L'Etat fédéral américain est resté paralysé mardi, pour la première fois depuis dix-sept ans, sans que se dégage une solution de compromis budgétaire entre le président Barack Obama et ses adversaires républicains. Tandis que la police fermait au public le mémorial de Lincoln ou la statue de la Liberté, les élus républicains de la Chambre des représentants, où ils sont majoritaires, ont présenté des projets de loi ciblés permettant le financement des parcs nationaux, des pensions des anciens combattants ou du district de Columbia (Washington). La Maison blanche a catégoriquement rejeté par avance toute loi qui ne restaurerait que partiellement les services fédéraux et les élus démocrates de la Chambre ont rejeté un par un dans la soirée les textes de loi républicains, qui nécessitaient de recueillir une majorité des deux tiers, comme toutes les lois spéciales réclamant une mise en œuvre rapide. Les républicains ont promis de recommencer mercredi, mais le Sénat à majorité démocrate les rejettera probablement à nouveau. Cette fin de non-recevoir des démocrates laisse augurer des jours difficiles entre Barack Obama et ses opposants, engagés dans un bras de fer sur la réforme de la santé voulue par le président. C'est parce que les républicains demandaient le report d'un an de cette réforme phare, décriée notamment par les ultraconservateurs du Tea Party, que la loi de finances pour l'exercice fiscal commençant le 1er octobre n'a pu être votée à temps, mettant à l'arrêt administrations, musées et monuments à partir de lundi minuit (mardi 04h00 GMT). La guerre de tranchées devrait reprendre de plus belle dans les jours prochains, quand le Congrès va devoir voter le relèvement du plafond de la dette fédérale. En l'absence de vote en ce sens d'ici le 17 octobre, l'Etat fédéral ne pourra plus s'endetter légalement et, selon certaines estimations, il pourrait commencer à faire défaut sur une partie de ses obligations entre le 18 octobre et le 5 novembre. Le secrétaire au Trésor, Jack Lew, a adressé une lettre au Congrès pour l'exhorter à agir rapidement faute de quoi l'Etat n'aura plus que 30 milliards de dollars de trésorerie après le 17 octobre. Malgré le «shutdown» des services administratifs, l'administration Obama a lancé sa grande réforme du système de santé, le programme social le plus ambitieux aux Etats-Unis depuis Medicare il y a cinquante ans, en ouvrant des plates-formes d'assurance-maladie dans 50 Etats. L'ouverture de ces plates-formes en ligne a été perturbée par de nombreux bugs informatiques. (voir ) Entouré d'employés fédéraux, le président est intervenu de nouveau à la Maison blanche en accusant les républicains de la Chambre de prendre le gouvernement en otage. «Ils ont fermé le gouvernement au nom d'une croisade idéologique pour priver des millions d'Américains d'une assurance santé abordable», a déclaré Barack Obama. Les républicains ont estimé de leur côté que le président ne pouvait pas se plaindre tout en refusant de négocier. Pour tenter de sortir de l'impasse et ne pas apparaître responsables du blocage, les chefs de file républicains de la Chambre des représentants ont proposé un plan pour permettre la réouverture d'une partie des services fédéraux en faisant voter des lois au cas par cas. La Maison blanche a très rapidement rejeté cette offre, apparemment conçue pour dépasser dans l'immédiat l'antagonisme entre les durs du Tea Party, qui prônent la confrontation avec le gouvernement démocrate, et les républicains modérés. Cette proposition «montre un manque total de sérieux de la part des républicains», a déclaré le porte-parole de la Maison blanche, Jay Carney. Avant cela, le républicain Peter King, un modéré représentant l'Etat de New York, avait estimé que plus de 100 élus sur les 232 républicains de la Chambre soutiendraient la demande de Barack Obama de rétablir le financement de l'administration fédérale sans condition. Un chiffre qui serait suffisant pour faire passer le budget avec le soutien des 200 représentants démocrates de la Chambre. Prié de dire pourquoi, dans ce cas, les modérés ne réclamaient pas de vote, Peter King a répondu : «je suppose qu'ils attendent le bon moment». A Wall Street, les marchés boursiers n'ont pas semblé perturbés. L'indice Dow Jones a gagné 0,41% et le Nasdaq Composite 1,23%.