Les militants anti-régime en Syrie ont appelé à manifester vendredi pour rendre hommage aux étudiants d'Alep fortement mobilisés malgré la répression, au moment où l'armée continuait de bombarder violemment des bastions rebelles de la province de Homs, dont Rastane. Ceci au moment où l'opposition syrienne ne cesse de donner des signes de sa division. Son chef, à peine reconduit à sa tête, vient de menacer de démissionner, suite aux critiques liées à sa réélection. Jeudi, des milliers d'étudiants d'Alep (nord), deuxième ville du pays, ont manifesté sur le campus pour réclamer la chute du régime de Bachar al-Assad, à l'occasion d'un déplacement des observateurs de l'ONU chargés de surveiller l'application d'un cessez-le-feu complètement ignoré, selon des militants. «Des milliers d'étudiants ont quitté les cours quand les observateurs de l'ONU sont arrivés, scandant des slogans hostiles au régime» et réclamant des armes pour la rébellion, selon un porte-parole des militants locaux, Mohammed Halabi, joint par téléphone. Une vidéo diffusée par les militants montre un grand nombre d'étudiants insultant M. Assad ou entourant un véhicule marqué du logo de l'ONU en criant «Le peuple veut la chute du régime». Une autre vidéo montre des jeunes assis à l'arrière d'une voiture conduite par un observateur de l'ONU et filmant des membres des forces de l'ordre armés de bâtons frappant brutalement des étudiants. Prenant l'observateur à témoin, les jeunes dans la voiture le prient ensuite de partir lorsqu'un homme en civil s'approche du véhicule et bloque la vue de l'étudiant filmant la scène. «Partons, partons, ils vont nous arrêter, nous sommes sous ta protection», crie une jeune fille à l'adresse de l'observateur. Un manifestant a été tué dans des rassemblements séparés jeudi soir dans le quartier Salaheddine, selon l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). L'Université d'Alep, la deuxième de Syrie, est le centre nerveux de la mobilisation dans cette ville restée longtemps à l'écart de la révolte populaire lancée il y a plus de 14 mois. Le 3 mai, quatre étudiants ont été tués par les tirs des forces syriennes qui ont fait irruption manu militari et semé la terreur dans la cité universitaire. Toujours à Alep, un officier a été tué vendredi et cinq blessés dans l'explosion d'une bombe dans le quartier al-Chaar, selon l'OSDH. La ville rebelle de Rastane était également violemment bombardée, selon la même source. L'ONG avait dénoncé une tentative de «détruire progressivement» la cité que le régime tente depuis des mois de reprendre aux insurgés. L'OSDH critique «le silence des observateurs internationaux qui n'ont rien fait pour arrêter le bombardement continu» sur Rastane. Et à Damas, des dizaines de manifestants sont sortis dans les quartiers traditionnellement hostiles au régime, selon l'ONG. Signes de division dans l'opposition Des divisions sont apparues au sein du Conseil national syrien (CNS), la principale coalition de l'opposition son chef Burhan Ghalioun se disant prêt jeudi à démissionner dès qu'un successeur aura été nommé, à la suite de critiques liées à sa réélection. Sur le terrain, l'armée syrienne a concentré ses bombardements sur la ville de Rastane (centre), un important bastion des forces rebelles, qualifiées la veille par le président Bachar al-Assad de «bande de criminels». Et cinq membres d'une même famille, dont deux enfants, sont morts lorsqu'un obus de mortier s'est abattu sur leur maison à Douma, près de Damas, selon des militants cités par l'Observatoire syrien des droits de l'Homme (OSDH). Reconduit mardi à la tête du CNS, M. Ghalioun a assuré jeudi qu'il n'accepterait «pas d'être le candidat de la division». «Je me retirerai dès que le choix se portera sur un nouveau candidat, soit par consensus soit à travers de nouvelles élections». Quelques heures plus tôt les Comités locaux de coordination (LCC), qui animent la contestation sur le terrain, avaient menacé de se retirer du CNS, dénonçant un «monopole» du pouvoir au sein de cette instance. Les détracteurs du CNS lui reprochent essentiellement la grande influence des Frères musulmans en son sein et son manque de coordination avec les militants sur le terrain. Partisan d'une gauche nationaliste arabe, adoubé par la confrérie, M. Ghalioun avait émergé comme la personnalité capable de rassembler au sein d'un conseil composé de multiples tendances (islamistes, nationalistes, libéraux). Bien que contesté, il a été reconduit à plusieurs reprises faute de consensus en faveur d'un autre opposant, bien que le règlement du CNS impose une présidence tournante tous les trois mois.