Les prochains quotas de thon rouge de Méditerranée, une espèce menacée par des années de surpêche mais qui a donné de premiers signes de rétablissement, étaient discutés à huis clos, dimanche à Agadir, les pays réunis avaient jusqu'à hier lundi pour parvenir à un consensus. Les scientifiques de la Commission internationale pour la conservation des thonidés de l'Atlantique (Cicta), un organisme intergouvernemental composé de 47 pays et de l'Union européenne, ont préconisé un quasi statu quo jusqu'en 2015. En séance plénière, les membres de la Cicta devaient annoncer lundi s'ils suivent cet avis ou pas. Des décisions sont également attendues sur la protection de différents types de requins, également victimes de surpêche. Pour la zone Atlantique Est, qui comprend la Méditerranée, le comité scientifique recommande des captures maximales de thon rouge de 12.900 tonnes, le niveau actuel, à 13.500 tonnes. Pour l'Atlantique Ouest, où le thon rouge est essentiellement pêché dans le Golfe du Mexique, la recommandation est 1.750 tonnes. En Méditerranée, les scientifiques ont dit avoir constaté pour la première fois une hausse de la population, mais ont appelé à la prudence en raison d'incertitudes sur sa «vitesse» et son «ampleur». Cette tendance contraste radicalement avec 2010 lorsque le thon rouge avait frôlé l'inscription sur la liste des espèces les plus menacées de l'ONU, et donc l'interdiction pure et simple de pêche. Au cours des années 1990 et 2000, les prises de thon rouge sont allées jusqu'à 50.000 tonnes par an en Méditerranée et Atlantique Est. En 2009, le quota était encore de 22.000 tonnes, puis a été ramené à 13.500 tonnes l'année suivante, avant de descendre à 12.900 tonnes en 2011 et 2012. Un marché très lucratif A Agadir, les signaux positifs enregistrés par les scientifiques de la Cicta ont aiguisé les appétits de certains pays qui réclament une hausse des quotas. Mais les délégations nationales restent très discrètes sur leur position. L'UE a officiellement dit vouloir suivre l'avis scientifique. «Les discussions se poursuivent en commission mais aussi via des réunions bilatérales non officielles, et nous ne savons pas ce qui va en ressortir», ont indiqué plusieurs représentants d'ONG, admis comme observateurs de cette 18e conférence de la Cicta. «Nous ne savons même pas si les quotas seront arrêtés jusqu'en 2015, date de la prochaine évaluation scientifique du stock de thon rouge, ou si les décisions porteront sur 2013 et 2014» seulement, a indiqué une représentante d'ONG sous couvert de l'anonymat. «Nous avons bon espoir d'avoir pour 2013 une décision positive, c'est-à-dire qui respecte les recommandations des scientifiques de la Cicta», a-t-on ajouté de même source. Toutes les ONG plaident pour un maintien des quotas au niveau actuel. Elles estiment qu'il ne faut pas se réjouir trop vite car les données à la disposition des scientifiques ne sont pas toujours complètes. La pêche illégale, toujours pratiquée même s'il a été réduite grâce à davantage de contrôles, n'est par exemple pas prise en compte pour l'évaluation du stock. Les thons rouges ne se reproduisent en Méditerranée qu'à partir de l'âge de 4 ou 5 ans, ce qui allonge les délais de renouvellement de la population, soulignent également les ONG. Le commerce du thon rouge est un marché très lucratif, principalement destiné au Japon, qui absorbe 80% des prises en Méditerranée. Sont réunies à Agadir plus de 500 personnes appartenant notamment aux délégations des pays de l'UE, des Etats-Unis, du Canada, du Japon, de plusieurs pays méditerranéens (Maroc, Algérie, Tunisie, Egypte, Libye) et africains (Sierra-Leone, Côte d'Ivoire etc...)