Selon le rapport du CES, le lancement de grands projets d'investissements notamment au niveau des établissements publics ne pourra qu'augmenter ce montant de crédit de TVA créant des besoins de financement pour ces établissements. Ce qui devra conduire à classer ce crédit de TVA parmi la dette publique dont l'échéance de remboursement est souvent indéfinie. En effet, l'importance de ces investissements et donc de la TVA qu'ils supportent comparée au potentiel de TVA à collecter sur la valeur Ajoutée qui serait générée par ces investissements, conduit à une situation de crédit permanent de TVA et donc de dette permanente sur l'Etat qui ne serait jamais remboursée à l'investisseur. Le cas de l'ONCF avec sa vision volontariste d'investisseur public de premier plan est illustrant à ce sujet puisque la TVA supportée sur ses investissements ne serait récupérable sur l'horizon d'un siècle environ en l'état actuel de la législation. Au niveau de la mobilisation de crédits pour financer l'investissement, l'existence de crédit de TVA non remboursable et non reconnu comme créances sur le Trésor public complique davantage les possibilités de cette mobilisation. Les bailleurs de fonds refusent souvent de financer ce crédit et le considère comme un actif fictif impactant la structure financière de l'investisseur emprunteur. Or, le mécanisme de compensation neutre est le principe de base de la TVA comme le montrent les pratiques et expériences en vigueur dans les pays ci-après. En France, le crédit de taxe peut être remboursé dans les conditions suivantes: - Remboursement annuel: au 31 décembre, à condition que le crédit de TVA soit d'au moins 150€; - Remboursement trimestriel: pour les redevables déclarant la TVA tous les trimestres, à condition que le remboursement demandé soit au moins de 760€; - Remboursement mensuel: pour les redevables déclarant mensuellement la TVA, à la condition que le remboursement demandé soit au moins de 760€; - En fin de mois: si le crédit de taxe résulte d'opérations d'exportation ou de livraisons intra-communautaires. Ce remboursement est applicable également pour la TVA ayant grevé les investissements si l'activité envisagée est une activité soumise à la TVA. L'administration fiscale dispose d'un délai de 6 mois suivant la date de réception de la demande de remboursement pour statuer. A défaut de réponse dans ce délai, cette demande est considérée comme rejetée par l'administration. Le contribuable peut saisir le tribunal administratif pour contester ce refus. En Espagne, dans l'hypothèse où la personne imposable n'aurait pas pu déduire la TVA supportée durant la période de liquidation, le montant de celle-ci s'avérant supérieur au montant de la TVA collectée au cours de la même période, il sera en droit de : - demander le remboursement de l'excédent de TVA supportée n'ayant pas été déduit (il convient de solliciter ce remboursement chaque mois ou à la fin de chaque année) ou, - consigner cette différence à compenser avec les montants collectés au titre de la période de liquidation suivante. Remboursement de la TVA Ce remboursement est applicable aussi bien pour la TVA ayant grevé les dépenses d'exploitations que celle grevant les opérations d'investissement. Dans l'hypothèse où, au terme de la période de liquidation, il aurait été opté pour le remboursement de l'excédent des montants de TVA supportés n'ayant pas pu être déduits, l'Administration fiscale sera tenue de procéder d'office à leur remboursement dans un délai de six mois à compter de la date d'expiration de la période de présentation volontaire de la liquidation. Si ce délai s'écoule sans que l'Administration n'ait donné l'ordre de paiement correspondant, la somme demeurant en attente de remboursement produira des intérêts de retard à compter du jour suivant la date d'expiration du délai de six mois précité. Instaurer une TVA à deux taux donnant droit à récupération L'on constate donc que la majorité des pays rembourse aussi bien le crédit de TVA pouvant découler de l'investissement que celui pouvant être généré par l'exploitation courante. Le fait de ne pas rembourser ce crédit de TVA traduit une dette envers l'Etat qui viendra s'imputer sur la taxe sur la valeur ajoutée à collecter par les générations futures. La problématique du remboursement des crédits de TVA constitue le principal défi qui doit être relevé pour assurer la neutralité de cette taxe à l'instar de ce qui est en vigueur dans d'autres pays. Ce qui permettra d'offrir plus de flexibilité aux pouvoirs publics en matière de fixation des taux de TVA, en fonction de la politique économique et sociale adoptée, sans grever la trésorerie des entreprises qui ne sont que de simples intermédiaires, en matière de recouvrement de cette taxe, entre le trésor public et le consommateur final, et sans en reporter les conséquences financières sur les générations futures. Les mesures suivantes peuvent être envisagées : - Assurer la neutralité de la TVA pour l'entreprise, pour se faire, il faudrait que chaque mois le solde entre TVA payée et TVA collectée soit réglé. L'entreprise paye à l'Etat le solde quand il est à sa charge, l'Etat s'engageant en contrepartie à payer le solde quand il est bénéficiaire à l'entreprise dans un délai fixé par la loi en prévoyant d'appliquer pour les retards de paiement un intérêt identique à celui retenu pour les retards de paiement pour les créances commerciales. - Transformer les crédits de TVA accumulés à cause de l'effet butoir en dette reconnue sur le Trésor à échéance 10 ans même à coupon 0. - Revenir au régime d'exonération des investissements de la TVA pour encourager l'investissement sur les infrastructures. Cette mesure doit nécessairement être liée à la première mesure ci-dessus. - Donner au secteur agroalimentaire la possibilité de récupérer une partie de la TVA collectée via un mécanisme de TVA payée fictive sur les produits agricoles achetés. - Passer à 2 taux de TVA donnant droit à récupération, un taux normal à 20%, et un taux réduit à 10%, en plus du taux à 0% pour les produits nécessitant une exonération. En liaison avec cette mesure, réserver 2 points de TVA au financement de la couverture sociale. - Réintroduire un taux de TVA super élevé (30%) sur les produits de consommation de luxe dont la recette ainsi que celle de l'équivalent de 2 points de TVA au taux de 20% peuvent être affectés au financement des cotisations sociales et/ou au fonds d'appui à la cohésion sociale.