Ce jeudi 11 avril 2013 restera un jour gravé à jamais dans la mémoire collective des Casablancais. Un jour qui a été encore une fois le théâtre d'incidents graves survenus à l'occasion du match retard de première division entre le raja de Casablanca et l'équipe militaire. Une journée sombre marquée par la destruction massive et systématique du mobilier urbain, des voitures particulières, des autobus publics, des équipements tramway et des vitrines commerciales. Les hooligans du nouveau Maroc se sont même attaqués aux passants, dont l'une des scènes abjectes fut le renversement d'une poussette d'un bébé ne dépassant pas les six mois. Cette maudite rencontre soi-disant sportive n'aurait jamais dû se programmer un jeudi. Un jour de travail où les Casablancais vaquaient tous à leur occupation journalière. En ce qui nous concerne, ce qui s'est passé est la preuve tangible d'une vacance de pouvoir. Une vacance en ce sens que ceux qui ont la charge de la gestion urbaine sont le plus souvent des personnes ne s'accommodant pas au métier de la ville. Un métier qui nécessite un autre tempérament que celui là qui prime et qui perdure et qui nous met face à des opportunistes préoccupés plutôt par leurs familles et leurs intérêts. Comme il n'y a pas de fumée sans feu, nous sommes parfaitement en droit de nous interroger sur le rôle de l'ordre public dans ce schéma d'apocalypse. Qui est responsable de quoi ? Chaque fois que les stades de foot s'embrasent on cherche toutes les sortes d'excuses. Mais ce qu'oublie la direction générale de la sûreté nationale qui n'est plus sûre de rien, c'est qu'il n'y a pas d'excuses en matière de maintien de l'ordre. Oui, on l'a apprise par cœur cette disquette qui nous bombarde les oreilles avec le manque d'effectifs, la situation sociale dramatique des agents de police et le manque de logistique. Mais depuis quand une gestion urbaine saine néglige la dimension sécuritaire qui nécessite beaucoup d'engagements de la part de l'Etat régalien, beaucoup de moyens humains, logistiques et financiers ? L'effectif des agents de sécurité en Tunisie est trois fois celui du Maroc. Pourtant, la population tunisienne n'est que de moitié celle du Maroc. Des jeunes dans l'âge de l'apprentissage qui ont besoin d'être accompagnés partout où ils se rendent. La sensibilisation devra mettre l'accent sur les risques que revêtent leurs actes de vandalisme et les peines répressives conséquentes. La sensibilisation devra aussi leur éduquer les bonnes manières et comment se contrôler, se montrer sages, respectueux des équipements sportifs et animés d'un esprit de civisme, de civilité, autant de qualités humaines qui font l'essence même du sport. Les moyens de lutter contre le fléau des stades ne manquent pas. Nous avons proposé à maintes reprises quelques uns qui nous paraissaient revêtir une importance primordiale. Le premier moyen est celui-là même qui semble animer la volonté du ministre de la Jeunesse et des Sports, qui consiste à responsabiliser les associations sportives en les exhortant à se comporter d'abord en éducateurs formateurs face à leurs adhérents. Il faut ouvrir les locaux des stades aux supporters et aux associations sportives pour pouvoir réussir le défi de leur encadrement. Le second moyen c'est celui qui consiste à contrôler les entrées aux stades, qui doivent être sélectives afin de barrer l'accès aux mineurs et aux faiseurs de troubles. Pour cela, il faudra désormais exiger la carte nationale aux guichets. Un travail qui peut être facilité par l'implication des éléments de la sûreté nationale. Les stades doivent être assimilés à des administrations publiques qui exigent la présentation de la carte pour avoir droit au badge d'accès aux services. Les associations de leur côté feront tout le bien de prodiguer des cartes d'adhésion afin de mieux encadrer leurs adhérents et mieux les organiser et renseigner. Le troisième moyen doit être assuré par les émissions sportives télévisées et radiophoniques qui sont bien indiquées à s'impliquer dans ce combat titanesque; à condition de revoir leurs méthodes d'émetteurs et les professionnels des médias savent mieux que quiconque qu'il y a beaucoup de choses à faire à ce niveau, car transmettre des matchs et commenter les compétitions ne servent plus à rien en comparaison avec la lourde facture à payer chaque fois que les équipements sportifs sont saccagés. Et c'est l'occasion d'attirer l'attention de tout le monde sur un autre fléau beaucoup plus dangereux que la violence dans les stades et qui est cette fois-ci fomenté par quelques journalistes sportifs de radios qui portent la violence des stades dans les studios et reproduisent le même jargon et les mêmes sensations comme cela se passe exactement dans les tribunes. Le malheur du journalisme c'est que tout le monde peut s'auto réclamer journaliste et, à ce titre, s'adresser impunément au public. Ces soi-disant journalistes parlent avec la même ferveur et la même effervescence qui embrasent les stades et s'érigent en modèles de chauvinisme et d'agressivité, alors qu'ils assument la lourde responsabilité de se comporter d'abord en bons éducateurs. Le dernier moyen -et il n'est pas le dernier- est celui du rôle aujourd'hui joué par la technologie dans le contrôle de la vie urbaine, illustré par la généralisation des caméras de surveillance qui ont donné d'excellents résultats en matière de contrôle des espaces publics et de surveillance des comportements d'incivilités reproduits par les faiseurs de troubles. En Europe, les communes urbaines, qui ont doté leurs villes de tels procédés technologiques, ont enregistré des chutes surprenantes en nombre d'actes de vandalisme dans les stades et d'actes criminels dans les rues.