L'Afghanistan va dominer les débats au sommet de l'Otan de Chicago, où la France se trouvera dans une situation délicate après avoir annoncé un retrait anticipé de ses soldats. Présenté comme le «plus grand de l'histoire» de l'Alliance atlantique avec une cinquantaine de pays invités, ce sommet sera aussi celui de «l'austérité», qui oblige les armées occidentales à coopérer davantage pour ne pas perdre leur suprématie technologique. Cette réunion revêtira une importance particulière pour le président américain Barack Obama, qui accueille dimanche et lundi ses pairs dans sa ville de Chicago (nord-est), placée sous haute surveillance alors que plusieurs manifestations sont prévues. «A six mois de l'élection présidentielle, elle lui donnera l'occasion de s'affirmer comme le leader du monde occidental», souligne Nick Witney, expert au Conseil européen de politique étrangère («European Council on Foreign Policy»). De ce fait, les observateurs escomptent un sommet sans anicroche, notamment sur l'Afghanistan alors que la priorité de l'Otan est de réussir sa sortie, une décennie après avoir lancé en 2001 l'opération la plus complexe de son histoire. Il s'agira donc de resserrer les rangs autour de la stratégie établie en 2010: retirer en bon ordre à la fin 2014 la grande majorité des 130.000 soldats internationaux déployés en Afghanistan. «Arrivés ensemble, partis ensemble» est le mot d'ordre clamé par Anders Fogh Rasmussen, le secrétaire général de l'Otan. Mais cette volonté de cohésion est fragilisée par le nouveau président français, François Hollande, décidé à rapatrier les troupes combattantes de son pays d'ici la fin 2012. Le dirigeant socialiste estime en effet la mission «terminée» puisque les Français vont prochainement remettre aux forces afghanes la responsabilité de la sécurité de la seule région dont ils ont encore la charge, la Kapisa. A Chicago, les «alliés essaieront de donner l'impression que l'agenda de chaque pays s'accorde avec la stratégie de l'alliance», selon Nick Witney. «Les dents peuvent grincer contre M. Hollande mais ça n'ira pas plus loin», prédit un diplomate occidental. L'Otan a surtout besoin de préserver l'unité pour lancer son plan stratégique pour «l'après 2014», lorsque la priorité sera de prévenir, à tout prix, le retour des talibans. D'importantes questions restent à trancher sur le rôle futur «de soutien» dévolu à l'Otan, sur le financement des forces de sécurité afghanes, dont le coût est évalué à 4,1 milliards de dollars par an, ou sur la poursuite de missions de contre-terrorisme à la frontière avec le Pakistan. Sur ces sujets, Chicago ne devrait être qu'une étape de réflexion, la prise de décisions étant prévue ultérieurement. L'autre dossier sensible du sommet sera la défense antimissile, la principale pomme de discorde entre l'Otan et la Russie. L'Otan officialisera dimanche l'achèvement de la première phase de son bouclier antimissile. Quatre phases en tout sont prévues pour la mise en oeuvre de cette structure destinée à protéger l'Europe de tirs de missiles tirés du Moyen-Orient, en particulier d'Iran. De technologie américaine, ce bouclier est vanté par M. Rasmussen comme un exemple de la coopération multinationale qu'il appelle de ses voeux dans le cadre du concept de «Défense intelligente» («Smart defence»). «Nous vivons une période où il faut effectuer des choix difficiles pour tous. Le défi est comment combiner sécurité et économie», a-t-il récemment expliqué, en appelant les pays européens à ne pas baisser la garde. Quelque 25 projets de coopération, de dimension modeste, seront lancés à Chicago, la plupart d'entre eux portant sur la formation ou les services.