La visite Royale qu'entamait SM le Roi Mohammed VI, hier vendredi à Dakar, ne manquera pas d'insuffler une nouvelle dynamique à l'excellence des relations maroco-sénégalaises. L'axe Rabat-Dakar, désormais érigé en modèle magistral de la coopération sud-sud, est promis à davantage de rayonnement et d'initiatives effectives et multiformes pour donner l'exemple d'une nouvelle Afrique aspirant à fédérer ses efforts pour le développement et l'intégration. En droite ligne de la volonté commune d'aller de l'avant dans ces relations ancestrales et privilégiées entretenues par les Chefs d'Etat des deux pays depuis l'aube des indépendances, Sa Majesté le Roi Mohammed VI a effectué, en 2001, une première visite au Sénégal qui avait donné une forte impulsion et un réel contenu aux relations de coopération dans les domaines prioritaires de développement entre les deux pays, tels l'agriculture, la pêche, l'éducation, la formation, la santé, la gestion de l'eau, l'irrigation, les télécommunications, l'aménagement urbain, le transport aérien et les infrastructures de base. Sa Majesté le Roi Mohammed VI va ensuite multiplier les visites au Sénégal, en vue de symboliser la fraternité et la nouvelle dynamique que le Souverain ne cesse de promouvoir dans les relations avec ce pays. Le 14 novembre 2006, le Souverain s'est rendu en visite de travail au Sénégal. La quatrième en cinq ans, cette visite a été marquée par la signature de plusieurs accords de coopération dans les domaines de l'investissement, de l'assistance technique dans le domaine de la réglementation et de l'organisation du secteur du bâtiment, des travaux publics, de la protection civile et du transport aérien. L'arrivée au pouvoir au Sénégal du nouveau président, Macky Sall, met au goût du jour le renforcement des relations entre le Maroc et le Sénégal. Dans un message de vœux adressé à Macky Sall, le Souverain avait alors souligné ‘'la qualité exceptionnelle des relations de fraternité africaine et de coopération fructueuse'' qui unissent les deux pays. SM le Roi avait réitéré, à cette occasion, sa détermination à œuvrer de concert avec le nouveau président sénégalais pour ‘'les renforcer et les diversifier davantage, dans le cadre d'un partenariat stratégique politique et économique fort et innovant, et d'une coopération Sud-Sud agissante et solidaire, pour le bien-être des deux peuples frères et pour le développement du Continent''. D'autre part, le soutien du Sénégal à la cause de l'intégrité territoriale du Royaume a toujours constitué une conviction constante de la diplomatie sénégalaise. Le premier Chef de la diplomatie du nouveau gouvernement sénégalais, M. Alioune Badara Cissé avait réaffirmé cette position lors de sa première visite au Maroc tout récemment. “La souveraineté marocaine est incontestable sur la partie sud de son territoire. C'est une position tranchée qui date de tous les jours", avait-il déclaré lors d'une récente visite de travail au Maroc. D'autre part, le Maroc et le Sénégal ont fait part de leur détermination à diversifier la coopération bilatérale et en élargir l'éventail, à l'occasion d'une réunion préparatoire de la 14e session de la Commission mixte maroco-sénégalaise de coopération qui se tiendra prochainement à Dakar. “Le contexte économique et sécuritaire régional et international exige des liens encore plus étroits entre le Maroc et le Sénégal, avec pour perspective de constituer un modèle de coopération à même d'inspirer les autres pays africains", ont affirmé les deux parties à cette occasion. Elles ont également plaidé pour la consolidation et l'enrichissement des relations bilatérales, afin de répondre aux ambitions communes et de réunir les conditions d'un modèle de partenariat entre pays africains, en développant les structures de ces liens, en innovant dans leurs démarches et en diversifiant les acteurs. S'il est vrai que depuis les années 2000, les flux commerciaux et les investissements se sont accélérés entre les deux pays (les échanges commerciaux sont passés de 6 millions de dollars en 1999 à 52 millions en 2005), il n'en demeure pas moins que le mouvement remonte bien au-delà. C'est en 1964 qu'a été signée la convention d'établissement garantissant le traitement national aux entreprises marocaines et sénégalaises dans les deux pays. Depuis, de nombreux traités sont venus conforter l'axe Casablanca-Dakar. Pas moins de 60 accords juridiques et commerciaux existent entre les deux pays. En plus de ces accords, il y a le conseil d'affaires maroco-sénégalais qui regroupe les organisations patronales des deux pays. L'agriculture, le tourisme, le BTP, les travaux du génie civil, les nouvelles technologies de l'information constituent de véritables gisements de croissance. La qualité des rapports politiques explique l'intense flux d'investissement initié d'abord par le secteur public marocain, suivi désormais du privé, vers le Sénégal. Le savoir-faire marocain est présent au Sénégal dans les domaines du BTP, de l'industrie pharmaceutique, de l'électrification. Depuis 2005, le relais est puissamment pris par les banques. Dans cet élan de coopération sud-sud, le groupe Attijariwafa Bank, dont le PDG, M. Mohamed El Kettani, a été récemment décoré par le président Macky Sall, offre l'exemple d'une success-story. Le groupe “CBAO-Attijariwafa bank", constitué en 2008 suite à une fusion entre la banque sénégalaise “Compagnie bancaire de l'Afrique occidentale" CBAO et la filiale marocaine “Attijari bank Sénégal", est désormais le premier groupe bancaire au Sénégal qui a réussi également à s'ériger en leader au niveau de la région d'Afrique de l'Ouest. Le Groupe CBAO-AttijariWafa bank se veut ainsi le vecteur de la coopération maroco-Sénégalaise en termes d'échanges commerciaux et d'investissements. Concernant la contribution de CBAO-Attijari à l'effort de financement de l'économie sénégalaise, un sujet de premier intérêt pour les autorités du pays, la filiale sénégalaise du Groupe est la seule banque commerciale de la place qui a participé au financement de grands projets tels la construction de l'autoroute à péage du Sénégal, le projet d'une centrale électrique, et celui de la future centrale à charbon (Centrale de Sendou d'une capacité de production de 125 MW), selon le PDG du groupe. D'après le bilan 2011, les crédits à l'économie sénégalaise du groupe se chiffrent à 527 milliards Fcfa pour un total ressources de 493 milliards Fcfa (1 euro environ 654 Fcfa). L'Office national d'électricité et de l'eau potable (ONEE) est également présent au Sénégal. L'Office a remporté deux concessions d'électrification rurale à Saint Louis et Louga (nord). “La Compagnie maroco-sénégalaise de l'électricité (Comasel), filiale de l'ONE, créée en octobre 2008, est chargée d'exécuter pour le compte de l'ONE le contrat de concession d'électrification rurale de la région de St-Louis (550 villages) pour un investissement global estimé à 24 millions dollars. La deuxième concession à Louga comprend le raccordement de 11.000 foyers. Sur le registre des investissements privés, on peut citer West Africa Pharma, filiale du laboratoire marocain Sothema qui a ouvert une usine de fabrication de médicaments à Dakar pour un investissement de 6,5 millions euros. Toutefois, les échanges commerciaux du Royaume avec le Sénégal en particulier et la région d'Afrique de l'Ouest, en général, demeurent entravés par l'absence d'un accord commercial avec l'Union économique et monétaire d'Afrique de l'Ouest (UEMOA, huit pays dont le Sénégal et la Côte d'Ivoire). L'activation de la signature de l'Accord Préférentiel Commercial et d'Investissement, paraphé en novembre 2008 avec l'UEMOA, est une condition nécessaire pour la promotion de la coopération Sud-Sud tant souhaitée. Il s'agit d'un accord qui s'inscrit dans un cadre gagnant-gagnant, conformément à la démarche du Royaume visant à renforcer l'intégration régionale et à assurer une asymétrie en faveur des pays africains appartenant au groupement UEMOA. Soucieux d'apporter à cette coopération sa dimension solidaire, le Royaume a initié plusieurs projets ciblant des secteurs de développement prioritaires pour le Sénégal. Dans le cadre de la coopération sud-sud, le Maroc a mis à disposition sa technique d'insémination des nuages (pluies provoquées) au profit de plusieurs pays africains, notamment le Sénégal où le programme a été baptisé “Bawaan". A travers l'opération “Bawaan", le Maroc apporte ainsi sa contribution au programme sénégalais “la Grande offensive agricole pour la nourriture et l'abondance" (Goana) dont l'objectif est d'assurer au Sénégal la sécurité alimentaire et réduire sa dépendance alimentaire. Une des premières priorités du pays de la Teranga (hospitalité en Wolof). La formation est un autre secteur d'importance dans la coopération entre les deux pays. Avec plus de 8.000 étudiants, le Maroc reste la deuxième destination des Sénégalais après la France. De son côté, le Sénégal compte quelques centaines d'étudiants marocains (plus de 600) qui, surtout, intègrent la faculté de médecine de l'Université Cheikh Anta Diop de Dakar. La coopération entre les deux pays concerne également le domaine religieux, notamment à travers la Zawia Tijania. Un congrès des Tijanes du monde a été organisé en 2007 à Fès. Cette coopération s'est illustrée notamment par la construction, en 1964, de la Mosquée Hassan II de Dakar (restaurée en 2002). La visite de SM le Roi au Sénégal est l'occasion de consolider les acquis de cette coopération multiforme, solidaire et agissante. Les liens spirituels et d'amitié ancestraux tissés le long de l'histoire entre les deux peuples frères, balisent la voie pour réussir les enjeux d'une coopération sud-sud porteuse et profitable pour les deux pays.