Le peintre et poète Aissa Ikken a été invité par Jeonbuk Museum Of Art en Corée pour une exposition de peinture et une lecture de poésie du 12 septembre au 12octobre 2014. Cette manifestation a été accueillie avec un grand intérêt par un large public, curieux et connaisseur, qui découvre pour la première fois un aspect de l'art marocain. Les poèmes ont été traduits par Madame Hwarim Cho, professeur universitaire de français et traductrice de nombreux livres français dont Bérénice de Racine. Le vernissage de l'exposition s'est déroulé sous la présidence du Gouverneur de cette ville, de l'Ambassadeur-adjoint du Royaume du Maroc et de nombreuses personnalités. Monsieur le Gouverneur a insisté, dans son mot de présentation, sur la nécessité de développer l'échange interculturel entre les deux pays, considérant le Maroc comme l'un des plus beaux pays d'Afrique. La Corée est profondément ancrée dans l'histoire esthétique de sa région et dans le monde par ses racines culturelles qui ont toujours brillé à travers les siècles malgré certains aléas historiques. Sa profonde identité, la richesse de son patrimoine, son pacifisme, l'harmonie de sa diversité, la rapprochent du Maroc. Autre affinité, les deux pays allient la tradition et la modernité par la conservation, la préservation, la mise en valeur du patrimoine culturel national et l'ouverture sur le monde extérieur. Dans le catalogue de l'exposition, un grand écrivain coréen Dosang Jeong a analysé les œuvres d'Ikken selon sa vision culturelle et ses instruments intellectuels. Le titre de l'exposition étant l'errance des signes, son approche analytique est intéressante par pertinence et surtout par ses références à certains philosophes chinois ou au Bouddhisme. Il serait intéressant de reprendre la synthèse de son étude. « Ce que j'ai aperçu dans les tableaux d'Aissa Ikken, au premier regard, ce sont deux tons : le bleu du ciel et le jaune de la terre. Il a peint le bleu de la mer et le jaune du désert à quelques exceptions près. Dans le désert comme dans la mer, la frontière entre la vie et la mort s'inverse subtilement. Quand il s'agit d'un peintre à la recherche de l'essence de la vie, il est naturel de choisir uniquement ces deux couleurs. Ces deux couleurs font partie de l'univers. Avant l'ère moderne, en Corée on a réalisé un texte afin d'apprendre l'alphabet aux enfants. On a accouplé mille idéogrammes par groupe de quatre. Ce texte représente le fondement de la philosophie orientale. Le dispositif du texte montre comment le monde est composé, ce que doivent faire les êtres humains et comment apprendre l'essence de la vie et de l'univers. L'œuvre d'Ikken représente exactement les deux tons évoqués précédemment. L'art se détermine indépendamment de l'intention de l'artiste Aissa Ikken ne s'intéresse pas beaucoup aux aspects quotidiens de la vie. Il laise errer les signes afin de concrétiser l'essence de la vie. L'essence de son œuvre se révèle dans l'opposition et l'harmonie du yin et du yang. Les êtres humains sont composés d'hommes et de femmes et l'univers est composé du yin et du yang, y compris de cellules minuscules. Il n'y aurait pas de vie sans l'opposition et l'harmonie du yin et du yang, sans lesquelles l'essence de l'univers et l'existence des Dieux seraient impossibles. Aissa Ikken fait errer ses signes entre les hommes et les femmes d'une part et entre le yin et le yang d'autre part. Une errance génère une autre errance. C'est la raison pour laquelle l'existence du voyageur s'explique. En conclusion, les signes d'Aissa Ikken continueront à errer en s'éloignant du centre. Chaque signe a son essence et sa propre histoire sans fin. Ibn Battutah disait : « Je ne prendrai jamais deux fois le même chemin quel que soit ce chemin. » Les signes d'Aissa Ikken procèderont de la même manière. Zhuangzi lui-même continue peut-être dans cette voie avec les papillons. »