Des experts de l'Iran, des grandes puissances et de l'AIEA doivent aborder lundi à Vienne les détails de la mise en œuvre de l'accord de Genève conclu fin novembre sur le programme nucléaire iranien controversé. Ils devraient notamment lors d'une réunion de deux jours à Vienne tenter d'arrêter une date pour le début du gel, promis par l'Iran, de certains domaines de son programme nucléaire et de déterminer comment il sera surveillé. Mercredi, des représentants iraniens rencontreront l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) seule. Lors d'une avancée diplomatique majeure à Genève le 24 novembre avec le groupe des 5+1 (Etats-Unis, Chine, Russie, France, Grande-Bretagne et Allemagne), Téhéran s'est engagé à limiter pendant six mois la production d'uranium faiblement enrichi et de geler le développement des sites de Fordo, Natanz et Arak. L'Iran devra aussi réduire son stock d'uranium enrichi à plus de 20%, facile à transformer en vue d'une utilisation militaire, et permettre à l'AIEA de réaliser des inspections plus poussées, c'est-à-dire des visites quotidiennes à Natanz et Fordo - actuellement hebdomadaires - et des visites de mines d'uranium et d'usines fabriquant les équipements destinés à l'enrichissement. L'ambassadeur iranien à l'AIEA, Reza Najafi, a déclaré aux journalistes le 29 novembre qu'il prévoyait le début de l'application de l'accord «pour la fin décembre ou pour début janvier». Instaurer la confiance Les mesures visent, en attendant un accord à plus long terme, à instaurer la confiance après une décennie de tensions. L'accord de Genève a provoqué l'ire d'Israël, considéré comme le seul pays de la région à détenir l'arme nucléaire, le Premier ministre Benjamin Netanyahu le qualifiant d'»erreur historique». Le texte, associé à la réticence de Washington à intervenir militairement contre le régime syrien, allié de Téhéran, a également irrité la plupart des Etats sunnites du Golfe, qui voient l'Iran chiite comme une menace sérieuse. En échange, les grandes puissances ont accepté un allègement des sanctions qui étouffent l'économie iranienne et vont dégeler des recettes de vente de pétrole sur des comptes en banque pour une valeur de 7 milliards de dollars (5,2 milliards d'euros). Les principales sanctions concernant le pétrole, la finance et le secteur bancaire resteront cependant en place, entraînant un manque à gagner de 30 milliards d'euros sur six mois, selon la Maison Blanche. Une autre clause de l'accord prévoit qu'aucune nouvelle sanction ne sera prise contre Téhéran lors des six mois concernés. L'AIEA a parallèlement conclu le 11 novembre un «cadre de coopération» avec l'Iran via un processus diplomatique séparé, qui devrait être discuté lors de la réunion de mercredi à Vienne. Le régime islamique s'est engagé à remplir en trois mois les six points de cet accord intérimaire. Il a fait un premier geste concret en autorisant dimanche la visite du site de production d'eau lourde à Arak (et non pas du réacteur, que l'AIEA inspecte régulièrement). Il s'agissait de la première visite par l'Agence de cette installation depuis août 2011. Mercredi, les parties devraient discuter d'un autre point prévu dans la «feuille de route», à savoir la visite de la mine de Gachin (sud), a indiqué dimanche le porte-parole de l'Organisation iranienne de l'énergie atomique (OIEA), Behrouz Kamalvandi. L'Iran a également promis de fournir des informations sur les futurs réacteurs de recherche, les emplacements des nouvelles centrales nucléaires civiles ou encore les futurs sites d'enrichissement d'uranium. Le texte ne fait toutefois aucune référence à l'enquête menée par l'AIEA portant sur une possible dimension militaire du programme nucléaire iranien avant 2003, et peut-être aussi depuis. L'Iran a toujours démenti vouloir se doter de la bombe atomique, mais l'AIEA estime ne pas être en mesure de déterminer la nature exacte de son programme nucléaire, faute de coopération suffisante de ce pays. «Tant que l'Iran ne calmera pas les inquiétudes de l'AIEA, une résolution finale semble improbable», ont estimé David Albright et Andrea Stricker, du think thank Institute for Science and International Security (ISIS) dans une récente analyse.