ASEAN ont poursuivi des stratégies de valorisation des ressources naturelles jusqu'au début de la décennie 1980. Confrontés au contrechoc pétrolier, ils ont adopté des stratégies de promotion des exportations manufacturières, qui ont bénéficié des délocalisations japonaises. Ainsi, en l'espace d'une décennie, les pays de l'ASEAN sont devenus exportateurs de produits manufacturés. Cette réorientation a accéléré leur croissance entre 1985 et 1995, alors qu'au cours de cette période, la croissance des PSM a ralenti. La création de l'ASEAN, en 1967, a été précédée de plusieurs tentatives infructueuses et la coopération économique est devenue un objectif dix ans plus tard. Après des tentatives volontaristes qui ont été autant d'échecs, les chefs d'État se sont engagés à construire une zone de libre-échange (Afta) en 1992, car ils redoutaient d'être marginalisés par la Chine auprès des investisseurs étrangers. L'ASEAN a adopté un tarif effectif commun et, contre toute attente, les pays ont atteint leurs objectifs de réduction tarifaire et progressé dans la facilitation des échanges. En dépit du maintien des barrières non tarifaires, les échanges intra-ASEAN représentent 24 % des échanges totaux, un taux plus élevé que dans les autres groupements régionaux au Sud. Après avoir mis en oeuvre un traité de libre-échange (AFTA), l'ASEAN s'est engagée à construire une Communauté économique à l'horizon 2015, un objectif très ambitieux qui ne sera sans doute pas respecté. L'ASEAN est en effet handicapée par la faiblesse des moyens que les pays consentent à son Secrétariat, une institution « molle », qui s'appuie sur les bailleurs étrangers pour ses programmes.