La création au Maroc, depuis son indépendance, d'un musée national d'art de l'envergure du Musée Mohammed VI mérite certes tous les éloges et les médias nationaux (écrits et parlés) n'ont pas tari là-dessus, et c'est sûr qu'on continuera de parler de la pertinence de sa conception et de l'esthétique savante de son architecture. Cependant, la muséologie reste, en plus d'un art, une science intégrale et délicate, à ne pas mettre entre toutes les mains, surtout pas celles de gens sans formation aucune et que seul distingue un zèle feu follet ; sinon, cela basculera à coup sûr dans l'aléatoire. La gestion muséale ne s'improvise pas, elle exige des connaissances ciblées, un personnel qualifié, un profil directionnel fluide et perméable à la concertation et à l'esprit d'équipe. Non pas cet esprit d'hiérarchie univoque et arbitraire, où souvent l'humeur fait office de critère autorial ; une telle hiérarchie, on le sait, n'a généralement engendré que l'anarchie. Il faudrait éviter à notre jeune et merveilleux Musée Mohammed VI de tomber dans l'ornière de cet esprit-là, et cela pour que tous les services et la responsabilité qui leur incombe tournent dans le bon sens (comme le souhaite la politique culturelle du pays), celui de la promotion réelle auprès du citoyen, qui se résume dans la sensibilisation la plus large qui soit par les moyens humains et matériels les plus adéquats. Or, démarrer la gestion du Musée avec des idées d'artiste converti du jour au lendemain en fonctionnaire (ou super fonctionnaire !), c'est préparer le lit à ces considérations critiques pour ne pas dire burlesques dont font cas nombre de nos « icones » sociales et politiques rien moins que des pantins. A titre d'exemple, ces petites déclarations que le président de la Fondation des Musées sème à tous vents dans la presse, comme s'il s'agissait de citations d'auteur à prendre pour argent comptant, alors que le moment est plutôt à la retenue et la pondération, non à la démonstration creuse et à la parade. C'est à la lumière des données modernes de la culture et science muséologiques, qu'on pourra savoir comment doit véritablement se faire la promotion d'un si haut lieu de l'art. A méditer.