La toute première loi sur la traite des êtres humains, l'Accord international pour la répression de la traite des Blanches, a été ratifiée en 1904 dans la foulée de la panique morale entourant la traite des blanches dont nous avons fait état ci-dessus. Par la suite, on adoptera trois autres conventions internationales qui seront refondues dans la Convention sur la répression et l'abolition de la traite des êtres humains et de l'exploitation de la prostitution d'autrui, adoptée en 1949 par l'ONU (Chuang, 1998; Toupin, 2002, Wijers et Lap-Chew, 1997). Précisons que ce nouvel accord ne vise que la traite des personnes pour fins de prostitution. Jusqu'aux années 80, il semble que la question n'ait pas suscité beaucoup d'intérêt chez les pays participants. Mais à la faveur des débats autour de la question de la pornographie et du tourisme sexuel (Toupin, 2002 :15), des critiques de la Convention commencèrent à se faire entendre. On lui reprocha d'ignorer les autres formes de traite (travailleuses domestiques, mariages par correspondance, travail dans l'industrie du textile, dans l'agriculture), de ne pas considérer la traite à l'intérieur des frontières ni les mauvais traitements sur les lieux de travail (Toupin, 2002). En novembre 2000, en réponse à l'accroissement présumé de l'implication du crime organisé au niveau de l'économie internationale, les Nations-Unies adoptait la Convention des Nations Unies contre la criminalité transnationale organisée (Nations Unies, 2002a). Nous nous concentrons ci-après sur les aspects de la convention qui touchent la traite des personnes et surtout sur les deux protocoles qui y sont joints, soit le Protocole pour prévenir, réprimer et punir la traite des personnes, en particulier des femmes et des enfants (Nations Unies, 2000b) et le Protocole contre le trafic illicite des migrants par terre, air et mer (Nations Unies, 2000c). Le Protocole sur le transport illégal des migrants a pour objectif de prévenir et combattre la migration illégale en pénalisant l'entrée clandestine ( smuggling ), la fabrication de faux documents ou d'identité frauduleux, le fait de fournir, de procurer ou de posséder un tel document; en assurant un meilleur contrôle des frontières; en favorisant des ententes internationales concernant l'échange d'information et d'aide sur mer. En vertu du protocole sur la traite des personnes, les pays signataires doivent prévenir et combattre la traite des personnes, en s'engageant à criminaliser l'organisation, l'aide ou la participation à la traite des individus conformément à ce qui est défini dans l'article 3a (voir le libellé de la définition à la page 6 du présent rapport). Ils doivent également prévenir et combattre le problème en s'efforçant de mettre sur pied des « recherches, des campagnes d'information et des campagnes dans les médias, ainsi que des initiatives sociales et économiques, afin de prévenir et de combattre la traite des personnes » (Nations Unies, 2000b : 5). Notons ici que le protocole identifie la pauvreté, le sous-développement, l'inégalité des chances comme étant des facteurs qui rendent les personnes vulnérables à la traite. Le protocole promeut les échanges d'information entre les états et la formation des travailleurs impliqués à un titre ou à un autre dans la lutte contre la traite des êtres humains. Enfin, le protocole contient une section (articles 6, 7 et 8) sur l'assistance et la protection accordée aux victimes; par contre, les états ne doivent protéger la vie privée et l'identité des victimes que dans la mesure où le droit interne du pays le permet, et on se contente de demander aux états signataires d'envisager « de mettre en œuvre des mesures en vue d'assurer le rétablissement physique, psychologique et social des victimes de la traite des personnes ».